Corridors et logistique

L’amélioration de la connectivité logistique du Paraguay et de la Bolivie n’est pas acquise

Le Programme d’actions de Vienne est arrivé cette année au milieu de son terme. Devant venir en aide aux pays les moins développés et ceux sans littoral, il dresse un bilan des premières actions menées ces dernières années.

Le Programme de Vienne 2014-2024 est mené par la commission des Nations Unies pour les pays en développement, les pays sans littoral et les petits pays insulaires d’Amérique latin et des Caraïbes. Depuis sa mise en place, plusieurs mesures ont été entrepris par des pays comme la Bolivie et le Paraguay pour gommer leur handicap de pays enclavé. Le rapport, publié pendant l’été 2019, dresse un premier bilan de ces actions.
Selon le rapport, les deux pays su-américains ont réalisé de nombreux travaux pour l’amélioration de leur connectivité logistique. « Le Paraguay et la Bolivie ont réalisé des efforts pour améliorer leurs infrastructures de transport et leur connectivité, en donnant une priorité à ces ouvrages dans leurs plans de développement et en dirigeant les investissements vers le secteur des infrastructures et notamment les investissements dans des routes bitumées réalisées dans ces pays et chez leurs voisins », indique le rapport d’étape du Programme de Vienne.
Pour les auteurs du rapport, il reste encore des efforts à fournir. Il s’avère que les régions rurales montrent encore des faiblesses. Les rapporteurs demandent que soient réalisés des travaux dans ces régions afin de pouvoir réduire encore les coûts logistiques et donc améliorer la compétitivité des exportations nationales.

Un réseau routier qui souffre d’un manque de financement

Le réseau routier bolivien se caractérise par trois axes majeurs : celui allant d’est en ouest, celui allant du nord au sud et le corridor qui relie l’Argentine avec le lien est-ouest. Entre 2014 et 2016, le réseau routier bolivien s’est vu adjoindre 2767 km de routes supplémentaires dont 1942 km en routes graviers et 825 km de routes bitumées. 3445 km de routes sont actuellement en construction. Si ces efforts sont importants pour le pays, comme le note le rapport, ils restent insuffisants et souffrent notamment d’un manque d’entretien. Par ailleurs, 49% des routes boliviennes demeurent en terre, ce qui complique considérablement le transport lors des périodes de pluie. Dans leurs recommandations pour les prochaines années, les rapporteurs préconisent de maintenir les investissements sur le réseau routier des deux pays. Le réseau des pays de transit disposent d’un meilleur réseau. En effet, avec un indice logistique plaçant le Paraguay à la 87è place et la Bolivie à la 138è, ces deux pays sont loin de la qualité du réseau routiers de pays comme le Chili qui se place à la 45è, le Brésil à la 51è et l’Argentine à la 60è place. Selon les premières estimations réalisées, la Bolivie devra investir 15,1Md$ et le Paraguay quelques 14Md$ pour pouvoir prétendre disposer d’un réseau routier correct. Deux facteurs limitent le financement du réseau routier : l’absence d’un programme clair et les restrictions budgétaires dans chaque pays.

Fluvial : jouer sur la multimodalité

S’agissant de la voie fluvial Parana-Paraguay, le rapport note avec satisfaction les travaux réalisés sur les installations portuaires et sur la flotte disponible. Cependant, des restrictions demeurent sur la navigation en raison de la préservation des ressources naturelles et de la coordination des normes de navigation avec les pays de transit. Parmi les réalisations réussies, le rapport note les efforts réalisés pour exporter depuis le port de Manaus au Brésil du bois et des châtaignes originaires de Bolivie. Les produits sont transportés par voie routière jusqu’au port de Porto Velho au Brésil puis acheminés par barge jusqu’à Manaus. Il conviendrait donc d’améliorer le transport routier pour donner une dynamique à cette multimodalité route/fleuve et mer. Déjà, l’État de Rondonia au Brésil a accepté de signer un traité avec les boliviens pour leur faciliter leurs exportations par le port de Manaus. Il reste que le réseau de voies navigables Parana-Paraguay doit aussi faire l’objet d’un dragage pour une plus grande fluidité des barges et d’un balisage pour une plus grande sécurité.

Ferroviaire : pousser le projet de train Biocéanique

Le transport ferroviaire connait aussi des réalisations encourageantes. Le projet de train Biocéanique permettrait des connexions avec les ports sur le Pacifique et l’Atlantique. Ce projet de ligne ferroviaire partirait du port péruvien d’Ilo pour rejoindre la Bolivie, avec une extension sur La Paz et ensuite continuer son chemin au Brésil jusqu’au port de Santos. Ce projet de grande envergure comprendrait aussi une ligne qui partirait de Antofagasta pour rejoindre le Paraguay. Au total, ce sont plus de 1500 km de voies ferrées qui ouvriraient la Bolivie et le Paraguay à la mer. Dans son rapport, la commission de l’ONU note que le Paraguay a décidé de réactiver ce projet en misant sur des investissements privés. En Bolivie, des travaux pour relier le réseau ferré de l’est du pays à celui de l’ouest est en cours. Les rapporteurs préconisent aussi de réaliser la liaison entre le réseau ferroviaire argentin et le réseau oriental de Bolivie pour offrir un accès à la mer sur la côte atlantique plus au sud.

Du côté paraguayen, le réseau ferroviaire est « quasi inexistant », note le rapport de l’ONU. Les rédacteurs préconisent donc de lancer une politique de réactivation de ce réseau. Des projets pour faire intervenir des opérateurs privés sont en cours de négociation. Dans ces recommandations, le rapport souligne l’importance reposant sur le « train Biocéanique » qui pourrait résoudre de nombreux problèmes et surtout améliorer l’intermodalité régionale. Le 23 août, une réunion entre le gouvernement du Mato Grosso du Brésil, et des responsables boliviens ont réaffirmé l’importance de réaliser ce projet de train entre les deux océans. S’il est majeur pour la Bolivie, il présente aussi un atout pour le Brésil qui pourrait exporter une partie de sa production vers la Chine sans passer par le cap Horn ou le canal de Panama pour les marchandises produites dans l’ouest du pays.
Quant au transport aérien, les dernières tendances montrent une croissance de l’utilisation de ce mode. Il reste encore des investissements importants à réaliser dans les aéroports et la construction de nouveaux hubs pour les passagers et le fret.
Par ailleurs, le rapport préconise d’aller plus loin en améliorant l’intermodalité. « Elle est présente dans de nombreux projets de corridors mais il reste encore des progrès à faire tant au niveau des infrastructures, de la facilitation des opérations douanières et des processus avec les pays de transit. Il faut que la co-modalité, à savoir la coordination et l’amélioration des avantages de chaque mode de transport favorise une réduction des coûts logistiques et opérationnels et réduisent les externalités négatives. »
Pour atteindre ces objectifs, la partie financière jouera un rôle majeur. Les recours à la fiscalité restent limités, pour les auteurs du rapport. Il convient alors de renforcer le cadre règlementaire des partenariats publics-privés.