Politique

Assurances : les incendies des porte-conteneurs et les sinistres des rouliers inquiètent

Dans son rapport annuel sur la sécurité maritime, le groupe Allianz note une baisse en 2019 des pertes. Un chiffre qui ne doit pas cacher les nombreux éléments qui restent à améliorer dans ce mode.

Les sinistres en 2020 selon AGCS. © AGCS

En 2019, le monde maritime a enregistré 41 pertes totales. Un chiffre en baisse de 25% selon le rapport annuel d’Allianz Global Corporate & Speciality’s (AGCS). Le chiffre est encourageant. « Il s’agit du chiffre le plus bas au cours du siècle et une baisse de 70% sur la moyenne des dix dernières années ».

Une baisse des pertes totales

L’assureur explique cette tendance de baisse par l’amélioration du design des navires, de la technologie à bord, de la mise en place de nouvelles règlementations et de gestion anticipée des incidents. La majorité des sinistres intervenue en 2019 se sont produits dans les eaux du sud-est asiatique. Avec 12 incidents, soit 30% des pertes totales, les eaux du sud de la Chine, de la péninsule indochinoise, des Philippines et d’Indonésie recensent le plus grand nombre de pertes.

L’effet Covid 19

En 2020, la pandémie de la Covid 19 a eu des effets sur le monde maritime, même si celui-ci a alimenté le monde en biens de première nécessité. La plus grande difficulté s’est manifestée avec les relèves d’équipages. L’interdiction de déplacement entre les pays et l’impossibilité de procéder à ces relèves devient un souci majeur pour les armements et les marins (voir l’article de Caroline Britz de Mer et Marine).

Incendies des porte-conteneurs

Parmi les sujets préoccupants de l’année, AGCS relève les incendies survenus à bord des navires. « La fréquence et la sévérité des incendies à bord des navires ont atteint un pic cette année. Il y a eu 40 feux liés aux marchandises en 2019, soit un tous les dix jours ». Un chiffre qui ne représente, selon l’assureur que la partie émergée de l’iceberg. Les feux de moindre importance ne sont généralement pas déclarés.

Des navires plus grands avec 25% d’équipage en moins

Les incendies à bord des navires ne datent pas d’aujourd’hui. En 2020, jusqu’à présent, note le rapport de l’AGCS, un navire de Cosco a été la proie des flammes et a pu contenir le feux. En 2019, les Yantian Express, APL Vancouver et Maersk Honam ont subi des incendies graves. Avec l’augmentation de la capacité des navires (le HMM Algesiras affiche une capacité de plus de 24 000 EVP) et la réduction de 25% du nombre de marins à bord, le nombre de lances d’incendie n’est passé que de une à deux.

Revoir la règlementation

Pour mettre un terme à cette tendance de hausse, AGCS appelle à s’appuyer de nouvelles règlementations. « Les règlementations n’ont pas pris en compte l’accroissement de capacité des navires ni le défi de feux plus importants et plus dangereux. De nouvelles normes sont urgentes pour assurer que les porte-conteneurs soient sûrs», indique Rahul Khamna, directeur des risques d’AGCS.

Utiliser les nouvelles technologies pour lutter contre les incendies

Pour faire face à la recrudescence des incendies à bord des navires, Iumi, associations des fédérations d’assureurs, avec le Bimco, AGCS et le Cesa (représentant les chantiers navals) ont rédigé un livre blanc sur le sujet. Ils proposent un système de détection anticipée des feux. « Si les propositions sont adoptées par l’OMI, cela améliorerai significativement la protection contre l’incendie. Une protection qui servirait le navire, les marchandises et les équipages dans le futur. Dans l’hypothèse où ces propositions ne seraient pas prises en compte, le risque de voir le nombre d’incendies s’accroître avec une plus grande dangerosité des porte-conteneurs », souligne Rahul Kamna. Parmi les technologies évoquées dans le livre blanc pour réduire le risque d’incendie, les auteurs préconisent un contrôle de température des marchandises, des rideaux d’eau et des systèmes par injection de CO2.

Les mauvaises déclarations des marchandises

La principale cause des incendies survenus trouvent leur origine dans une mauvaise déclaration des marchandises dans les conteneurs. Ainsi, note le rapport, le feu survenu sur le Cosco Pacific vient de l’absence de déclaration de batteries au lithium dans un conteneur. Une étude menée par le National Cargo Bureau met en lumière que 55% des incendies surviennent en raison de mauvaises déclarations.

Un contrôle des armateurs

Pour y faire face, les armateurs ont décidé de prendre le dossier à bras le corps. Ils vont contrôler plus âprement les conteneurs et pénalisés les mauvaises et fausses déclarations. « Il s’agit d’un problème qui deviendra encore plus grave dans les prochaines années si nous n’agissons pas », préviens Andrew Kinsey, consultant en risques de AGCS.

La stabilité des rouliers: inspections trop rapides

Autre sujet préoccupant pour l’assureur, les incidents des rouliers survenus en 2019. Au cours de cette année, deux navires, le Grande America et le Golden Ray ont, coulé pour le premier, et couché sur son travers pour le second. Deux sinistres qui interrogent sur la stabilité de ce type de navires. Pour Rahul Kamna, le temps d’escale de ces navires est court. « Des analyses des accidents de ces navires révèlent une inspection trop rapide ou mal faite avant le départ des navires. Dans de nombreux cas, les marchandises n’étaient pas entièrement sécurisées », indique le consultant.

Des sinistres longs

Pour les navires rouliers et les ferries, il appartient aux chargeurs d’indiquer le poids et la masse des marchandises chargées mais aussi au capitaine. Celui-ci doit s’assurer de la bonne stabilité de son navire. « Pour des raisons commerciales, le navire a quitté le port et mis en danger l’équipage et le navire en raison d’une mauvaise analyse de la stabilité ». Ces sinistres se règlent sur des années. Les conséquences environnementales peuvent aussi s’avérer catastrophiques. Le cas s’est produit au large de la Nouvelle-Calédonie lors du naufrage sur la barrière de corail du Kea Trader. Des débris du navire et une pollution ont endommagé les coraux.