Politique

Feport : la compétitivité dans un contexte de crise permanente

Dans un contexte de crise comme la connaît l’Europe depuis trois ans, la compétitivité reste au cœur des préoccupations des entreprises, notamment dans la manutention portuaire.

L’assemblée générale de la Feport s’est tenue à Bruxelles sous le thème général de la compétitivité dans un contexte de crise permanente. En effet, après la crise sanitaire du Covid, les perturbations logistiques, les confinements en Chine et le conflit entre l’Ukraine et la Russie, le secteur du maritime a subi directement les conséquences de ces phénomènes. Pour le responsable de la DG recherche et innovation de la Commission européenne, Moises Blanco Ríos, « d’autres crises sont à venir. Il est important d’être résilient ».

Les personnes avant le capital

Pour faire front à ces crises successives, le président de la Feport, Gunther Bonz a appelé à une plus grande coopération entre les acteurs privés et les institutions. Pour ce faire, il est besoin de s’adapter mais aussi de savoir innover. « Il faut repenser le transport maritime. Il est nécessaire que les gens prennent le dessus sur l’argent », a commencé par expliquer Lucy Gillian, responsable maritime de Seas at Risk. Elle a appelé à un réveil écologique de la part des responsables économiques et institutionnels.

Des profits dans une période d’inefficacité

Les crises passées, et celles à venir, ont désorganisées le transport maritime. Néanmoins, « dans ces moments de crise, le transport maritime reste la seule industrie qui réalise des bénéfices records en affichant la pire efficacité », a souligné Boris Wenzel, co-président de Yilport. Et pendant ce temps, continue le responsable de Yilport, les opérateurs portuaires ont continué à travailler « sans réaliser le même niveau de profit que les compagnies maritimes ».

Les dés sont pipés

Le secteur de la logistique portuaire et maritime doit faire face à une intégration horizontale de la part des armateurs. Ils sont devenus des opérateurs logistiques, des manutentionnaires et des transporteurs maritimes et aériens, a expliqué Boris Wenzel. Alors, quand les compagnies maritimes profitent d’avantages fiscaux comme la taxe au tonnage tout en étant présent à tous les niveaux de la chaîne logistique, les dés sont pipés pour le co-président de Yilport.

Revoir le règlement des Consortia

Cette intégration tous azimuts des armateurs doit être freiné avec la révision du règlement d’exemption des Consortia. « La Commission européenne doit avoir une approche basée sur un modèle mutuel pour s’assurer que le système appliqué aux Consortia a encore un sens, notamment en ce que ce système donne un contrôle et un pouvoir sur les données aux grandes compagnies maritimes. Il faut créer un cadre juridique », a demandé Boris Wenzel. Szymon Oscislowski, directeur adjoint de l’unité transport maritime à la DG Move, a rappelé que les différentes directions générales de la Commission ont décidé d’avoir une approche transversale de certains dossiers, dont celui des Consortia.

Une approche horizontale des projets législatifs

En réalisant des acquisitions à tous les échelons de la chaîne logistique, les armateurs créent de nouvelles conditions de marché. « Nous constatons de nouveaux paradigmes dans le maritime », a indiqué Théo Notteboom, co-directeur de PortEconomics. Les acteurs d’hier seront remplacés par de nouveaux joueurs sur le marché. Dans cette période compliquée de changements permanents et de crises successives, Mario Compomenosi, eurodéputé, a rappelé qu’il faut s’attacher à prendre le pouls des opérateurs et avoir une approche horizontale des législations. Il a aussi rappelé que « tout ne peut pas être réglé par des lois. Nous ne devons pas être des esclaves des lois que nous créons. »

L’impact du Fit for 55 sur les ports

L’Assemblée générale de la Feport est aussi revenue sur les questions liées au climat. Le paquet Fit for 55 de la Commission européenne, qui prévoit une réduction de 55% des réductions des gaz à effet de serre, aura un impact important pour tous les opérateurs logistiques. Les ports ont un rôle à jouer pour atteindre cet objectif, a continué le responsable de la DG Recherche et Innovation en devenant des fournisseurs pour des carburants alternatifs et donc « devenir des hubs verts ».

Des fuels alternatifs et des infrastructures

Pour l’eurodéputée Vera Tax, le paquet Fit for 55 a construit les pièces d’un puzzle qu’il faut assembler. Elle a appelé à une volonté plus ferme de la part des gouvernements pour atteindre les objectifs fixés. Lors des discussions sur le système des ETS, elle a rappelé la création d’un fonds de 20 M€ pour aider les innovations. Des développements qui doivent se réaliser sur les fuels alternatifs. Aujourd’hui le méthanol apparaît comme une solution. « Pour démontrer la capacité du transport à décarboner ses activités, il est nécessaire de disposer d’infrastructures », a souligné Jan-Christoph Napierski, responsable de l’unité zéro carbone de Mærsk. Des investissements qui ne pourront se réaliser sans la participation de l’Union européenne a continué le responsable du groupe Mærsk.

Le transfert modal face à la décarbonation

Et pour continuer dans cette veine, Paul Goris, membre du bureau de l’EBU (organisation européenne des propriétaires de barges), s’interroge sur les options ouvertes pour le transport fluvial. « Depuis les navires au pilotines, l’évolution vers une motorisation dual-fuel est prévue. L’électrique est envisageable pour des opérations courtes pour les ferries. Quels investissements les propriétaires de barges doivent ils envisager pour l’avenir ? » Une question qui prend toute sa mesure quand l’eurodéputée Vera Tax plaide pour un transfert modal plus important vers le fluvial et le ferroviaire.