Le cuir : une filière exportatrice touchée par les perturbations logistiques
Le Conseil national du cuir a présenté son bilan économique pour les huit premiers mois de l’année. Les premiers chiffres montrent que la filière du cuir a su rattraper les baisses liées à la crise sanitaire. Les perturbations logistiques ont impacté la filière.
La filière du cuir français reste discrète. Pourtant, elle intervient comme exportatrice et importatrice importante pour la balance commerciale française. Alors, les crises impactent sont observées avec attention. Et, lors de la pandémie, les sociétés du secteur ont été lourdement impactées avec des baisses importantes de leurs flux import et export. C’est ce qui ressort du bilan économique présenté par le Conseil national du cuir.
Des exportations françaises en recul
En effet, en 2020, les importations de cuir en France ont perdu 15% à 9,65 Md€. De leur côté, les exportations françaises, freinées par le ralentissement de la demande mondiale, avaient chuté de 9% à 11,9 Md€. Tous les secteurs exportant ont été touchés. Ainsi, les cuirs et peaux bruts ont affiché un recul de 27%, la tannerie a perdu 38%, la chaussure recule de 12%, et le secteur de la maroquinerie et de la ganterie enregistrent une baisse de 7%. Une année compliquée pour le secteur qui a rebondi dès l’année suivante. En 2021, les exportations françaises ont gagné 23% à 14,7 Md€. Tous les secteurs de cette filière sont en progression.
L’attrait du luxe français
Ce retour à une dynamique dans les exportations s’explique en partie par l’attrait du luxe français. La demande reste toujours élevée, indique le rapport du Conseil national du cuir, notamment en Asie, avec une progression de 36%, en Europe avec une hausse de 9% et en Amérique avec une augmentation de 37%. Alors, « globalement, la baisse de 2020 a été rattrapée et la phase critique de la Covid surmontée par la plupart des secteurs. Plus en détails, les exportations de cuirs et peaux bruts, de chaussures, d’articles de maroquinerie ont connu un essor de 1%, 2% et 19%, entre 2019 et 2021 », continue le rapport économique annuel. Les baisses se concentrent sur les exportations de la tannerie et de la ganterie.
Hausse des importations et exportations en 2022
Ce retour de dynamique en 2021 s’est confirmé sur les huit premiers mois de 2022. « Sur la période de janvier à août, les chiffres à l’export de la filière sont tous positifs. Les exportations globales ont progressé de 21%. Une tendance qui se décline aussi sur les importations », a indiqué Philipe Gilbert, directeur de l’observatoire économique du Conseil national du Cuir. Des chiffres qui placent la France au troisième rang des exportateurs mondiaux de produits en cuir.
La Chine, premier client français
Ces exportations se réalisent en grande partie vers la Chine. L’Empire du milieu intervient pour 43% des exportations françaises. En 2021, les exportations françaises vers la Chine ont augmenté de 162% à 2,5 Md€. La filière cuir représente 17% des exportations vers ce pays. Ainsi, cette hausse du volume des exportations de produits de cuir réduit le déficit commercial entre la Chine et la France. En effet, la France importe encore pour 2,7 Md€ de produits de cuir chinois mais avec une nuance importante, indique le rapport de l’observatoire économique : les importations chinoises de produits en cuir depuis la Chine sont généralement des produits à bas prix quand la France exporte des articles à prix élevés.
Des exportations de produits bruts
Outre les produits finis, la France exporte des cuirs et des peaux bruts vers la Chine. Elle pèse 3% des importations de l’Empire du milieu en neuvième place derrière les États-Unis, l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande. Ces exportations de cuirs et peaux bruts ont connu en 2020 et 2021 une progression de 74%. Sur les huit premiers mois de l’année, les opérateurs chinois ont un peu boudé les origines françaises avec une baisse de 14% des importations de cuirs et peaux bruts. Les États-Unis constituent l’autre pays de destination des produits cuirs français. Les importations françaises d’articles ont augmenté de 40% en 2021, plaçant ainsi les États-Unis au second rang des pays d’exportation de la filière.
L’effet de la hausse des taux de fret
En se positionnant sur l’exportation pour les produits haut de gamme vers d’autres continents, la filière du cuir a subi de plein fouet la hausse des taux de fret. « Cela a constitué un frein au développement de nos exportations », nous a confié Philippe Gilbert. Un frein qui a ralenti la progression sans pour autant inverser la tendance. Pour le directeur de l’observatoire économique du conseil national du cuir, l’avenir reste plus serein. « La baisse des taux de fret engagée depuis l’été va faire disparaître certains freins mais nous allons devoir composer avec la hausse du coût de l’énergie. Toute la question sera de voir si les entreprises répercutent ces augmentations. » Une position confirmée par le président de la Fédération française des cuirs et peaux, Christophe Dehard : « Un conteneur qui coûtait environ 2 500 à 3 000 € avant la pandémie est monté jusqu’à 6 000 € voire 7 000 € en 2021. Il a baissé pour se situer aujourd’hui aux alentours de 4 000 € en moyenne ».
Les perturbations logistiques demeurent
Outre les taux de fret, ce sont toutes les perturbations logistiques qui ont désorganisées la filière. « Sur le plan logistique, en plus de cette augmentation dramatique des tarifs maritimes, le niveau de service de ces compagnies maritimes ne cesse de se dégrader et nos adhérents ont manqué et continuent de manquer de visibilité sur les disponibilités de chargement. S’ajoute à cela une hausse mensuelle sur le transport terrestre en France, liée à celle des coûts de l’énergie. Or, étant négociants en matières premières, il n’est pas vraiment possible pour eux d’augmenter leurs propres prix. Ces hausses multiples impactent par conséquent leurs marges », continue Lénaïg Manéat, déléguée générale de la Fédération française des cuirs et peaux.