Politique

Afrique : le Nigéria relance l’idée de créer une compagnie maritime nationale

Le Nigéria relance l’idée de créer des compagnies maritimes pour réaliser une partie de leur trafic et se défaire de la dépendance aux multinationales.

Disposer d’une compagnie maritime nationale, publique ou privée, reste un objectif que les pays africains n’abandonnent pas. Après le départ des colonisateurs français et britanniques dans les années 60, les pays nouvellement indépendants ont créé des sociétés de transport maritime, à l’image de la Sivomar en Côte d’Ivoire ou encore de la Cobenam au Bénin.

Des déboires financiers

Or, ces compagnies maritimes ont connu, les unes après les autres des déboires financiers qui ont précipité leur défaillance. Après quelques années d’activité, ces sociétés ont disparu du paysage maritime international. Elles ont été reprises ou ont simplement disparues.

D’autres projets ont échoué

Néanmoins, le développement du transport en Afrique amène les gouvernements à vouloir recréer des sociétés maritimes. Le sujet est à l’étude depuis la dernière décennie. Des projets ont été dévoilés au Cameroun, au Sénégal et en Guinée, sans avoir eu une concrétisation. Le Nigéria reprend le dossier.

Une aide de la NNPC

Ecofin indique, dans un article du 12 septembre, la remise d’un rapport sur les mécanismes pour la mise en œuvre de ce projet. Le document a été transmis au ministre des Transports, Mu’azu Jaji Sambo. Ce dernier propose que la Nigerian National Petroleum Corporation, société nationale pétrolière, apporte un soutien à la création de cette société. L’objectif du ministre des Transports vise à réintégrer dans le pays les coûts liés aux importations et exportations nationales.

Réinternaliser les coûts du transport et les emplois

Ces coûts sont importants. Selon Hassan Bello, l’ancien secrétaire du Conseil des chargeurs du Nigéria (Nigerian Shippers Council), entre 80% et 90% des flux sont réalisés par voie maritime, indique un entretien avec le journal nigérian Vanguard. Pour l’ancien secrétaire du NSC, les chargeurs ont payé environ 45 Md$ de 2015 à 2019 aux transporteurs maritimes pour assurer les importations et exportations nationales. Alors, pour le président du Comité pour l’implantation d’une flotte nigériane, Emmanuel Jime, la création d’une compagnie maritime nationale permettra de rapatrier des revenus et des emplois dans le pays.

Un arrière-goût du code de conduite de 1974

Une ambition politique qui nécessitera avant tout de réaliser un tour de table financier. Affréter ou acheter des navires, dans le contexte actuel, coûte cher. De plus, les compagnies maritimes africaines ont connu leur âge d’or quand existait la répartition de cale décidé dans le cadre d’un accord de la Cnuced, sous le nom de Code de conduite des conférences maritimes. Il prévoyait que les armateurs européens et les armateurs africains devaient assurer chacun 40% du volume entre l’Europe et le pays d’Afrique. Les 20% restants étant dédiés à des armements tiers. Ce système garantissait un volume minimum à transporter pour les opérateurs de chaque continent. Si en Europe de telles pratiques sont interdites depuis 1992, les gouvernements d’Afrique peuvent décider de l’appliquer pour la desserte de leurs ports. Alors, les armateurs accepteront-ils de voir de nouvelles règles de répartition de cale entre africains, européens et, maintenant, armateurs asiatiques ? La politique a parfois ses raisons que la raison ignore.