Ferroviaire : le port de Barcelone vient grignoter le marché français
Une liaison ferroviaire entre le port de Barcelone, Toulouse et Lyon s’ouvre sous l’impulsion d’APM Railways Spain, Synergie et Naviland Cargo. Une nouvelle tentative pour le port catalan de grignoter des parts de marché des GPM de Marseille et de Bordeaux.
Et de deux. Après avoir initié une ligne ferroviaire sur le sud-ouest de la France, le port de Barcelone s’attaque au grand sud français. En effet, il annonce l’ouverture d’une liaison ferroviaire à raison de trois fois par semaine sur Toulouse et une fois sur Lyon.
APM Terminals Railways et Naviland Cargo
Ce service ferroviaire est commercialisé par APM Terminals Railways, Synergy et Naviland Cargo. APM Terminals Railways se présente comme une filiale de la filiale manutention du groupe Mærsk. Elle opère uniquement en Espagne. Elle a démarré ses activités au départ du terminal APMT d’Algésiras. Au fur et à mesure des années, cette filiale s’est développée. Elle est présente à Valence et Barcelone. À ses côtés, intervient Naviland Cargo. Une marque de Rail Logistics Europe dont l’activité est de développer le transport de fret ferroviaire pour le groupe SNCF.
Synergy double son offre en France
Enfin, Synergy vient clore ce triptyque. Cette société apparaît comme une filiale de Hutchison Ports. Or, le manutentionnaire de Hong Kong est aussi le gestionnaire du terminal à conteneurs du port de Barcelone. Synergy se développe principalement sur la péninsule ibérique. Elle assure une liaison vers le port de Bayonne depuis Barcelone par l’intermédiaire de son terminal ferroviaire de Pampelune. L’opérateur réalise environ 40 000 EVP de trafic par an.
Sans transbordement ni changement de locomotive
Alors, fort de ces trois opérateurs, Barcelone profite de sa connexion ferroviaire au réseau européen pour se développer au-delà des Pyrénées. Cette liaison offre l’avantage d’être directe. « Il s’agit du premier service ferroviaire entre les États espagnol et français qui circulera sans transbordement de marchandises ni changement de locomotive au niveau du tunnel du Perthus », indique le port de Barcelone. Cette connexion est possible en raison de l’extension du port de Barcelone au gabarit européen, d’une part. D’autre part, elle se réalise par des locomotives Stadler Euro6000 de Captrain. Elles sont les seules à pouvoir circuler sur le réseau français et espagnol.
Le premier train de 750 m en Espagne
Par ailleurs, ce service se présente comme « historique par sa capacité. En effet, il est le premier convoi régulier de 750 m sur le réseau espagnol, soit la longueur maximale autorisée en Europe », précise le port de Barcelone. Ainsi, le convoi transporte 108 EVP par trajet contre 68 EVP auparavant.
Barcelone entre dans l’Europe ferroviaire
L’ouverture de cette liaison fait de Barcelone « le seul port d’Espagne connecté par voie ferroviaire à l’Europe à l’écartement européen », indique Lluís Salvadó, président du port de Barcelone. Et pour donner un aspect plus opérationnel, Guillermo Belcastro, pdg de Hutchison Ports Best, rappelle que ce service est « historique pour la logistique du sud de l’Europe. Ces services changeront la donne et généreront de la valeur en termes d’efficacité opérationnelle et de durabilité économique et environnementale. »
Barcelone dans la chasse gardée de Marseille et Bordeaux
L’enthousiasme des uns ne doit pas cacher les craintes possibles des autres. Déjà, l’ouverture de la liaison entre Barcelone et Bayonne en 2022 a mis la puce à l’oreille des opérateurs logistiques du marché français. Plus en avant dans le temps, le port de Barcelone a ouvert un bureau à Toulouse pour attirer vers son port les industriels de la place. Alors, l’ouverture de cette ligne ferroviaire apparaît alors comme un coup de poignard dans les ambitions des ports français. Les marchés de Toulouse et de Lyon constituent pour le GPM de Marseille et, dans une moindre mesure, celui de Bordeaux, une « chasse gardée ».
Une alternative décarbonée pour le marché français
Alors, voir Barcelone chasser sur les terres de ports français peut attiser des jalousies. Le jeu de la concurrence va se faire à plein. Et en s’attaquant à la place lyonnaise, et notamment le pôle chimique, c’est aussi à Haropa que Barcelone vient grignoter des parts de marché. En effet, les ports de l’axe Seine « draguent » la chimie lyonnaise pour alimenter son trafic conteneurisé. Pour les chargeurs toulousains et lyonnais, l’ouverture de cette ligne n’est pas synonyme de changement de logistique. Elle offre tout simplement une nouvelle alternative plus facile. Il convient de rappeler que le port de Barcelone s’offre comme alternative mais avec des logistiques routières. Désormais, outre l’offre d’une nouvelle porte maritime, Barcelone propose une logistique « décarbonée ». Par conséquent, pour conserver leur part de marché, les ports français devront se montrer compétitifs. Le temps d’abattre ses atouts est venu.