Juridique et social

Grève des dockers de la côte est des États-Unis : fin de match ou mi-temps ?

Le 4 octobre, le syndicat de dockers a décidé de mettre fin au mouvement social qui touche les ports de la côte est des États-Unis. Ils ont jusqu’au 15 janvier pour négocier un accord cadre final.

Le mouvement social des dockers des ports de la côte est des États-Unis, initié par le syndicat International Longshoremen Association, a pris fin après trois jours d’action. Les dockers ont accepté les propositions de l’US Maritime Alliance (USMX).

Une hausse de salaire de 61,5%

Dans un communiqué, le syndicat des dockers indique avoir trouvé un accord pour une augmentation de salaire de 61,5% sur les six prochaines années. Néanmoins, cette hausse ne s’applique pas immédiatement. « Nous devrions signer une clause de non-grève jusqu’à la fin des négociations sur les autres termes de nos négociations pour bénéficier de cette augmentation instantanément. » En fait, cet accord est une extension du contrat entre dockers et manutentionnaires jusqu’au 15 janvier.

Conserver une main d’œuvre docker sur les quais

« Il reste des sujets à négocier », précisent le syndicat des dockers. « En étendant le contrat, nous conservons un pouvoir de négociation et de combat pour les autres sujets », continue le communiqué du syndicat. Et pour expliquer sa position, le président de l’ILA, Harold J. Daggett, continue. Il souhaite rester vigilant sur l’emploi d’une main d’œuvre docker dans les opérations portuaires. « Nous voulons préserver nos emplois pour qu’ils ne soient pas exercés par des salariés non-dockers ni des machines. »

Le refus de l’automatisation

Concernant l’automatisation des terminaux, le président du syndicat de dockers veut éviter la mise en service de systèmes automatisés dans les terminaux. « Il ne s’agit pas uniquement de protéger nos emplois mais de s’assurer que les ouvriers portuaires continueront de jouer un rôle essentiel dans les ports. »

La menace de grève plane

Finalement, les dockers reprennent le travail mais les négociations demeurent entre les partenaires sociaux. Ils disposent d’un délai jusqu’au 15 janvier pour parvenir à un nouveau contrat. En fait, il s’agit d’une mi-temps dans ce mouvement social. Dans l’hypothèse où les négociations viendraient à se durcir de nouveaux, l’ILA se conserve une marge de manœuvre pour déclencher de nouveaux mouvements sociaux.

Des perturbations dans les chaînes logistiques

La crainte de perturbations de grande ampleur a effrayé le monde du shipping. Le 3 octobre au matin, soit, deux jours après le début du mouvement, la file d’attente devant les ports de la côte Est s’allongeait. Déjà, les autorités américaines décomptent 43 navires en attente. Outre l’aspect financier sur l’économie nord-américaine (un jour de grève représente entre 4 et 5 Md$ de pertes pour l’économie nationale), ce mouvement a généré des perturbations importantes pour les chaînes d’approvisionnement.

Des détournements de trafic

Pendant cette pause dans les mouvements sociaux, que certains analystes qualifient d’œil du cyclone, l’heure est au bilan. La première leçon que tirent les opérateurs tient à l’anticipation. « Des armements ont anticipé en constituant des stocks dès l’été pour éviter des ruptures », explique Stéphane Defives, directeur maritime de Kuehne & Nagel. D’autres ont suivi les compagnies maritimes qui ont détourné une partie de leurs liaisons vers le port d’Altamira, au Mexique. Une position choisie par le groupe CMA CGM. Cette anticipation n’a pas pesé sur les taux de fret. Malgré la hausse du volume, ils sont restés stables, ajoute Stéphane Defives.

Le retour à la normale en trois semaines

Avec la signature de cet accord, les opérations peuvent reprendre. Selon le directeur maritime de Kuehne & Nagel, chaque jour de grève a des répercussions pendant une semaine. Il faudra donc trois semaines à l’économie américaine pour gommer les effets de ces trois jours de mouvement social. À l’annonce de cet accord, outre les navires en attente  devant les ports américains, d’autres patientent dans les ports. Les opérations de manutention sont suspendues depuis le 1er octobre. Outre les perturbations sur les services, c’est aussi la pénurie d’équipements qui peut survenir avec les retards dans les déchargements des navires et donc un manque de boîtes.

Après les élections du 6 novembre

Ces trois jours montrent que l’économie portuaire américaine peut facilement s’enrayer avec quelques heures de grève. L’anticipation a permis d’éviter le pire, expliquent les opérateurs mais une épée de Damoclès demeure. Dans l’hypothèse où les négociations n’avancent pas, il paraît certain que les ports de la côte Est des États-Unis peuvent rapidement se fermer. Enfin, en signant cet accord, le syndicat des dockers a voulu éviter de devenir un élément perturbateur dans une période pré-électorale. Il faudra regarder avec attention l’avancée des négociations après les élections présidentielles américaines du 6 novembre. La tension politique sera retombée.