Méga-camions : le débat bat son plein
Après l’adoption par le Parlement européen le 12 mars du texte sur les méga-camions », les différentes positions s’expriment. Du côté du gouvernement, le non l’emporte quand pour certains professionnels le « oui mais » semble l’alternative.
Le 12 mars, le vote du Parlement européen sur la directive européenne des poids et dimensions a penché en faveur de l’adoption. Le texte prévoit que des ensembles routiers de 60 t et 25 m de long sont autorisés à circuler entre deux États de l’Union européenne. Or, ce texte ne laisse personne indifférent.
Méga-camions et ferroutage
Ainsi, l’encre de l’adoption à peine sèche, le ministre délégué aux Transport, Patrice Vergriete a exposé sa position. En effet, Olivier Henno, sénateur du Nord, groupe Union centriste, s’est adressé au ministre lors des questions au gouvernement. Outre sa demande sur la doctrine du gouvernement sur ses méga-camions, le sénateur interroge aussi le ministre sur sa stratégie en matière de ferroutage.
Pas d’arguments convaincants
Patrice Vergriete, ministre délégué en charge des Transports, a répondu au sénateur en rappelant les arguments des défenseurs de ces ensembles routiers. Ainsi, ces partisans soulignent que ces méga-camions sont « un progrès environnemental puisqu’il s’agirait de transporter plus dans moins de camions dans le contexte de pénurie des chauffeurs ». Alors, dans ces conditions, le ministre a indiqué « qu’aucun des arguments avancés ne me convainc ».
Ruiner les efforts de la stratégie ferroviaire et fluviale
Et pour apporter des réponses à toutes les questions du sénateur Henno, Patrice Vergriete a rappelé que la stratégie du gouvernement vise à doubler la part modale du fret ferroviaire. Ainsi, accepter « ces méga-camions ruinerait tous les efforts que le gouvernement fait en faveur du fret ferroviaire ». De plus, continue le ministre, « dire oui à ces méga-camions signifierait renoncer la stratégie nationale fluviale ».
TLF rétablit des vérités
Cependant, tous les opérateurs ne suivent pas le point de vue du ministre. Ainsi, le président de l’Union TLF, Éric Hémard, rappelle que ces camions peuvent apporter des réponses aux défis actuels de la logistique. « La réalité (de ces méga-camions, ndlr) est tout autre ! Les arguments utilisés par les opposants (…) reposent sur un écologisme de pacotille. » Il souhaite ainsi rétablir quelques vérités. Alors, selon le président de TLF, avoir « des camions plus grands, c’est d’abord avoir moins de camions sur les routes. C’est aussi l’assurance de baisser très significativement l’empreinte carbone par produit transporté. Accessoirement, c’est donner de la capacité en volume et en poids pour porter des batteries ou des moteurs hydrogène dont chacun sait dès aujourd’hui la place qu’elles occupent par exemple dans une voiture particulière électrique ou hybride. »
Pas d’atteinte au report modal
De plus face aux arguments avancés par certains, dont le ministre délégué aux Transports, les méga-camions ne portent pas atteinte au report modal. « On leur fera remarquer que le train ou le fleuve ne remplacera pas le camion dans beaucoup de nos territoires. Par ailleurs, ces modes de transport ont déjà fort à faire pour garder leurs trafics là où leur pertinence est avérée. »
Pour favoriser la massification
Encore, le texte prévoit que les gouvernements peuvent limiter la circulation de ces véhicules à certains corridors, « où il n’y a ni fleuve, ni rail et de privilégier certains grands axes de manière que l’impact sur la chaussée soit strictement circonscrit en privilégiant les routes les plus importantes. » Et Éric Hémar rappelle que ces méga-camions favorisent « la massification » et son impact positif sur l’environnement. Face aux critiques, le président de l’Union TLF demande « un débat public pragmatique et sans dogmatisme. »
Une nouvelle étape pour ECG
En Europe, l’organisation européenne des logisticiens automobiles (ECG) se montre aussi favorable à ce texte. « Il s’agit d’une nouvelle étape pour la logistique des véhicules qui opère actuellement dans un cadre règlementaire européen morcelé », souligne les responsables d’ECG. Pour cette organisation, il convient de disposer de dimensions harmonisées au niveau européen à 20,75 m. « Ces dimensions sont en vigueur dans la majorité des États membres », continue ECG. Le vote du Parlement européen apporte une sécurité juridique et une optimisation de la logistique par une amélioration de l’efficacité.
Une approche pragmatique
Alors, pour les opérateurs logistiques automobiles, « le Parlement européen adopte une approche pragmatique : les camions qui transportent des véhicules en Europe n’opèrent pas dans un marché unique. Cela doit changer ». Et ECG de rappeler que l’utilisation de navires, de trains et de barges est optimisée. « Pour les livraisons, qui peuvent aller sur des distances de quelques kilomètres à plusieurs centaines de kilomètres, il ne nous est pas possible d’utiliser d’autre modes que la route. »