Rapport du Mica Center : mer Rouge et Somalie reviennent au cœur des préoccupations
La fin de l’année 2023 a été marquée par une vive recrudescence d’attaques des rebelles houthis, autour du détroit de Bab el-Mandeb. Concomitamment, des navires ont été pris d’assaut par des pirates au large de la Somalie. Nous reprenons, ci-dessous, l’article de Gaël cogné de Mer et Marine.
« Le changement le plus profond pour 2023 est le débordement en mer Rouge et dans le détroit de Bab el-Mandeb du conflit entre Israël et le Hamas », indique le rapport annuel du Mica (Maritime international cooperation and awareness) Center de Brest. Depuis le 19 novembre, au moins 25 navires marchands ont été attaqués dans cette zone par les rebelles yéménites Houthis. Et, « à cela s’ajoute la résurgence d’une menace piraterie au large de la Somalie ». Les préoccupations se détournent donc du golfe de Guinée. Ainsi, cette zone voit la piraterie diminuer sans pour autant disparaître. Elle tend à se déplacer vers le détroit de Bab el-Mandeb et la Somalie.
De nouvelles menaces
« En mer Rouge, le conflit israélo-palestinien a engendré une recrudescence d’événements en fin d’année. L’interception de missiles balistiques et de drones en provenance des côtes yéménites, le déroutement du M/V Galaxy Leader, ou encore les attaques de drones et de missiles à l’encontre de nombreux bâtiments de commerce démontrent une volonté forte des houthis d’être un acteur grandissant de ce conflit », analyse l’état-major de la Marine nationale pour la zone maritime de l’océan Indien (Alindien). « La menace que font peser ces actions aux intérêts politiques identifiés sur le commerce maritime incite à la vigilance ». Les incidents se sont multipliés durant le dernier trimestre. Cette évolution se traduit par l’apparition de 34 cas de « spillover » (événement au cours duquel un conflit à terre a un impact sur des navires marchands ou les ports) au large du Yémen. Au total, 45 incidents ont été recensés, contre seulement 10 en 2022.
Résurgence de la piraterie au large de la Somalie
Le Mica Center relève également une résurgence « possible » de la menace de pirates au large de la Somalie : « Cette tendance alimentée par divers incidents en fin d’année peut être conjoncturelle mais devra être surveillée dans les prochains mois ». En Somalie, où la piraterie avait quasiment disparu depuis plusieurs années, « le nombre d’incidents est resté à un niveau faible jusqu’au 22 novembre 2023, se limitant aux approches suspectes de deux navires de commerce à la même position et à quelques heures d’intervalle. Le 26 novembre, l’abordage du M/V Central Park entre Djibouti et Aden a pu laisser penser à un incident de type piraterie perpétré par un groupe de pirates somaliens dont 5 ont été capturés par un navire américain.
Saisies de navires de pêche
L’enchainement des événements autour de cet incident et la conjonction d’incidents en lien avec la prise de position des houthis, rend contestable la classification de cet incident en tant que cas de piraterie. Depuis cet incident cependant, une série de saisies de navires de pêche (4 à 5 cas recensés depuis) au large du Puntland fait craindre la résurgence du phénomène de piraterie. Deux de ces cas ont été assez clairement reliés à la situation politique électorale agitée, les autres peuvent faire craindre l’emploi par les pirates de ces navires comme bateau mère de leurs attaques comme cela a pu être le cas pour l’attaque au large, le 14 décembre, d’un navire dont 18 membres d’équipages sont toujours aux mains des pirates. »
Piraterie et brigandage
De manière générale, la piraterie au niveau mondial reste stable et au plus bas depuis le recueil des événements, en 2008, avec 295 événements de piraterie et de brigandage rapportés en 2023, contre 300 en 2022 et un maximum de 668 atteint en 2011. Seulement cinq événements de piraterie (actes de violence en haute mer à des fins privées) ont été relevés dans le golfe de Guinée, alors qu’ils étaient 7 en 2022 et 62 en 2020.
Augmentation du nombre de kidnappés
Cette stabilité apparente masque cependant « une légère augmentation du nombre de navires piratés (de 5 à 7, ndlr) confirmant que cette menace n’est pas éradiquée ». Le nombre de kidnappés a aussi augmenté de 2 (lors d’un événement) à 18 (lors de 4 événements). Quant au brigandage maritime (actes commis dans les eaux territoriales), il concerne d’abord la zone « Amériques et arc des Caraïbes » (105 événements, contre 115 en 2022) et l’Asie du Sud-Est et Pacifique (103, contre 86 en 2022).