Corridors et logistique

Taux de fret : « il n’y a plus de saisons »

Les taux de fret enregistrent des hausses importantes ces dernières semaines. La peak season attendue pour l’été a commencé en avance cette année. Certains annoncent la fin des hausses quand d’autres se font oiseau de mauvais augure pour l’automne.

« Il n’y a plus de saison ! » La peak season de l’été dans la conteneurisation prend de l’avance. Selon l’indice composite du World Container Index du consultant britannique Drewry, la hausse des taux de fret s’estime à 4% pour un conteneur de 40’ à 4226$. En un an, ce taux a progressé de 151%. Bien plus, continue le consultant, la hausse de ce taux a presque doublé par rapport à 2019. En effet, à cette époque il se situait à 1420$.

Des PSS à 1000$/EQP

D’ailleurs, des compagnies maritimes annoncent des Peak Season Surcharge pour la mi-juin, quand elles surviennent généralement dans le courant de l’été ou au début de l’automne, indique Ovrseas. Des augmentations qui s’élèvent à 1000 $/40’ entre l’Asie et la Méditerranée pour CMA CGM et sur les routes entre l’Asie et l’Europe pour Hapag Lloyd. Cette course à la hausse s’est manifestée avec une progression de 13% du Shanghai Containerized Freight Index de 13%. De son côté, les indices créés par Drewry montrent une progression importante des taux de fret depuis la Chine vers l’Europe et les États-Unis. En effet, sur la route de Shanghai vers Rotterdam, ils ont progressé de 5% au 30 mai à 5270$/EQP. En un an, la hausse est estimée à 240%. Quant aux taux pour un conteneur de Shanghai vers Los Angeles, ils s’établissent à 5390$/EQP, soit une progression de 200% en un an.

Une progression de 350%

Pour Peter Sand, analyste chez Xeneta, les fantômes de la période du Covid refont surface. « Nous sommes face à un océan d’incertitudes et de perturbations », continue l’analyste dans un entretien à l’agence de presse Reuters. Et il continue en indiquant que si ce taux reste éloigné des pics de 14 407$/EQP enregistrés en 2022, ils ont augmenté de 350% depuis le 1er mai. Les règles essentielles du marché libre s’appliquent. Dès lors que la demande augmente sans que l’offre ne puisse survenir, les prix augmentent.

La difficulté de trouver des navires

Trois éléments majeurs guident cette augmentation des taux de fret. En premier lieu, la demande enregistre des pics. D’une part, l’inflation se réduit amenant les consommateurs vers les marchés. D’autre part, les distributeurs craignent de nouvelles hausses tarifaires après l’été, indique Peter Sand. Ils reconstituent leur stock. En deuxième lieu, la flotte de navires conteneurisés est utilisée à son maximum. « Il est difficile de trouver des porte-conteneurs sur le marché », a rappelé le Pdg d’Hapag Lloyd. D’autres armements du Top 5 mondial, nous assure avoir « fait les fonds de tiroir » pour assurer les services dans les mêmes conditions d’avant la crise de la mer Rouge et de l’allongement des temps de transport.

Le manque de conteneurs et la congestion portuaire

En troisième lieu, le manque d’équipements se fait jour. La hausse importante de la demande oblige à avoir une logistique serrée des conteneurs pour permettre leur retour vers les lieux de production. Le manque de conteneurs refait surface comme pendant la crise du covid. Et parce qu’un malheur n’arrive jamais seul, la congestion portuaire semble s’installer. Linerlytica estime à 2MEVP sont actuellement « coincés » dans les ports.

Pas d’amélioration avant la Golden Week

Dans ces conditions de marché, les armateurs retrouvent le sourire. Après une année de forte baisse de leurs revenus financiers, ils espèrent améliorer la rentabilité des différents services, même si les coûts d’exploitation augmentent avec le passage par le cap de Bonne-Espérance. Il est hasardeux de se projeter. Cependant, Ovrsea confie que ses sources en Chine estiment qu’aucune amélioration n’est attendue avant la « Golden Week » du début octobre.

Une inversion dès le mois de juin

D’autres analystes sont plus réservés. Selon Simon Heaney de Drewry, les taux de fret pourraient s’inverser dès le mois de juin sur le trade entre l’Asie et l’Europe. Un scénario qu’Ovrsea estime peu probable. Et pourtant, dans des posts sur Linkedin, plusieurs analystes estiment que les premières baisses se dessinent sur la route Asie-Europe. Les chargeurs peuvent se rassurer. Même si la demande se maintient sans que la crise ne se résolve en mer Rouge, le marché attend une capacité de 2 MEVP de capacité d’ici à la fin de l’année. L’explosion de la bulle surviendra en fonction des solutions apportées au Moyen-Orient. Dès lors que les attaques des Houthis cesseront et que les navires reprendront leur itinéraire habituel, la surcapacité pourrait refaire surface avec un effet de tsunami pour les compagnies maritimes.