Corridors et logistique

Charbon : la Chine revoit sa stratégie d’achat

Dans son rapport hebdomadaire du 1er juillet, le courtier de fret Intermodal revient sur les importations chinoises de charbon. Les habitudes se modifient pour une réduction des entrées.

Après avoir atteint un record historique en 2024, la Chine semble entrer dans une nouvelle phase de recalibrage pour ses importations de charbon. Par ailleurs, les premières données pour 2025 indiquent une décélération significative des importations de charbon. Cette nouvelle tendance, explique le courtier de fret Intermodal tient à l’effet conjugué d’une surcapacité nationale, de l’évolution de la politique énergétique et des changements structurels de la demande.

Une baisse de 8% des importations de charbon

Ainsi, au cours des cinq premiers mois, les importations chinoises ont diminué d’environ 8 % comparativement à 2024. « D’après nos estimations, la baisse sur l’ensemble de l’année pourrait se situer entre 50 et 100 Mt, soit une chute de 18% », estime Intermodal. Pour mémoire, en 2024, la Chine a importé 542,7 Mt. Ce recul est inhabituel dans le contexte actuel. En effet, le début de l’été est généralement une période de constitution des stocks en prévision du pic de la demande de l’hiver. Une des raisons de cette tendance, avancée par Intermodal, tient à la politique énergétique chinoise. Elle s’appuie davantage sur un approvisionnement local et sur des sources d’énergie diversifiées.

La croissance de la demande en électricité absorbée par les énergies vertes

Plusieurs facteurs expliquent ce revirement. Tout d’abord, la production nationale de charbon a fait un bond. La production au cours des quatre premiers mois de l’année a augmenté de 6,6%. De plus, les prévisions d’une production supplémentaire de 70 à 80 Mt permettront à l’Empire du milieu de réduire sa dépendance aux produits étrangers. Dans le même temps, la production d’électricité des centrales thermiques montre des signes de stagnation. Effectivement, les premiers chiffres montrent une baisse de 4% de la production par ces unités de janvier à avril. Or, dans le même temps, la demande en électricité augmente. Cette croissance est absorbée par le recours à des énergies renouvelables.

Le charbon passe de 80% à 55% en dix ans

Alors, les efforts déployés par la Chine pour diversifier ses sources d’énergie donnent des résultats mesurables. En avril, la part de l’éolien et du solaire dans la production d’électricité s’élève à 26 %, De son côté, la contribution du charbon tombe sous la barre des 55%. Le charbon demeure majoritaire dans la production électrique mais perd du terrain. Pour rappel, en dix ans, elle est passée de 80% à 55%. Dans ce contexte, le rôle du charbon importé devient de plus en plus marginal. Et cette marginalité s’accroît quand les stocks sont abondants et que le gouvernement favorise la production nationale.

Des charbons plus efficaces

Outre cette tendance globale, d’autres changements s’opèrent dans les achats de charbon, continue Intermodal. Le courtier observe un changement dans la nature des importations. En effet, les acheteurs s’intéressent de plus en plus aux charbons à plus haute valeur calorifique. Des matières premières qui se trouvent surtout en Australie et en Russie. Le recours à cette catégorie de charbon s’explique par le choix stratégique de la Chine de s’orienter vers des importations d’énergie plus denses. En revanche, le charbon indonésien, dont le contenu énergétique est généralement plus faible, a vu ses expéditions diminuer. Ainsi, le charbon indonésien perd plus de 12% depuis le début de l’année. Dans le même temps, les livraisons en provenance d’Australie augmentent.

La Chine exporte une partie de sa production

Par ailleurs, le marché du charbon chinois se complexifie avec la décision du gouvernement d’exporter une partie de sa production. Les volumes de ces flux demeurent modestes. Sur les cinq premiers mois de l’année, les sorties de charbon de Chine progressent de 13%. Pour Intermodal, ce phénomène est le « signe d’une offre excédentaire et d’un effort de rééquilibrage plus large de la part des producteurs. Des pays comme le Japon et la Corée du Sud sont devenus des acheteurs inattendus de charbon chinois. »

Économie d’énergie et verdissement face aux flux maritimes

Pour se projeter dans un horizon plus lointain, les importations chinoisesu de charbon sont appelées à diminuer. Ainsi, « la trajectoire à plus long terme indique une modération continue de la dépendance à l’égard des importations. Les prix mondiaux du charbon restant bas et l’offre nationale étant robuste, les importations maritimes de charbon de la Chine pourraient continuer à diminuer. » Une tendance qui résulte « non pas d’une décision politique unique, mais comme résultat cumulatif de l’évolution de l’économie de l’énergie, de prix nationaux compétitifs et d’une transition verte qui s’accélère. » Pour le monde maritime, ces modifications de paradigme dans les approvisionnements chinois de charbon ont un impact. Cependant, les armateurs peuvent se tourner vers la bauxite qui, de son côté, voit sa demande augmenter en Chine.