Corridors et logistique

Conteneurs : l’effet cascading change le paradigme des lignes maritimes

Dans sa newsletter du 9 décembre, Sea Intelligence revient sur l’effet de cascade des navires. Après l’ajout de capacités sur les lignes Asie-Europe, les armateurs reviennent à des transferts vers les lignes secondaires.

Les capacités des armateurs s’ajustent en fonction des évolutions économiques et politiques. Ainsi, en 2024, pour maintenir des services hebdomadaires, les armateurs ont aligné de nouveaux navires sur les lignes Europe-Asie. En effet, ils ont dérouté les lignes par le cap de Bonne-Espérance en raison des attaques dans le détroit de Bab el Mandeb. L’allongement du temps de transport a nécessité la mise en place de nouvelles capacités pour maintenir des services avec une fréquence hebdomadaire.

Le retour des lignes par Suez

La situation a évolué. Le nouveau contexte en mer Rouge incite les armateurs à reprendre la route de Suez. Déjà, Mærsk, CMA CGM et d’autres ramènent des services entre l’Extrême-Orient et l’Europe par le canal de Suez. Alors, les lignes Asie-Europe montrent les premiers signes de saturation, indique Alan Murphy, p-dg de Sea Intelligence. Un phénomène qui “pousse le tonnage excédentaire vers des routes commerciales secondaires ».

La capacité des lignes Asie-Europe et Asie-Amérique du Nord se réduit

Dans son analyse, Sea Intelligence a calculé, au second semestre, le solde entre les retraits de navires et les ajouts. Ainsi, les lignes conteneurs entre l’Asie vers l’Europe, la Méditerranée, les deux côtes Est et Ouest de l’Amérique du Nord perdent de la capacité. Les liaisons Asie-Europe subissent le principal effet avec une diminution de plus de 300 000 EVP de capacité. D’un autre côté, les liaisons entre la Méditerranée et la côte Est d’Amérique du Nord apparaissent comme les grandes gagnantes avec l’ajout de 127 686 EVP.  « Ce chiffre s’explique par l’ajout de 178 189 EVP de capacité en cascade provenant de la ligne Asie-Méditerranée, avec un transfert de 11 navires de 14 000 à 15 000 EVP », explique Alan Murphy. Les lignes entre l’Europe et la côte Est d’Amérique du Nord profite de cet effet de cascade tout comme les rotations entre d’Asie et d’Europe vers l’Amérique du Sud.

La région de l’Indo-Pacifique, lieu d’une bataille concurrentielle

Ce mouvement tient à trois éléments, nous confie Jérôme de Ricqlès, expert maritime chez Upply. En premier lieu, la surcapacité se retrouve de façon chronique et structurelle sur les lignes Est-Ouest. Ensuite, la politique économique de la Maison blanche oblige les armateurs à une agilité pour s’adapter. Enfin, les opérations dans le Pacifique évoluent. La poussée de la Chine en Amérique du Sud et le développement des économies des Brics et de l’Afrique incite les armements à transférer une partie de la capacité vers ces lignes.

Les armements asiatiques se transforment

Dans ce contexte, cette région de l’Indo-Pacifique devient le théâtre d’une bataille concurrentielle ardue entre armements occidentaux et asiatiques. Alors, d’un côté nous retrouvons des filiales d’armements occidentaux comme CNC pour le groupe CMA CGM. De l’autre côté, SITC, Wan Hai et PIL se transforment avec leur propre clientèle. Ils se libèrent de leur rôle de « feeders sur des lignes secondaires des armements occidentaux », souligne Jérôme de Ricqlès. Et l’expert maritime, de constater que le Vietnam cristallise ces batailles entre armements locaux et occidentaux.

Asie-Méditerranée : les nouvelles orientations des armateurs

Enfin, sur les lignes entre la Méditerranée et la côte Est de l’Amérique du Nord, Jérôme de Ricqlès l’explique par la stratégie des armements. D’une part, MSC oriente sa stratégie vers des dessertes directes. Une nouvelle donne puisque Genève a longtemps préféré desservir les ports de l’ouest de la Méditerranée par transbordement. Inversement, le groupe CMA CGM et les armements de la Premier Alliance desservent, partiellement, les ports de la région en transbordement. Quant à Gemini, regroupant Mærsk et Hapag Lloyd, ils ont adopté une stratégie tournée entièrement vers le transbordement. Dans ce contexte, MSC a ajouté de nombreuses capacités sur ces liaisons.