Corridors et logistique

Conteneurs : un premier trimestre positif malgré les tensions du marché

Le marché du conteneur demeure sous tension. Pour Hapag Lloyd et Mærsk, les résultats financiers du premier trimestre demeure en ligne avec les prévisions.

Le marché de la conteneurisation continue sa décroissance entamée au mois de janvier. Selon le World Container Index de Drewry, les taux de fret affichent des diminutions de 50% sur certaines routes. Ainsi, entre Shanghai et Rotterdam, un conteneur de 40’ se négocie aujourd’hui à 2 202 $ contre 4 474$ le 2 janvier. La baisse se situe dans le même ordre d’idée depuis Shanghai vers Los Angeles. Un 40’ se négocie à 2 590$ aujourd’hui contre 5 476$ le 9 janvier. Ainsi, il perd 52,7%.

Une hausse de 0,5% des flux conteneurs européens

Cette tendance de baisse des taux de fret se retrouve partiellement dans les volumes. Selon les dernières données de Container Trade Statistics (CTS), les échanges conteneurisés de l’Europe progressent faiblement. Ils augmentent de 0,5% à 6,7 MEVP en trafic cumulé des trois mois. Les tensions géopolitiques se reflètent dans ces chiffres. Ainsi, les volumes avec l’Amérique du Nord sauvent les apparences. Ils gagnent 1,2% sur le trimestre mais uniquement grâce à la reprise des trafics sur février et mars. En janvier, les flux enregistrent une baisse de 18,9%.

Les trafics conteneurs avec l’Asie gagnent 0,8%

De leur côté, les échanges avec l’Asie stagnent. Ils cumulent 1,5 MEVP, soit une hausse de 0,8%. Ce premier trimestre montre les prémices d’un retournement de marché. Les politiques tarifaires américaines et asiatiques incitent les européens à s’intéresser à d’autres marchés. Ainsi, le sous-continent indien augmente de 8,9% à 939 100 EVP. Pour sa part, l’Amérique du Sud et du Centre affiche une progression de 14,2% à 451 300 EVP. Enfin, le flux intra-européen demeure le premier courant d’échange conteneurs avec 1,9 MEVP. Une route qui accuse un repli de 3,2%.

Des taux de fret en hausse

Dans ce contexte de baisse généralisée, les résultats des armements doivent voir une diminution de leurs revenus. Il n’en est rien. Dans son rapport trimestriel, le groupe Mærsk annonce une progression des taux de fret. En effet, au premier trimestre, le taux moyen du groupe s’élève à 2 427$/EQP, soit 2,5% de plus que sur le premier trimestre de l’année dernière. Néanmoins, comparativement au dernier trimestre 2024, ces taux sont en diminution de 8,7%.

Une hausse de 10,4% sur l’Europe-Asie

De son côté, Hapag Lloyd s’inscrit dans la même veine. Les taux de fret sont en progression de 8,9% à 1 480$/EVP au premier trimestre, comparativement à la même période de 2024. Et l’armement basé à Hambourg détaille les taux par route. Entre l’Asie et l’Europe, ils progressent de 10,4% à 1 404$/EVP. Sur le Transpacifique, ils gagnent 11% à 1 692$/EVP.

Des volumes conteneurisés en progression

Les deux armements s’accordent pour reconnaître que la demande en transport a nettement progressé au cours des trois premiers mois de l’année. Avec 3,3 MEVP transportés, Hapag Lloyd affiche une augmentation de 8,9% de ses volumes. Pour sa part, le groupe Mærsk annonce une progression plus modeste de ses volumes. Elle s’élève à 0,1% à 2,9 MEQP (soit 5,8 MEVP).

Une augmentation de la demande

Des hausses de volume que les armements attribuent à la réaction des opérateurs logistiques de se prémunir contre la politique tarifaire du nouveau locataire de la Maison blanche. En effet, dès son arrivée, Donald Trump a mis en musique ses promesses électorales avec des augmentations des droits de douane. Après une escalade dans les chiffres, il a décidé d’accorder une période de 90 jours sans hausse. Cette fenêtre de tir est largement utilisée par les importateurs américains pour remplir leurs stocks. Ainsi, les armements ont profité de cette croissance de la demande.

La stabilité des coûts opérationnels

Ces hausses des recettes s’accompagnent d’une stabilité des coûts pour le groupe Mærsk. En effet, le coût des soutes a diminué de 9%. Combiné avec l’optimisation de la consommation, cette baisse permet de compenser l’augmentation des coûts de manutention. Une tendance que Hapag Lloyd n’a pas connue. Effectivement, la parité entre l’€uro et le dollar a impacté les dépenses. L’armement allemand constate une hausse de 44$/t sur les soutes en raison des taux de change. De plus, le coût des certificats d’émission de CO2 s’élève à 35,3 M€ sur le premier trimestre. L’utilisation de la route par le cap de Bonne-Espérance pèse lourd sur ce chapitre.

Le retour de la demande en conteneurs sur le Transpacifique

L’avenir n’est pas lumineux. L’incertitude de la politique tarifaire de la Maison blanche fait planer une épée de Damoclès au-dessus de la tête des compagnies maritimes. Elles ne savent pas si de nouveaux revirements n’auront pas un effet sur leur activité. De plus, l’entrée en vigueur en octobre des taxes sur l’utilisation des navires chinois pourrait encore impacter les relations commerciales entre les États-Unis, la Chine et l’Europe. « Il est toujours difficile de prévoir l’avenir. Les marchés évoluent rapidement. Cependant, nous constatons depuis le 12 mai une hausse de la demande sur le Transpacifique. Cette tendance pourrait s’inverser », nous confie un responsable de Hapag Lloyd.

Ira ou n’ira pas à par le canal de Suez ?

Enfin, la question sur le retour par le canal de Suez se pose. L’accord de cessez-le-feu entre les États-Unis et les Houthis semble plaider pour un retour des armements par la route de Suez. Cependant, si les attaques contre les navires marchands ont cessé depuis janvier, la situation reste encore fragile. « Cet accord concerne uniquement les attaques des Houthis contre les navires des forces navales des États-Unis. Nous voulons éviter des va-et-vient entre la route par le cap de Bonne-Espérance et celle de Suez. Cela pourrait impliquer des perturbations trop importantes dans les chaînes logistiques de nos clients », nous indique un porte-parole de Hapag Lloyd.

Un optimisme mesuré

Et les chiffres ne plaident pas pour un optimisme. Hapag Lloyd rappelle que la prévision de début d’année de Drewry d’une hausse de 2,8% des trafics conteneurisés en 2025 est revue à la baisse. Le consultant britannique table maintenant sur une baisse de 1%. De son côté, Mærsk analyse la situation avec un œil moins pessimiste. La pause de 90 jours dans l’application des tarifs douaniers américain peut inciter à une croissance des échanges au cours du deuxième trimestre. « D’un côté, le risque d’une baisse plane toujours. De l’autre côté, les échanges peuvent croître, si la politique tarifaire est revue. »