Politique

La saisie du pétrolier Skipper : conséquences juridiques et pratiques

Le 10 décembre, les États-Unis ont saisi le pétrolier Skipper. Un acte qui suscite des interrogations juridiques et économiques. Le marché pétrolier hésite entre hausse et maintien des prix.

Le 10 décembre, la Maison blanche a ordonné la saisie du pétrolier Skipper. Le bureau du procureur du district de Columbia confirme le 10 décembre la procureure Jeanine Ferris Pirro et le directeur du FBI Kash Patel ont confirmé la signature par un juge d’instance le 26 novembre.

Un navire lié à des organisations terroristes

La saisie du pétrolier par les garde-côtes américains est intervenue le 10 décembre dans les eaux internationales au large des îles de Saint Vincent et Grenadines. Cette saisie est motivée par son appartenance à la « flotte fantôme » iranienne. Selon la procureure du district de Columbia, le navire est actif dans un réseau soutenant le Hezbollah et les Pasdaran iraniens (gardiens de la révolution). Ces organisations négocient du pétrole iranien et vénézuélien pour financer des actes de terrorisme.

Un acte de piraterie

Ainsi, l’administration et la justice américaines justifient la saisie au nom des sanctions prononcées par le gouvernement américain contre le Venezuela et l’Iran. Le gouvernement de Caracas accuse les États-Unis d’acte de piraterie. Dans la presse internationale, Nicolas Maduro, président du Venezuela, qualifie cette saisie de piraterie.

Une définition internationale

Cependant, cette accusation doit être analysée en regard de la convention sur le droit de la mer de 1982. En 2010, le Sénat rappelle dans un rapport la définition de la piraterie. Il s’agit de « tout acte illicite de violence ou de détention ou toute déprédation commis par l’équipage ou des passagers d’un navire ou d’un aéronef privé, agissant à des fins privées, et dirigé :

  • Contre un autre navire ou aéronef, ou contre des personnes ou des biens à leur bord, en haute mer ;
  • Contre un navire ou aéronef, des personnes ou des biens, dans un lieu ne relevant de la juridiction d’aucun État ;
  • Tout acte de participation volontaire à l’utilisation d’un navire ou d’un aéronef, lorsque son auteur a connaissance de faits dont il découle que ce navire ou aéronef est un navire ou aéronef pirate. »

La saisie du Skipper vaut elle celle du Galaxy Leader

Alors, la saisie du Skipper est-elle un acte de piraterie ? Pour mémoire, lors de la saisie du Galaxy Leader par les Houthis en novembre 2023, l’Union européenne et les États-Unis ont qualifié de piraterie cet acte. Aujourd’hui, la saisie d’un navire lié aux gouvernements iranien et vénézuélien ne s’inscrit pas dans la même démarche, argumente la justice américaine. En saisissant le Skipper avec du pétrole sous sanction, la Maison blanche considère qu’elle est dans son bon droit. Chaque point de vue trouve ses partisans et ses adversaires. Néanmoins, le débat pourrait déboucher sur une nouvelle définition de la piraterie dans le cadre de sanctions internationales.

Le Venezuela dispose de la première réserve de pétrole

Outre l’aspect juridique, les professionnels s’interrogent sur les évolutions du marché pétrolier. Le Venezuela dispose de la première réserve pétrolière dans le monde, devant l’Arabie Saoudite. En intensifiant ses actions contre les exportations pétrolières du Venezuela, la Maison blanche agit sur le marché pétrolier. Cependant, les sanctions américaines interviennent alors que le marché pétrolier mise sur un accord de paix entre la Russie et l’Ukraine. Dans l’hypothèse où un les deux belligérants s’accordent, c’est la probabilité de libérer le pétrole russe sur les marchés internationaux.

Des incertitudes sur le long terme

Ainsi, la pression des États-Unis sur les exportations pétrolières vénézuéliennes limite l’offre. Une stratégie pour maintenir les prix pour vendre son propre or noir. Les spécialistes estiment que l’offre reste contenue sur le court terme. Bien plus, le 12 décembre, les chiffres des stocks américains en essence et gasoil demeurent à des niveaux élevés. Sur un plus long terme, en l’absence d’accord de paix entre l’Ukraine et la Russie et de sanctions plus sévères sur le Venezuela, la courbe des prix du pétrole pourrait partir à la hausse. Une situation compliquée pour l’économie générale.