Corridors et logistique

Pétrole : la logistique se modifie au gré des décisions politiques

Dans son analyse hebdomadaire, le courtier Banchero Costa constate une baisse des exportations de pétrole brut sur les premiers mois de l’année. Dans ce contexte, les sanctions américaines contre le Venezuela et l’Iran impactent les flux logistiques.

Est-ce le signe d’une transition énergétique mondiale ? En 2024, les trafics de pétrole brut dans le monde enregistrent une progression de 0,4% à 2 194 Mt, indique le courtier Banchero Costa. Les années précédentes ces trafics affichent des hausses plus importantes. Ainsi, en 2023 les volumes ont progressé de 5,3% et de 8,7% en 2022.

Une baisse des flux en 2025

Alors, après le tassement de la croissance des flux en 2024, les premiers mois de 2025 se montrent encore plus décevants. Ainsi, sur les sept premiers mois de l’année, ils s’établissent à 1 276 Mt, soit une baisse de 0,8% par rapport à 2024. La donne géopolitique modifie sensiblement les flux.

La Russie et l’Arabie Saoudite réalisent 50% des exportations

Dans son rapport, Banchero Costa reprend l’état actuel des trafics. Ainsi, les pays du golfe demeurent en pole position des exportations avec 40% du trafic. Sur les sept mois, ils exportent 510 Mt. Cependant, ce chiffre progresse faiblement, de 0,1%. Viennent ensuite les ports russes. Les sanctions américaines et européennes contre la Russie ne parviennent pas à éradiquer totalement les échanges russes. Le pays a exporté, sur les sept mois de l’année, 132,1 Mt. Un volume qui diminue de 3,7%. Ainsi, de la Russie aux pays du golfe Persique, ce sont 50% des trafics de pétrole brut du monde.

La baisse des exportations des États-Unis

Parmi les autres exportateurs de pétrole se retrouvent les pays d’Amérique latine. Ils représentent 9,6% des flux avec un volume de 122,8 Mt. Un trafic qui progresse de 7,2% comparativement à la même période de 2024. Pour sa part, les États-Unis ne parviennent pas à enrayer la baisse de ses exportations. Ils ont expédié 103,1 Mt, soit 13,6% de moins que l’année passée. Les décisions de la Maison blanche tendent à augmenter ces flux. Enfin, les pays du sud-est asiatique voient leurs exportations se contracter de 12,6% à 64,7 Mt. Cette diminution tient, en partie, aux changements logistiques du pétrole russe. Après avoir servi de transbordement de pétrole russe, ils voient leur rôle s’amoindrir face aux menaces de sanctions.

La Chine importe 22,5% des flux

À l’autre bout de la chaîne logistique, le premier pays importateur de pétrole brut est la Chine. L’Empire du milieu englouti 22,5% des flux mondiaux. Cependant, le pays réduit sa dépendance aux importations. Sur les sept premiers mois de l’année, il diminue les importations de brut de 3,7% à 285,4 Mt. Vient ensuite, l’Union européenne avec 264,2 Mt. Ici aussi les importations de pétrole brut se réduisent en perdant 5,4%¨d’une année sur l’autre.

L’impact des sanctions de la Maison blanche

Cependant, la baisse de trafics ne modifie pas les flux. La situation pourrait évoluer. Dans une analyse de marché du 2 septembre, OPIS revient sur les sanctions américaines contre le Venezuela et l’Iran. Certes, lors du premier mandat de Donald Trump, les deux pays ont souffert de sanctions américaines. Depuis lors, le marché a évolué. Pour OPIS, « les sanctions imposées à l’un ou aux deux pays resserrent l’équilibre mondial du pétrole brut lourd. Il a un impact sur l’économie des raffineries complexes à l’échelle mondiale. »

De nouvelles origines pour les raffineries du golfe du Mexique

Les implications sont plus importantes pour l’industrie américaine du raffinage. Elle est, avec la Chine, l’une des principales consommatrices de brut lourd. Or, elle s’approvisionne en Arabie Saoudite, au Mexique et au Venezuela. Le Mexique a réduit ses exportations. De son côté, l’Arabie Saoudite modifie sa production en privilégiant le brut plus léger. Quant au Venezuela, il est sous le coup de sanctions de la Maison blanche. Dans ces conditions, les raffineries du golfe du Mexique cherchent de nouvelles origines. Cependant, le brut canadien d’une part, et celui depuis les pays d’Amérique du Sud ne suffisent pas.

Les bénéficiaires de ces sanctions

Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Les sanctions américaines contre le Venezuela et l’Iran peuvent bénéficier à des exportateurs comme le Brésil, l’Argentine, l’Équateur et la Colombie. De plus, le brut canadien profitera de ces changements de flux. Néanmoins, ces changements logistiques pèseront sur les marges des sociétés de raffinage du sud des États-Unis. Leurs installations ne sont pas adaptées au raffinage de brut plus léger. La Maison blanche devra arbitrer entre des sanctions, outils de sa politique étrangère, et les résultats des raffineurs du golfe du Mexique.