Sur le polder du port de Brest, Haizea et SPIE équipent les mâts de parcs éoliens en mer français
Une grande partie des mâts d’éoliennes déployées devant les côtes françaises transitent par le polder de Brest. De nombreux équipements sont installés dans de grandes sections avant leur assemblage. Une centaine de mâts ont ainsi déjà été équipés depuis 2022. Nous reprenons, ci-dessous, un article de Gael Cogné de Mer et Marine pour découvrir ce site.
Sous une tente de 4500 m² s’élevant à 15 mètres de haut, où il est interdit de prendre des photos, six sections de mâts d’éoliennes peintes en blanc sont rangées. Beaucoup d’autres sont alignées à l’extérieur. En tout, elles sont plus de 80 sur le terre-plein du polder EMR (énergies marines renouvelables) du port de Brest. « Elles sont pour le parc de l’île d’Yeu et Noirmoutier. Leur installation en mer va commencer ce printemps », commente Jean-Maxime Pape, responsable du site pour Haizea Wind.
100 mâts d’éoliennes équipées
Le groupe basque espagnol y conduit, avec son sous-traitant français, le groupe SPIE, une activité plutôt méconnue du port breton, mais qui s’avère pérenne à l’échelle de la récente histoire de l’éolien offshore de la région. Depuis 2022, ils réalisent l’équipement interne des mâts d’éoliennes sur le polder. D’ailleurs, le 23 avril, ils ont célébré le cap des 100 mâts d’éoliennes équipés sur le port de Brest.
Position stratégique
Haizea Breizh, filiale française d’Haizea Wind (1500 employés et 370 M€ de chiffre d’affaires), a été fondée en 2021 pour répondre à la demande générée par le développement des premiers parcs français. Le groupe espagnol a investi 6 M€ pour implanter un atelier et une zone de stockage sur une parcelle de 4 hectares du polder. Brest a été choisi pour sa « position stratégique », à la croisée des futurs parcs éoliens en Manche et sur la côte Atlantique, assure Jean-Maxime Pape. Cela a permis d’amener une activité industrielle sur le port en attendant de futurs projets, comme, peut-être, le parc éolien flottant Pennavel en Bretagne Sud.
Une activité florissante
Basé à Bilbao, Haizea Wind est spécialisé dans les sections de tour et les fondations. Une activité en pleine expansion. Le groupe peut produire des mâts de 8 m de diamètre et s’est lancé dans une nouvelle activité de fabrication de fondations monopieux XXL pouvant atteindre jusqu’à 14 m de diamètre avec une nouvelle usine à Bilbao. Haizea a d’abord été retenu par Siemens Gamesa pour livrer les 62 mâts des éoliennes de 8 MW posées en mer au large de Saint-Brieuc, de l’été 2022 à la fin 2023. Soit 186 sections, chaque mât se divisant en trois parties. Elles mesurent 22 m de long, pour 6 m de diamètre et un poids de 160 t, à la base (section bottom), là où elles doivent soutenir le plus de poids, et atteignent 36 m de long, pour un diamètre de 4.2 mètres en tête de mât, juste sous la nacelle (section top).
La moitié des mâts d’éoliennes offshore en France
Le travail pour le parc de Saint-Brieuc terminé, les deux partenaires ont pu compter sur de nouveaux contrats pour les parcs éoliens des îles d’Yeu-Noirmoutier (été 2024 à fin 2025, 61 mâts d’éoliennes soit 183 sections) et de Dieppe-Le Tréport (démarrage prévu au second semestre 2025, 62 mâts en 186 sections). Des parcs portés par les sociétés Éoliennes en Mer Îles d’Yeu et de Noirmoutier (EMYN) et Éoliennes en Mer Dieppe le Tréport (EMDT), deux filiales d’Ocean Winds, la co-entreprise dédiée à l’éolien en mer créée par Engie et EDPR. Sumitomo Corporation, La Banque des Territoires et Vendée Energie (uniquement pour EMYN) ont également des participations dans EMYN et EMDT. Ainsi, à horizon 2026, quand la construction de ces deux parcs d’environ 500 MW chacun sera terminée, l’atelier d’Haizea Breizh à Brest pourra se vanter d’avoir vu passer la moitié des mâts installés en mer en France (capacité cumulée d’environ 1.5 GW).
Schéma industriel
Dans le schéma industriel mis en place par Haizea Wind, les tronçons de mâts sont fabriqués en série, de manière très automatisée, dans son usine de Bilbao. Il en sort environ six sections par semaine ou l’équivalent de deux mâts. Pour produire une section entière, il faut compter autour d’un mois. De la tôle nue est roulée et soudée pour constituer des viroles qui sont ensuite assemblées en longueur avant d’être peintes. Ces sections sont ensuite expédiées par navire vers Brest. Sur le polder, elles sont manutentionnées au moyen de traînes roulantes de type SPMT et posées sur des bers. Elles peuvent alors être équipées dans l’atelier d’Haizea Breizh par les équipes de SPIE Industrie (filiale de SPIE France comptant 3400 collaborateurs).
Ils arrivent vides, ils repartent équipés
« Nous recevons les sections de mâts qui sont fabriquées dans les ateliers d’Haizea à Bilbao. Elles sont, au départ, stockées sur le terre-plein avant d’être positionnées dans l’atelier où nous allons venir équiper l’ensemble de ce qui se trouve à l’intérieur de ces sections de mâts. Ensuite, les sections repartent vers le quai, vers un navire, pour, en tout cas s’agissant du champs éolien d’Yeu-Noirmoutier, prendre la direction de Saint-Nazaire. Les mâts repartent, comme ils sont arrivés, à l’horizontale », par lots de trois, explique Xavier de Noblens, directeur opérationnel chez SPIE Industrie. Bref, résume-t-il : « Ils arrivent vides, ils repartent équipés ».
Le hub logistique nazairien
Ce n’est que sur le hub logistique nazairien, sur lequel convergent les différents composants formant les éoliennes, que les sections de mâts vont être assemblées et verticalisées en les empilant. Plus tard, les mâts sont chargés sur un navire d’installation d’éoliennes (wind turbine installation vessel, WTIV) à la verticale, avec des nacelles et jeux de pales pour être installés en mer sur les fondations. Une première opération de ce type vient de se dérouler à Saint-Nazaire pour le parc de Yeu-Noirmoutier.
Une quarantaine de personnes sur site
Pour répondre au contrat, le groupe SPIE mobilise une quarantaine de personnes. « Ce sont des équipes qu’on a fait monter en compétences et qui sont issues du domaine industriel et du domaine maritime », poursuit Xavier de Noblens, qui se félicite de voir des « compétences développées localement qui sont des atouts pour l’avenir ». Les techniciens intervenant sur le site sont spécialisés en électricité et en mécanique essentiellement. Ils installent des échelles et plateformes pour les futurs techniciens de maintenance des éoliennes, intègrent de nombreux éléments de sécurité, préparent l’installation du futur monte-charge, prévoient les chemins de câbles électriques et de télécommunications, posent une gaine de ventilation… « Tout ce qui peut être installé à ce stade est fait ici ». Comme à Bilbao, le site de Brest a la capacité de traiter six sections par semaine, soit l’équivalent de deux mâts.