Corridors et logistique

Tarifs douaniers américains : l’impact à plusieurs coups sur le commerce africain

Une étude publiée par la Fondation pour les études et recherches sur le développement international dresse un bilan prospectif des effets des tarifs douaniers américains sur le commerce africain.

Les mesures tarifaires annoncées par Donald Trump lors du Liberation Day ont des effets sur tout le commerce international. Si les premières estimations de ces tarifs douaniers portent sur les relations commerciales avec l’Asie et notamment la Chine, le commerce entre les États-Unis et l’Afrique subira aussi les effets de cette décision.

La fin d’un accès en franchise de droits

Dans un rapport de la Fondation pour les études et recherches sur le développement international, les deux auteurs, Simon Azuelos et Julien Gourdon, se montrent pessimistes pour le continent africain. « Parmi ce lot de mauvaises nouvelles, nous pouvons citer l’impact négatif sur les pays d’Afrique qui bénéficiaient d’un accès en franchise de droits aux marchés américains pour de nombreux produits. »

Des droits de douane à 10%

En effet, l’Agoa, African Growth Opportunities Act, permet aux pays africains d’exporter aux États-Unis sans droits de douane. Entrée en vigueur en 2000, cette loi a permis de nouer des liens plus forts entre les deux continents. Alors, quand l’administration Trump augmente les droits de douane de 10% à 50% pour les pays africains elle crée une onde de choc en Afrique. La « pause » décidée le 9 avril et ramenant à 10% ces droits ne résous pas la situation.

Le marché américain pèse 6% des exportations africaines

« Cependant, les États-Unis représentent un marché d’exportation relativement restreint pour la plupart des pays du continent. Ainsi, 6 % des exportations du continent sont à destination de ce marché et pour 25 pays, la part du marché américain dans les exportations totales est inférieur à 2 % », indiquent le rapport. Ces mesures ont un impact sur les principaux exportateurs africains. Il s’agit de l’Afrique du Sud, du Nigéria, du Ghana, de l’Angola et de la Côte d’Ivoire.

L’Agoa ne sera pas renouvelé

L’impact aura une portée mesurée. Néanmoins, précise le rapport, le risque pour les économies africaines viendra davantage de la volatilité des prix de matières premières. Il pourrait mettre en péril l’écosystème commercial africain et leur équilibre extérieur. Les deux auteurs s’interrogent alors sur l’avenir de l’Agoa. Ce dispositif doit être renouvelé en septembre. « Il y avait déjà des doutes quant à ses perspectives de prolongation. De plus, l’environnement politique ne semble pas propice à un renouvellement. » Par ailleurs ce dispositif tend à se réduire. De plus en plus de pays ne sont plus éligibles. De plus, beaucoup de flux depuis l’Afrique sur les États-Unis ne font pas appel à ces droits nuls.

Le double effet de ces mesures

Encore, ces mesures tarifaires peuvent avoir un effet indirect sur les économies africaines, indique le rapport. En effet, l’augmentation les droits de douanes de produits chinois aux États-Unis peut entraîner une baisse de la production de l’Empire du milieu. Alors, la demande en matières premières africaines par la Chine va se réduire. Cette politique économique américaine présente « un risque de se retrouver entre deux feux d’une guerre économique qui portera sur ses ressources tels que les minerais critiques. (…) La récente annonce de la Chine de réduire ses importations de soja américain illustre la volatilité des marchés des matières premières qui pourrait affecter les exportations africaines si le conflit s’intensifie. » Et le proverbe africain « quand les éléphants se battent ce sont les fourmis qui meurent » prend ici toute sa dimension.

Le textile et les produits alimentaires concernés au premier rang

En 2024, les exportations africaines vers les États-Unis se composent de pétrole, de minerais et de pierres précieuses. « Or, ces produits sont exemptés des nouveaux droits de douane. » Les filières comme le textile, les métaux et les produits alimentaires, directement visés par les tarifs douaniers, seront les plus impactés. La solution pour l’Afrique est donc de trouver de nouveaux débouchés commerciaux. Le rapport estime que les pays africains vont former de nouveaux partenariats. Il estime que cela peut se faire avec la Chine, l’Inde, l’Union européenne ou encore les pays du golfe Persique. Une nouvelle partition à jouer qui peut bénéficier à la Chine, Pékin a décidé en 2024 de réduire à zéro les droits de douanes de 33 pays africains. « Ces chocs extérieurs rappellent l’urgence de renforcer l’intégration économique du continent. La Zlecaf n’est pas seulement un projet politique mais une nécessité stratégique. »