Prospectives

Upply actualise ses scénarios pour la fin de l’année

L’expert maritime de Upply, Jérôme de Ricqlès, reprend les scénarios pour l’année 2025. Des trois scénarios, celui concernant les États-Unis semble se confirmer.

En janvier, l’expert maritime de Upply a prévu trois scénarios pour 2025 dans le transport maritime conteneurisé. En premier lieu, il prévoit une affirmation de la domination de MSC sur le marché. Le deuxième scénario imagine une contestation de cette suprématie avec un encadrement règlementaire. Enfin, le troisième pressent le « grand réveil des États-Unis ». Après six mois, Jérôme de Ricqlès revient sur la situation dans la filière du conteneur. Les prévisions semblent se confirmer avec une nuance. « Ces trois scénarios semblent toujours pertinents, à ceci près que le scénario numéro 3 a pris une ampleur déterminante, reléguant presque au second plan les deux autres scénarios. »

La reprise de contrôle des voies maritimes par les États-Unis

Une conjecture qu’il appui par les décisions du nouveau président des États-Unis, Donald Trump. Le locataire de la Maison blanche veut reprendre le contrôle des voies maritimes tant au sud qu’au nord. De plus, le pays a pris conscience de sa vulnérabilité. « Moins de 1% de la flotte mondiale est sous pavillon américain, et la Chine construit plus de 50% des navires. Ils (les États-Unis, ndlr) veulent désormais y remédier, avec une approche combinée visant à renforcer la marine et le commerce. »

La relance de l’industrie maritime américaine

Des constats qui ont amené le président a publié « un projet de réglementation qui consistera à taxer les navires construits en Chine ou détenus par des intérêts chinois. L’objectif est de relancer les activités de construction navale aux États-Unis, mais aussi dans les économies “amies” comme la Corée du Sud ou le Japon, où elles sont en déclin par rapport au rouleau compresseur chinois. La relance de l’industrie maritime américaine serait ainsi financée par des taxes sur les transporteurs étrangers. » Un projet qui doit entrer en vigueur en octobre. Cette politique maritime sera pilotée par une structure ad hoc dans les bureaux de la Maison blanche.

MSC confirme sa position mais avec un revers

Le deuxième scénario imagine une domination de MSC sur le marché de la conteneurisation. Avec la fin des alliance, opérationnelles depuis 2017, MSC fait désormais cavalier seul face à l’Ocean Alliance et la Premier Alliance. L’armement, basé à Genève, est aujourd’hui le premier armement en capacité de transport. Une flotte importante qu’il « faut remplir coûte que coûte ». Cependant, sur la première marche du podium peut avoir un revers. MSC n’assure pas une fiabilité totale. Ainsi, selon Sea Intelligence, l’armateur obtient un taux de fiabilité de 60% au mois d’avril. Or, à la même période, ses concurrents de l’alliance Gemini, à savoir Mærsk et Hapag Lloyd, dépassent les 70% avec, respectivement, 73,4% et 72,3%.

Des baisses de taux à prévoir

Si la qualité de service est légèrement moindre chez MSC, l’armement « s’impose donc aujourd’hui comme la boussole du marché. Elle donne le ton, et les autres transporteurs mondiaux suivent », continue l’expert maritime de Upply. Alors, le monde de la conteneurisation a les yeux rivés sur sa politique tarifaire. Pour Jérôme de Ricqlès, « la compagnie italo-suisse n’a pas décidé de se lancer dans une guerre des prix et de descendre en-dessous du seuil de rentabilité de ses concurrents. » Une position qui pourrait changer au cours du deuxième semestre. Dans l’hypothèse où un scénario appelé de “loups affamés” avec peu de conteneurs à récupérer en Asie, en raison de la guerre commerciale ainsi que du contexte économique et géopolitique général pourrait changer radicalement le contexte. Dans ces conditions, une baisse des taux de fret est plausible au second semestre.

MSC doit intégrer la diplomatie économique

Cette position de MSC met l’armement sous haute surveillance tant par ses concurrents que par les autorités de régulation. La fin de l’exemption des consortiums depuis avril 2024 impose d’observer une règle essentielle : ne pas disposer de plus de 20% de parts de marché. « La transparence et l’exactitude dans la collecte des données seront ici d’une importance capitale. » Par ailleurs, cette navigation en solo de MSC l’oblige à intégrer la dimension géopolitique dans sa stratégie. La tentative de rachat des terminaux de Hutchison Ports démontre de l’importance d’être « bien avec tous les camps ». L’enquête ordonnée par les autorités chinoises sur ce dossier a relégué la vente sine die. Or, la rivalité entre la Chine et les États-Unis oblige MSC à une diplomatie économique. « La domination de MSC est bien installée. Mais il paraît évident que des leviers seront activés, par le marché et/ou par les autorités, si elle devait tourner à l’hégémonie », conclu Jérôme de Ricqlès.