Juridique et social

États-Unis : sur la côte est, les négociations sont interrompues

Les négociations entre les syndicats d’ouvriers dockers et les patrons de la manutention des ports de la côte est des États-Unis tournent cours. La raison ? l’automatisation des terminaux et notamment ceux du groupe Mærsk.

Les négociations entre le principal syndicat des ouvriers dockers des ports de la côte est des États-Unis, ILA (International Longshoremen Association) et les manutentionnaires (Maritime Alliance) sont suspendues depuis le 10 juin. La suspension intervient après la découverte de l’automatisation d’un terminal d’APM Terminals.

Une automatisation soupçonnée à plus grande échelle

Le manutentionnaire a installé, dans son terminal du port de Mobile, en Alabama, un système qui permet de rendre les entrées et sorties de camion autonomes, « sans les forces de travail de l’ILA », précise le tract du syndicat. Il soupçonne que ce système soit déployé dans d’autres terminaux portuaire du groupe. « Il s’agit d’une violation de notre accord avec l’USMX que nous ne tolérerons pas davantage », a déclaré un porte-parole de l’ILA. Et il continue. « Il ne sert plus à rien de négocier avec l’USMX quand un membre important viole l’accord dans le seul but d’éliminer des emplois de dockers. »

Un audit sur les nouvelles technologies

Manifestants de dockers de la côte est des Etats-Unis
Des manifestations d’ouvriers dockers américains contre l’automatisation des terminaux. « S’ils veulent la bagarre, c’est la guerre qu’ils auront ». © International Longshoremen Association.

Le ton monte et le syndicat refuse de revenir à la table des négociations tant que ce dossier du terminal de Mobile ne sera pas réglé. « Nous ne prenons pas les choses à la légère », averti le syndicat. Il a demandé un audit sur l’utilisation des nouvelles technologies. En effet, face à la croissance importante du nombre d’informaticien dans les terminaux portuaires, le syndicat estime que ces professions « empiètent » sur leurs métiers.

La violation de l’accord de 2020

Ce dossier du terminal de Mobile semble être le conteneur qui cache le terminal. L’automatisation de terminaux par le groupe Mærsk aux États-Unis est en marche. Or, pour le syndicat, APMT, principal membre de l’USMX, porte atteinte à l’accord signé entre les deux parties en 2020. « La plupart des problèmes des ports de la côte est et du golfe du Mexique surviennent avec Mærsk. Ils ont commencé par une automatisation partielle dans le terminal d’Hampton Roads pour continuer par une automatisation totale dans le port de Los Angeles. Nous avons perdu des dizaines de milliers d’emplois avec la conteneurisation et APM Terminals semble vouloir continuer avec l’automatisation. »

Éliminer des emplois américains bien rémunérés

Et le président du syndicat, Harold J. Dagget, enfonce le clou. « Cette compagnie étrangère, comme d’autres, tente de nous faire accepter des terminaux automatisés. Pour quelle raison ? Pour éliminer des emplois américains bien payés, les emplois des dockers de l’ILA. » Il en appelle à l’administration de Joe Biden de faire cesser ces atteintes. En juillet 2023, lors de la convention du syndicat, le vice-président du syndicat a prévenu. « Nous voulons un langage clair et écrit. Nous avons signé un contrat pour quatre ans et tout le monde semble atteint d’amnésie. » Des discours que l’USMX ne semble pas avoir pris au sérieux, s’indigne les responsables syndicaux.

Quatre mois pour résoudre les dossiers

Le syndicat avertir. Il conditionne son retour à la table des négociations à la résolution des dossiers sur l’automatisation. Ces discussions doivent déboucher sur la signature d’un accord entre dockers et manutentionnaires pour une durée de quatre ans. L’actuel accord prend fin le 30 septembre 2024. Il reste donc moins de quatre mois avant l’échéance. Harold J. Dagget n’est guère optimiste sur le calendrier. « Ils traînent toujours des pieds », souligne-t-il en parlant de la partie opposée. De son côté, l’USMX a publié un texte appelant à la reprise des négociations, sans plus de détails.

Mærsk : et si après les terminaux, le groupe devait répondre de l’accident du Dali ?

Cette prise de position contre la filiale manutention du groupe Mærsk intervient à point nommé. D’une part, le syndicat attaque frontalement le groupe danois contre sa stratégie dans les terminaux sans respecter les accords passés. Or, APMT dispose de nombreux terminaux dans les ports américains. Une vague d’intimidation contre le groupe, en pleine année électorale, pourrait désorganiser les manutentionnaires.

D’autre part, Mærsk tente de passer sous les radars à propos de l’accident du pont Francis Scott à Baltimore. En effet, le Dali est un navire affrété par l’armement danois pour opérer dans le cadre d’un service de l’alliance entre MSC et Mærsk. Or, si aujourd’hui, aux États-Unis, il est plus souvent fait mention du gestionnaire du navire (Seanergy Marine Group), il n’est pas exclu que l’organisme en charge de l’enquête (NSTB, National Transport Security Board) de cet accident demande des comptes au groupe Mærsk. Longtemps considéré comme un armateur « quasi » américain, Mærsk pourrait perdre ce statut si les choses s’enveniment.