Corridors et logistique

Logistique automobile : la crise ukrainienne met la filière en danger

La logistique automobile cumule les crises. Après la pandémie et le ralentissement de la production, le conflit entre l’Ukraine et la Russie amène de nouvelles perturbations dans la production qui se répercutent sur la logistique.

Après la pénurie de semi-conducteurs, l’explosion des prix des carburants et l’inflation croissante, de nouvelles pénuries de pièces détachées provoquent l’arrêt de la production, s’inquiètent les membres d’ECG (European Car Group, organisation européenne des logisticiens automobiles).

Après la pandémie, le conflit en Ukraine

L’industrie automobile est directement impactée par la crise ukrainienne. « Notre industrie emploie probablement plus de citoyens ukrainiens que la plupart des autres secteurs en Europe », indique l’organisation des logisticiens automobiles. Cette crise intervient après deux années difficiles pour la filière automobile. « Le secteur subit des impacts graves sur plusieurs fronts qui doivent être atténués. Le résultat est une troisième année consécutive de crise après le Covid et les pénuries de semi-conducteurs ».

Des chaînes d’approvisionnement en lambeaux

Une fois de plus, les chaînes d’approvisionnement mondiales sont mises à rude épreuve et se révèlent insuffisantes. L’industrie automobile est désormais considérée comme fortement dépendante de l’Ukraine pour l’approvisionnement en pièces détachées et en matières premières. Le problème le plus immédiat et le plus grave semble être celui des harnais de câblage, fabriqués majoritairement en Ukraine. Ces pièces sont réalisées par une main-d’œuvre importante qui ne pourra pas être délocalisée facilement et rapidement ailleurs. En effet, des premiers rapports font état de fermeture d’usines, sans que leur réouverture ne soit prévue. Les constructeurs estiment que le délai de réactivation de ces activités ne pourra se réaliser qu’en plusieurs mois.

L’inadaptation des clauses contractuelles actuelles

L’inflation, qui était déjà très élevée avant le début du conflit, est maintenant alimentée par les coûts de l’énergie et des matières premières. Les fluctuations de ces derniers jours des prix de l’énergie ont eu des impacts importants pour les opérateurs logistiques. Les clauses relatives au carburant et aux soutes, largement utilisées, ne peuvent pas faire face à ces changements et dédommager les opérateurs, comme elles sont censées le faire.

Entre cessation d’activité et force majeure

Les prix des soutes ont doublé en six mois, augmentant ainsi les taux d’affrètement de navires. Le marché fait état d’augmentation de plus de 25 000 $/j pour certaines unités. En Italie, où le marché de la logistique terrestre est fortement atomisé, de nombreuses sociétés ont préféré cesser de travailler plutôt que d’accepter des tarifs qui leur feraient perdre de l’argent. Des rumeurs indiquent que de nombreuses entreprises invoquent le conflit entre l’Ukraine et la Russie pour déclencher les clauses de « force majeure ». Elles entreprennent cette démarche pour négocier des solutions raisonnables, face à l’impossibilité de cesser leur activité.

Une répercussion sur tous les coûts opérationnels

Et le coût des carburants n’est qu’une partie du problème, même s’il s’avère le plus important. Effectivement, les augmentations tout aussi importantes du coût des matières premières se répercutent déjà sur le prix des actifs, comme les navires, les wagons ou les ensembles routiers de voitures. De plus, l’inflation entraîne une hausse des salaires. Tous les coûts auxquels un opérateur est confronté augmentent rapidement. Ces hausses généralisées impliquent des augmentations de tous les postes pour les entreprises.

Des mesures urgentes

Dans ce contexte, Mike Sturgeon, directeur général d’ECG appelle à des mesures urgentes. « Les temps extraordinaires appellent des mesures extraordinaires et, à moins que les contrats ne soient révisés rapidement, le risque est de voir les dernières entreprises du secteur mettre la clé sous la porte. En effet, les problèmes de trésorerie étranglent les sociétés. Il est devenu urgent d’entrer dans une phase de négociation entre les constructeurs et les clients pour modifier les contrats afin qu’ils s’adaptent aux changements rapides face à des phénomènes de hausse comme les prix des carburants le connaissent. De plus, les constructeurs automobiles doivent être totalement transparents avec leurs prestataires logistiques sur les volumes à venir afin de pouvoir planifier les capacités. »