Politique

Décarbonation : un accord trouvé à l’OMI malgré les tentatives américaines de le saborder

Le 11 avril, l’OMI a trouvé un accord sur la décarbonation du transport maritime. Il doit encore être ratifié par les États. Un « exploit » compte tenu de la position des États-Unis de saborder les négociations, rappelle Mer et Marine.

Les États membres de l’OMI ont trouvé un accord sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre pour la décarbonation du transport maritime. Une véritable performance dans un contexte de menaces des États-Unis.

Une mesure à finaliser en octobre

Le World Shipping Council salue ce texte. « Il constitue une nouvelle étape cruciale vers la décarbonation du transport maritime », indique un communiqué de l’organisation maritime internationale. Cette mesure doit être finalisée et adoptée en octobre lors de la prochaine réunion du MEPC (comité de l’OMI).

Des redevances proportionnelles à l’intensité du carburant utilisé

L’accord met en place un cadre et une norme pour les carburants qui émettent des gaz à effet de serre. Il prévoit notamment la réduction de ces émissions pour atteindre le « zéro émission » à l’horizon 2030. Il créé une règlementation qui appliquent des redevances proportionnelles à l’intensité de carburant utilisé. De plus, il prévoit un mécanisme qui encourage l’utilisation d’énergies plus propres.

Une étape majeure pour la politique climatique

Pour le WSC, « l’OMI est prête à aller de l’avant sur un sujet qui n’a pas fait l’objet de normes juridiquement contraignantes dans de nombreuses autres enceintes depuis des décennies » insiste Joe Kramek, président-directeur général du World Shipping Council. Il considère que cet accord s’impose comme une « étape majeure pour la politique climatique et un tournant pour le transport maritime. Notre secteur a longtemps été qualifié de « difficile à réduire », mais des investissements industriels records et une nouvelle mesure mondiale peuvent changer la donne. »

Un accord pas parfait mais une base de travail

L’organisation européenne des armateurs, l’Ecsa (European Community of shipowners association), a rappelé que le monde maritime a besoin de règlementations internationales significatives pour se décarboner. « Une réglementation mondiale est essentielle pour garantir des conditions de concurrence équitables au niveau international et assurer la transition énergétique. » L’accord n’est pas parfait, a précisé Sotiris Raptis, secrétaire général de l’ECSA. Cependant, « il constitue un bon point de départ. C’est un cadre sur lequel nous pouvons nous appuyer pour garantir les investissements nécessaires dans la production de carburants propres. »

L’attitude des États-Unis

Cet accord est aussi un exploit dans le contexte politique international. En effet, dès les premières discussions, les représentants des États-Unis ont tenté de saborder les négociations. Dans un article, Caroline Britz, de Mer et Marine, a rappelé la position de Washington dès les premières heures des négociations.

Des mesures de rétorsion

Les Etats-Unis ne siègent pas aux négociations de l’OMI cette semaine et ont même menacé de mesures de rétorsion contre des éventuels frais supplémentaires liées à la décarbonation des navires. La posture des Etats-Unis n’est pas étonnante mais elle risque de faire échouer les très longs travaux du MEPC, le comité spécialisé de l’Organisation Maritime Internationale, autour de la décarbonation du transport maritime et des objectifs de zéro-émission en 2050.

Ne pas appliquer l’agenda de Paris au maritime

Les représentants étasuniens ne siègent pas cette semaine à Londres, au siège de l’OMI, alors qu’une session importante du MEPC vise précisément à faire aboutir la règlementation internationale autour de la décarbonation. Washington a adressé une déclaration aux ambassades des pays membres dans laquelle est expliqué qu’un cadre règlementaire international imposeraient un poids économique important et favoriseraient l’inflation mondiale. Ils appellent également l’OMI à arrêter ses efforts pour appliquer l’agenda de Paris au secteur maritime. Et menacent de de prendre des « mesures réciproques » contre les États soutenant ces efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre.


La décarbonation en chiffres

Le World Shipping Council donne quelques éléments sur le coût de la décarbonation pour le transport maritime. En premier lieu, il rappelle que ce mode émet à lui seul entre 2% et 3% des émissions de gaz à effet de serre. En second lieu, il indique que les carburants alternatifs au VLSFO (Very Low Sulfur Fuel Oil) sont plus chers. Ainsi, le GNL, utilisé par certains armements, coûte 31% de plus. Le méthanol gris a un coût supérieur de 53% et le biogaz de 111%. Le prix de l’ammoniaque vert est 274% plus cher que les soutes traditionnelles.