États-Unis : Les taxes USTR entrent en vigueur le 14 octobre
Le 14 octobre, les nouvelles taxes sur les navires construits en Chine ou opéré par des intérêts chinois entrent en vigueur. La facture va encore augmenter pour les chargeurs.
Le projet d’une taxe sur les navires construits en Chine ou opérés par des intérêts chinois n’est pas récente. En 2024, l’administration de Joe Biden a demandé à l’United State Trade Representative de réaliser une enquête sur une nouvelle taxe. À son arrivée à la Maison blanche, Donald Trump a repris les travaux. Ainsi, dès le mois d’avril, le président des États-Unis a indiqué qu’une taxe sur les navires construits en Chine ou opérés par des intérêts chinois se verront imposés une taxe en fonction de leur tonnage dès leur première escale dans un port américain.
Des taxes pour les opérateurs chinois
Pour s’y retrouver dans cette nouvelle taxe, nous vous proposons un tableau réalisé par Drewry, lors d’un webinaire d’avril. Il présente de façon concise et claire les taxes à venir. D’une part, il explique les taxes qui visent tous les navires opérés par une société basée en Chine continentale, à Hong-Kong et à Macao. D’autre part, il détaille les taxes des opérateurs non chinois qui opèrent des navires construits en Chine. Leur montant se calcule soit au tonnage du navire soit au conteneur. Le montant le plus élevé est appliqué.
Date d’entrée en vigueur | Opérateur (la taxe la plus élevée |
non chinois s’applique) |
Opérateur ou armateur chinois |
14 octobre 2025 | 18 $/tonne nette | 120 $/conteneur | 50 $ par tonne nette |
17 avril 2026 | 28 $/tonne nette | 153 $/conteneur | 80 $ par tonne nette |
17 avril 2027 | 33 $/tonne nette | 195 $/conteneur | 110 $ par tonne nette |
17 avril 2028 | 38 $/tonne nette | 250 $/conteneur | 140 $ par tonne nette |
Recul de la Maison blanche
Ces taxes sont appliquées par rotation pour les escales dans un port des États-Unis. Dans sa première version, le gouvernement américain a souhaité appliquer ces mesures pour chaque escale. Or, cela présente un risque. Une taxe appliquée à chaque touchée signifiait que les armateurs concentreraient leurs escales dans les grands ports. Par conséquent, la Maison blanche a fait machine arrière. En effet, elle a décidé d’imposer une taxe par rotation. Les armateurs s’en acquittent à la première escale d’une rotation. Ces taxes seront perçues avec un maximum de cinq fois par année et par navire.
Les navires construits en Chine sous contrôle d’opérateurs étrangers pèsent 23% sur le Transpacifique
Dans son analyse du marché, au mois d’avril, le cabinet de consultants britanniques estime que sur les liaisons entre l’Asie et l’Amérique du Nord 12% de la capacité est sous contrôle d’armateurs chinois. De plus, les navires construits en Chine et opéré par des opérateurs non chinois pèsent 23% de la capacité. Sur les rotations entre l’Asie et la côte Est des États-Unis les armateurs chinois représentent 12% de la capacité. Par ailleurs, les navires construits en Chine mais gérés par des sociétés étrangères entrent à hauteur de 14%. Enfin, sur le Transatlantique, 4% des navires appartiennent à des armateurs chinois. Les navires chinois opérés par des groupes étrangers entrent à hauteur de 14% de la capacité totale.
Une hausse de 19% du taux de fret
Pour les chargeurs, cette nouvelle taxe signifie une hausse des taux de fret. En avril, Drewry estime à 19% la hausse du taux pour un navire chinois de 9 000 EVP avec un tonnage de 51 000 tpl en escale aux États-Unis. Pour un opérateur non chinois utilisant le même type de navire, la hausse est d’environ 7%. La seule possibilité d’éviter ce surcoût est de garantir la construction d’un navire de même tonnage dans un chantier naval américain. Une position que le p-dg du groupe CMA CGM adopte. Ainsi, Rodolphe Saadé s’est rendu dès le mois de mai à la Maison blanche sur invitation du président des États-Unis. Il justifie cette rencontre, lors de son audition à l’Assemblée nationale en septembre. « Je réponds à une invitation du président d’un pays qui représente un marché important pour le groupe. » Lors de son déplacement, il annonce un investissement de 20 Md$ et la croissance du nombre de navires sous pavillon américain.
La Chine absorbe 53% du carnet de commande mondial
Cependant, la réalité demeure. Aujourd’hui, 53% des commandes de navire dans le monde le sont auprès des chantiers chinois. La Corée du Sud représente 29,1% du carnet de commande et le Japon entre à hauteur de 13,1%, selon les chiffres du Center for Stragegic and International Studies (CSIS). Ainsi, à eux trois ces pays absorbent 95,2% des commandes. Pour leur part, les États-Unis ont 0,1% de ces commandes. La première réaction des armements, au début de l’année 2025, a été de déserter les chantiers chinois. Passé le cap de l’annonce, les armateurs sont retournés commander des navires en Chine. Ainsi, l’Empire du milieu remporte, depuis cet été, près de 60% des commandes.
Plutôt du militaire que du commercial
Alors, en voulant redonner des lettres de noblesse à l’industrie navale américaine, le locataire de la Maison blanche a oublié de « balayer devant sa porte ». Selon le rapport de l’US Navy pour 2025, dévoilé par Reuters, l’industrie navale américaine est dans un état de « mort cérébrale ». Par ailleurs, la Marine américaine souhaite surtout donner une nouvelle dynamique à cette industrie dans le domaine militaire. De leur côté, les armateurs réorganisent leur flotte pour sortir des liaisons avec les États-Unis les navires construits en Chine.
L’effet pour les produits les moins chers
Enfin, cette mesure peut aussi avoir des effets induits pour les consommateurs américains. En effet, une partie des importations américaines depuis l’Europe se compose de produits à haute valeur ajoutée, comme le luxe. Des flux qui peuvent, dans une certaine mesure absorber la hausse liée à ces taxes. Néanmoins, les exportations européennes comprennent aussi des produits de moindre valeur comme l’épicerie. Alors, soit ces produits trouveront de nouveaux débouchés, soit le consommateur américain devra mettre la main à la poche pour s’offrir la qualité européenne.