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Haropa Port Le Havre : le terminal méthanier en sursis

Le 18 octobre, le tribunal administratif de Rouen a rendu sa décision sur le terminal méthanier flottant du Havre. Il a demandé son démantèlement dans les deux mois.

Le terminal méthanier du Havre doit être désinstaller avant le 18 décembre. La décision du tribunal administratif de Rouen est claire sur le sujet. Il est intervenu à la suite d’une requête formulée par l’association Écologie pour Le Havre.

La contestation d’un refus implicite

La demande de l’association écologiste vise à contester « la décision implicite par laquelle la ministre de la Transition Écologique, de l’Énergie, du Climat et de la prévention des risques a refusé, à la suite de sa demande reçue le 12 septembre 2024, d’abroger son arrêté du 13 mars 2023. » Ce dernier fixe les objectifs de mise en service, de maintien en exploitation et de capacités de traitement du GNL pour le projet d’installation d’un FSRU dans le port du Havre porté par TotalEnergies LNG Services France.

Les conditions ne sont plus remplies

Dans sa décision, le tribunal administratif de Rouen annule la décision implicite du ministre. Il argumente son jugement en rappelant que « les conditions relatives à la nécessité d’augmenter les capacités nationales de traitement de GNL afin, d’assurer, en cas de menace grave, l’approvisionnement en gaz, ne peuvent être regardées, en l’état du dossier, comme étant toujours remplies à la date à laquelle le ministre chargé de l’énergie a refusé d’abroger l’arrêté du 13 mars 2023. » Et pour appuyer son argumentation, le tribunal fait siennes les positions de l’association.

Des capacités de réception suffisantes

En effet, selon Écologie pour Le Havre, les capacités de réception du GNL sont suffisantes en France. Elle constate une baisse « significative et continue entre 2022 et 2024, particulièrement le terminal méthanier de Dunkerque, qui représente 39% des capacités totales. Le taux d’utilisation, selon les données du site internet de l’organisme Gas Infrastructure Europe, est passé de 75,13 % en 2022, à 60,71 % en 2023, et 57 % entre janvier et novembre 2024. » De plus, continue l’association, l’utilisation du terminal du Havre est faible. En effet, le taux d’utilisation entre janvier 2024 et novembre 2024 s’élève à 15% de sa capacité. « Il est inutilisé depuis août 2024, selon le site internet de Gas Insfrastructure Europe. »

Un dossier coûteux

Pour sa part, François Auber, maire de Saint Jouin de Bruneval, commune sur laquelle se situe le terminal d’Antifer, qualifie ce dossier de coûteux. « Le projet conçu dans la précipitation finit par coûter plus cher qu’il ne rapporte, financièrement, politiquement et écologiquement », indique un post du maire sur Linkedin. Il rappelle que le projet est présenté comme vital lors de sa création. « Il est devenu embarrassant aujourd’hui ».

Un manque à gagner

Il estime que l’installation du Cape Ann sur le site d’Haropa Port Le Havre n’a pas eu les retombées économiques promises. « Pour les collectivités, la désinstallation du terminal représente un manque à gagner. Les redevances portuaires et les taxes locales liées à l’activité pourraient disparaître. Une perte estimée entre 3 et 10 M€/an. Mais, les retombées économiques sont surestimées. » Or, du point de vue de l’emploi, l’installation de ce FSRU ne créé pas d’emplois. Alors, «  le retrait du Cape Ann révèlerait surtout le mirage économique d’un projet conçu pour rassurer plutôt que pour durer. »

L’urgence ne justifie pas tout

Derrière cette plaidoirie, le maire de Saint Jouin de Bruneval s’en prend à la transition écologique menée par le gouvernement. Il critique la dépendance persistante aux énergies fossiles en France. Elle compromet la transition énergétique. « Chaque nouveau terminal à gaz ou projet pétrolier retarde le développement des infrastructures renouvelables et enferme la France dans des choix coûteux à long terme », s’insurge François Auber. « Le gouvernement, qui avait fait du terminal un symbole de la “sécurisation énergétique” française, se retrouve désormais en porte-à-faux. L’affaire du Havre interroge la cohérence d’une stratégie nationale qui continue d’investir dans le gaz tout en promettant la neutralité carbone d’ici 2050. » Il appelle à la raison. Le jugement du tribunal administratif de Rouen rappelle que « l’urgence ne justifie pas tout. »