Ports décentralisés : une proposition de loi ouvre la voie à une nouvelle génération de sociétés portuaires
La commission du développement durable de l’Assemblée nationale a adopté, le 26 novembre, la proposition de loi élargissant à l’ensemble des ports relevant des collectivités la possibilité de recourir au statut de société portuaire. Nous reprenons, ci-dessous, l’article de Caroline Britz de Mer et Marine.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale a adopté conforme, le 26 novembre, la proposition de loi élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’avoir recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de leurs ports. Le texte, porté par le Sénat et examiné en procédure accélérée, sera débattu en séance publique le 9 décembre. La députée Liliana Tanguy (EPR, Finistère), rapporteure du texte, a souligné l’importance de cette évolution pour les ports décentralisés.
L’effet de la loi NOTRe
Depuis la loi NOTRe du 7 août 2015, qui a ouvert la voie au transfert des ports départementaux aux collectivités ou groupements volontaires, l’organisation portuaire française repose sur une répartition complexe entre l’État et les collectivités. Seuls quelques grands ports restent sous compétence étatique : les cinq grands ports maritimes métropolitains (Dunkerque, Nantes–Saint-Nazaire, La Rochelle, Bordeaux et Marseille), quatre GPM ultramarins (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion), Haropa Port et le port d’intérêt national de Saint-Pierre-et-Miquelon.
600 ports décentralisés
À l’inverse, environ 600 ports sont aujourd’hui décentralisés : 470 ports de plaisance gérés par les communes ou leurs groupements, près de 100 ports de pêche et halles à marée sous autorité des départements et régions, et une cinquantaine de ports de commerce, dont les 18 anciens ports d’intérêt national transférés aux territoires en 2004.
Entre gestion directe et gestion par concession
Pour gérer ces infrastructures, les collectivités peuvent recourir à la gestion directe, encore présente mais en recul, ou à la gestion indirecte par des concessions, délégation de service public ou création de structures dédiées. Les sociétés publiques locales (SPL) permettent un contrôle intégral par les collectivités et bénéficient du régime de quasi-régie, évitant la mise en concurrence pour l’octroi de la concession. Les sociétés d’économie mixte (SEM) associent acteurs publics et privés, en particulier les chambres de commerce et d’industrie (CCI), mais ne bénéficient pas de ce régime.
Deux sociétés portuaires ont vu le jour
Le statut de société portuaire, créé par la loi du 5 janvier 2006, visait à combiner la souplesse des SEM et les avantages de la gestion publique. Ce dispositif permet à une collectivité de créer ou de prendre des participations dans une société chargée de l’exploitation commerciale de ports relevant de son ressort, tout en maintenant la possibilité d’associer les CCI et, le cas échéant, d’appliquer la quasi-régie. Toutefois, son usage est aujourd’hui strictement limité aux 18 ports dont la compétence d’exploitation a été transférée aux régions et départements en 2004. Seules deux sociétés portuaires ont vu le jour : BrestPort (2021) et Port Bayonne (2024).
La société portuaire un outil souple
Pour Liliana Tanguy, cette restriction n’a plus lieu d’être. Elle a souligné en commission que « la différence de traitement entre les 18 ports anciennement d’intérêt général et les autres ports décentralisés n’a plus de justification », estimant que la société portuaire constitue « un outil souple et utile pour le développement et la gestion des ports maritimes en France ».
Une entrée en vigueur en 2026
L’article unique de la proposition de loi étend donc la possibilité de recourir à ce statut à l’ensemble des ports relevant des collectivités territoriales, qu’ils soient de commerce, de pêche ou de plaisance. Le texte a été adopté en commission sans modification, signe d’un large consensus autour du dispositif. Sauf amendement introduit en séance publique, l’adoption conforme du 9 décembre devrait conduire à une entrée en vigueur du dispositif dès 2026.

