Corridors et logistique

Conteneurs : la fin de l’abondance pour les compagnies maritimes

Les observateurs s’accordent pour constater la fin de l’abondance dans le transport maritime. Les compagnies maritimes vont devoir s’armer pour faire face à une baisse drastique des taux de fret dans les prochaines semaines. Les perspectives sont pessimistes.

« C’est la fin de l’abondance », a déclaré le président de la République, Emmanuel Macron, en août. « Ce que nous sommes en train de vivre est de l’ordre d’une grande bascule ou d’un grand bouleversement », a-t-il déclaré. La même chose se produit pour le fret maritime. Après les mois où les armements ont accumulé des bénéfices records, les armateurs vont entrer dans une période plus compliquée.

L’atterrissage sera brutal

Cette situation est confirmée par les observateurs. « L’atterrissage se révèle finalement un peu plus brutal que ce que nous avions prévu dans nos 3 scénarios de début d’année, en raison d’un crash de la demande occidentale aux origines à la fois politiques, économiques et techniques », indique Jérôme de Ricqlès, expert maritime chez Upply, dans son analyse publiée en décembre.

L’indice WCI a dégringolé

Un sentiment partagé par les experts du Chargeur. En effet, dans la dernière édition de cette lettre, il souligne que « l’atterrissage en douceur était encore évoqué il y a quelques semaines, de plus en plus d’observateurs du transport maritime doivent se rendre à l’évidence que la douceur n’est pas au rendez-vous. L’indice WCI de Drewry a encore dégringolé le 1er décembre en affichant une baisse de 18 % des taux de fret, à 2192 USD/FEU. »

Faiblesse de la demande

La faiblesse de la demande au niveau mondial impacte fortement les taux de fret. Les chiffres sur les liaisons Europe-Asie attestent de cette baisse. Effectivement, à fin octobre, les volumes sur ce trade sont en retrait de 13,2% à 18 MEVP, selon Container Trade Statistics. Sur le seul mois d’octobre, les flux entre l’Europe et l’Asie, en eastbound et westbound, ont perdu 15,7% à 1,7 MEVP. Depuis le mois de février, les trafics entre les deux continents ne cessent de décroître.

Moins de baisse ailleurs

Sur les autres routes, la baisse est moins brutale mais se poursuit. Ainsi, entre Shanghai et Gènes, qui reflète le marché pour la Méditerranée occidentale, l’indice WCI de Drewry perd 5%, à 3221 USD/FEU. « L’écart entre les deux portes d’entrée d’Europe occidentale se creuse. Le cabinet Drewry dit toutefois s’attendre à de plus faibles réductions des taux de fret hebdomadaires au cours des prochaines semaines. On notera que les tarifs sur le Transatlantique dans le sens Est-Ouest demeurent à des niveaux élevés aberrants (7224 USD/FEU) et tendent à se maintenir », indique la newsletter du Chargeur.

L’exceptionnel d’hier devient la normalité

Dans ces conditions, l’avenir reste incertain. L’exceptionnel d’hier devient la normalité d’aujourd’hui, selon Jérôme de Ricqlès. « Les esprits s’habituent à ce que le « Liner Shipping » deviennent du « semi liner », avec toutes les incertitudes que cela fait peser sur les délais, engendrant en cascade une désorganisation des supply chains. » Il attend une nouvelle détérioration des services au dernier trimestre, « de mauvais augure pour cette année 2023 qui s’annonce bien compliquée. »

La hausse des blanks sailings

Une opinion partagée par le Chargeur qui prédit une année 2023 « extrêmement difficile ». CMA CGM a estimé publiquement que les taux de fret vont continuer à baisser jusqu’à la fin de l’année (au moins). Les blank sailings sont en hausse à l’approche des fêtes : on attend une réduction de deux tiers des services sur le Transatlantique et la moitié sur le Transpacifique dans la période précédant Noël, indique la dernière édition de la newsletter Le Chargeur.