Ports

Amérique du Sud : une stratégie portuaire continentale

Dans une tribune publiée par Portal Portuario, l’avenir du système portuaire sud-américain est clairement posé. Avec des projets de hubs portuaires dans chaque pays, les responsables appellent à ne pas ignorer les ports de second rang et d’avoir une stratégie portuaire continentale.

En Amérique du Sud, la définition d’une stratégie portuaire doit prendre en compte les développements actuels. Dans son étude, Portal Portuario rappelle que Eduardo Frei Ruiz-Tagle, président du Conseil des politiques des infrastructures (CPI) au Chili, a insisté sur la nécessité de disposer d’un mégaport, sorte de hub, dans chaque pays « depuis le canal de Panama jusqu’à la Terre de feu en passant par le Pérou, le Chili, l’Équateur et la Colombie. Il faudra construire, au moins, un méga port ou un port pour accueillir les navires de dernière génération. »

Des projets de mégaports à l’est et à l’ouest

Un appel à améliorer l’infrastructure portuaire qui est déjà en cours. En effet, au Pérou, le projet actuellement développé par Cosco à Chancay prend forme. Celui de San Antonio au Chili avance tout comme celui de Uraba en Colombie. Ces projets sont dimensionnés pour combiner zones logistiques, multimodalité et accueil de grands navires. Leur objectif est avant tout d’attirer les lignes maritimes depuis l’Asie, notamment la Chine, directement dans ces pays plutôt que de voir les conteneurs transbordés dans les hubs d’Amérique centrale avant de rejoindre leur destination finale. Au total, le continent a dans ses cartons une quinzaine de projets tant sur la côte ouest que la côte est, selon Portal Portuario

Quid des ports de plus faible tirant d’eau ?

Cependant, une opinion qu’il faut modérer. Alors, Eduardo FreiRuiz-Tagle s’interroge sur l’objectif assigné à ces grands ports et le rôle que tiendront les ports avec des tirants d’eau plus faibles. De plus, continue le président du CPI, « le futur du paysage portuaire sud-américain sera-t-il de n’avoir que des grands hubs pour répondre aux défis du commerce international ? » Et, la réponse, tirée des réflexions des experts, s’oriente plus vers une diversité. « L’avenir du système portuaire latino-américain ne sera pas nécessairement ancré dans une réflexion à grande échelle. »

Outre les infrastructures, le besoin d’harmonisation et de digitalisation

Parmi les réponses, le président de DP World, le Sultan Ahmed Bin Sulayem, a rappelé que « l’Amérique du Sud souffre d’un grave déficit d’infrastructures qui entrave les échanges commerciaux ». Et pour aller plus loin, le président du manutentionnaire de Dubaï a souligné que les infrastructures constituent un volet mais des points comme la standardisation, l’harmonisation, la digitalisation et la simplification des procédures du commerce extérieur demeurent tout aussi importantes.

Un paysage portuaire dimensionné aux volumes

Dans le même ordre d’idée, Ricardo Sanchez, expert portuaire auprès de la Cepal (Commission économique pour l’Amérique Latine, dépendante de l’ONU), répète que les pays sud-américains ont déjà largement investi dans les ports. « Le paysage portuaire sud-américain est dimensionné aux volumes », ajoute Ricardo Sanchez. Pour l’avenir, les ports doivent davantage travailler sur leur productivité.

Ne pas oublier les ports plus modestes

Déjà, se dessine une double stratégie avec d’un côté le besoin de mégaports et d’un autre côté le besoin d’une meilleure productivité et efficacité. Disposer de ports pour accueillir les navires de dernière génération peut paraître utile mais ne doit pas faire oublier le besoin de disposer et de continuer à investir dans les ports de taille plus modeste.

Le besoin d’une coopération continentale et régionale

Dans ces conditions, le sentiment général qui ressort des différents responsables portuaires du continent fait ressortir le besoin d’une coopération portuaire continentale. Edgar Patiño, ancien président de l’Autorité portuaire nationale du Pérou, rappelle qu’aucun port ne dispose de suffisamment d’envergure pour se prétendre être un hub pour l’ensemble du continent. Manuel Hinojosa, actuel président de l’autorité portuaire nationale du Pérou, abonde en ce sens. « Les ports sont comme les organes du corps. Ils ne sont pas en concurrence mais bien en complémentarité pour que le corps fonctionne bien. Nous devons présenter un système portuaire régional. Tous les ports sont importants et tous doivent participer au développement économique de la région ». De plus, cette coopération doit aller encore plus loin pour René Puche, président de l’autorité portuaire de Barraquilla : « le futur du paysage portuaire sud-américain passera par la multimodalité et la coopération pour permettre une connectivité agile et sûre ».