Corridors et logistique

Israël-Iran : le détroit d’Ormuz n’est pas menacé

L’attaque israélienne sur le territoire iranien affole la sphère maritime. Le maintien de la navigation dans le détroit d’Ormuz demeurera.

Dans la nuit du 12 au 13 juin, Israël a tiré des missiles de type Shaded sur des sites d’enrichissement d’uranium en Iran. Les communiqués du gouvernement iranien indiquent que ces missiles ont touché un quartier résidentiel. Des civils sont morts, dont des enfants, à la suite de ces attaques. L’Iran a riposté dès le lendemain avec des tirs de missiles sur Jérusalem et Tel Aviv.

Pas d’intervention de l’Iran sur Ormuz

Passé ce drame humain, les observateurs s’interrogent sur le maintien de la navigation dans le détroit d’Ormuz. Dans son analyse publiée le 13 juin, le consultant britannique Drewry soutien que l’Iran n’interviendra pas sur le détroit. « Une telle mesure (la fermeture du détroit d’Ormuz, ndlr) aurait de graves répercussions sur les marchés pétroliers mondiaux. Le détroit assure 37 % des flux de pétrole brut. De plus, les solutions viables pour le contourner sont extrêmement limitées. Tous les principaux producteurs de l’OPEP au Moyen-Orient – l’Arabie Saoudite, l’Iran, les Émirats arabes unis, le Koweït et l’Irak – dépendent fortement du détroit pour leurs exportations de brut. »

Une baisse de 11 Mb/j en cas de blocus du détroit d’Ormuz

Fermer le détroit d’Ormuz par des attaques sur des navires est une opération qui affectera tous les pays de la région. Certes, le Koweït, l’Irak et l’Arabie Saoudite disposent d’alternatives terrestres pour exporter leur pétrole. Cependant, cette solution ne permet pas d’assurer un volume d’export identique. Selon les chiffres de Drewry, le blocus complet d’Ormuz signifie une diminution de 11 Mb/j.

Un effet pour les pays d’Asie

De plus, cette opération touchera en premier lieu les pays acheteurs de brut depuis les pays du golfe Persique. En effet, 86% de ces pays exportent leur produit vers la Chine, le Japon et l’Inde. Or, dans la géopolitique actuelle, ces pays apparaissent plutôt dans le camp des pays « amis ». En effet, ces pays ne sont pas considérés au premier rang des soutiens politiques d’Israël. En outre, les décisions des pays de l’Opec+, dont l’Irak, le Koweït et l’Arabie Saoudite sont membres, ont décidé de réduire la production. Alors, bloquer le détroit d’Ormuz a des effets limités en raison de cette baisse.

Une fermeture complète du détroit d’Ormuz peu probable

Dans ces conditions, « une fermeture complète par l’Iran reste peu probable », souligne Drewry. Cependant, perturber la navigation dans le détroit d’Ormuz entraînerait une baisse de l’offre et, par voie de conséquence, une hausse du prix du baril. De plus, la baisse d’une demande liée à la hausse du prix du pétrole brut aura un impact sur les taux de fret des pétroliers, indique Drewry.

Les effets négatifs du blocus pour les armateurs

Cependant, toute perturbation de ce type entraînerait un resserrement significatif de l’offre mondiale de pétrole brut, ce qui ferait grimper les prix du pétrole à des niveaux record. Déjà, le 13 juin, le prix du baril a gagné 9% en quelques heures. Les volumes d’échanges de brut diminueraient fortement, entraînant une baisse substantielle de l’utilisation des pétroliers et, par conséquent, une chute brutale des taux de fret sur l’ensemble du marché des pétroliers.

Une refonte des schémas de la logistique pétrolière

Cette position reste néanmoins critiquable. Dans l’hypothèse d’attaques contre les navires dans le détroit d’Ormuz et d’une fermeture partielle, les schémas logistiques pétroliers seront revus. Cela peut signifier de changer de sourcing avec, à la clé, une hausse de la demande de tonnage. Pour les armateurs, ces modifications auraient des effets positifs avec des voyages plus longs et donc des taux de fret plus élevés.

 Conteneurs : ne pas bouger

Quant aux armements opérant dans la conteneurisation, ils peuvent jouer la carte du risque important et ainsi conserver des services maritimes par le sud de l’Afrique. En effet, le retour des liaisons par le canal de Suez suppose une stabilité régionale. Or, si l’Iran attise les tensions, les Houthis peuvent tout autant reprendre leurs tirs. Pour les armateurs, la situation politique plaide en faveur du maintien des services par le cap de Bonne-Espérance. Une situation qui leur permet de conserver leur rentabilité. D’autre part, en optant pour la route du sud, ils évitent la surcapacité endémique.