Juridique et social

Les grèves dans les ports exaspèrent

Après les transporteurs routiers, les chargeurs et les commissionnaires s’inquiètent de la situation sociale dans les ports français.

Le mouvement social dans les ports irrite le monde économique. Avec une action « Ports morts » de 48¨heures les 30 et 31 janvier, le principal syndicat des dockers, la FNPD CGT annonce des mouvements perlés. Ainsi, du 4 février au 28 février, les dockers appellent à un débrayage de quatre heures. Un mouvement qui se fera un jour sur deux (les 4, 6, 10, 12, 14, 18, 20, 24, 26 et 28 février). La principale revendication tient à l’application de la réforme des retraites au métier.

Une mauvaise publicité pour les ports français

Or, ces arrêts de travail handicapent l’organisation de chaque port. Pour les milieux économiques, c’est une « mauvaise publicité pour les ports français. » Face à ces mouvements, les professionnels des places portuaires s’inquiètent et s’énervent. Déjà, le 28 janvier, les transporteurs routiers, au travers de la FNTR, ont montré leur inquiétude. Ils sont suivis par les transitaires et les chargeurs.

Des impacts allant jusqu’à l’arrêt d’activité de certaines entreprises

Ainsi, l’AUTF s’inquiètent de l’agenda choisi par le syndicat. « Dans un contexte économique déjà tendu, les grèves portuaires annoncées se présentent comme un signal inquiétant alors que s’ouvrent, prochainement, les réflexions sur la Stratégie Nationale Portuaire. » Pour l’organisation des chargeurs, ce mouvement exaspère. Elle rappelle que ces mouvements ont un impact pour l’organisation des flux d’approvisionnement des entreprises. « Pour les entreprises importatrices/exportatrices françaises, les conséquences de tels mouvements se traduisent (…) par des dérèglements de flux, des ruptures de chaînes logistiques et des arrêts d’activité (…) qui entraînent la désorganisation (voire, à terme, la démobilisation) des ressources humaines, la déstructuration des liens avec les prestataires, en plus de lourds surcoûts de production et de la perte de clients », indique un communiqué de l’organisation.

Le déroutement de trafics vers les ports étrangers

Outre ces perturbations, l’AUTF note un risque de répercussions économiques. « La récurrence de ces grèves peut entraîner le déplacement des flux et activités des chargeurs vers les ports européens et étrangers, fragilisant à terme le rayonnement et l’attractivité économique français. » Un déroutement de trafics qui s’opère déjà, avec ou sans grèves. Outre les questions d’organisation, les mouvements peuvent entraîner des coûts financiers supplémentaires liés aux surestaries, frais de stationnement et délai d’attente pour la dépose et le retrait de conteneurs. Dans ces conditions, l’AUTF demande « une juste répartition des coûts, ainsi qu’à davantage de transparence en la matière. »

Des répercussions systémiques

Cette exaspération des chargeurs semble contagieuse. L’Union TLF, regroupant les commissionnaires, « tire la sonnette d’alarme ». L’organisation parle de situation critique pour les ports. « Cette situation s’inscrit dans la continuité d’une année 2024 déjà marquée par de nombreux jours d’arrêt. Elle engendre des répercussions économiques systémiques pour les transporteurs et à l’échelle nationale. »

Des surcoûts opérationnels de 23%

Et déjà, elle prépare l’addition. Selon les adhérents de TLF, ces mouvements engendrent 23% de surcoûts opérationnels, 21% de perte de chiffre d’affaires et 25% de perte sur le mois de février. Quant aux impacts, ils se déclinent sur les transporteurs terrestres avec des temps d’attente allongés et des surcoûts opérationnels qui « menacent leur pérennité. » En outre, ces mouvements engendrent une perte de « souveraineté logistique. En effet, plus de 40% des conteneurs à destination de la France transitent par les ports concurrents européens. »

Trois mesures pour une action urgente

Dans ce contexte, l’Union TLF demande un plan d’action urgent. Il doit s’articuler autour de trois mesures à prendre à court terme. Elles sont :

  • La limitation des surcoûts pour les acteurs de la chaîne logistique. Une mesure qui doit prévoir l’extension des temps de franchises, des frais de stationnement, la suspension des frais d’annulation de rendez-vous sur les terminaux portuaires, et l’adoption de mesures de soutien aux entreprises fragilisées par ces perturbations;
  • L’activation de mesures pour permettre aux entreprises de travailler. Il peut s’agir de la mise en place de rendez-vous supplémentaires sur les horaires travaillés, ainsi que de moyens supplémentaires et, éventuellement, la levée des interdictions de circulation certains week-ends;
  • Enfin, le lancement d’un travail de fond sur le rôle stratégique des ports français dans la chaine logistique internationale. Une ambition plus forte doit être donnée au renforcement de la compétitivité logistique des ports français. Il s’agirait de recenser les leviers et les freins pour faire des ports français un atout stratégique. A minima, les acteurs logistiques attendent une transparence sur les indicateurs de performance logistique des ports.