Politique

Les alliances maritimes mises à l’index par l’administration de Joe Biden

Dans son discours sur l’état de la Nation, le président des États-Unis, Joe Biden, doit annoncer des mesures contre les alliances d’armateurs. Le World Shipping Council a réagi.

Le discours annuel du président des États-Unis sur l’état de la Nation devant les sénateurs attendu pour le 1er mars doit aborder, notamment, la question des alliances armatoriales. La Maison blanche a publié, le 28 février, un document pour expliquer la position de l’administration Biden-Harris.

Des hausses de 100% en deux ans

Dans le document diffusé par la Maison blanche, il est reproché aux armateurs d’avoir profité de la pandémie pour augmenter « outrageusement » les taux de fret entre les États-Unis et l’Asie. « Les armateurs ont augmenté les taux de fret entre les États-Unis et l’Asie de 100% depuis janvier 2020. De plus, les chargeurs se voient imposer des surcharges alors même qu’ils ne peuvent accéder à leurs boîtes », continue le document. Et cet état de fait est appuyé par une enquête menée par la Federal Maritime Commission entre juillet et septembre. Les huit premiers armements mondiaux ont demandé le payement de 2,2 Md$ de surcharges aux chargeurs, soit une augmentation de 50% comparativement au trimestre précédent.

Des pratiques contreproductives pour les américains

Ces pratiques sont dénoncées par l’administration américaine comme contrevenantes à la compétitivité des produits américains. L’administration américaine estime que les armateurs préfèrent retourner en Asie à vide plutôt que de charger des conteneurs américains. « Une pratique difficile à comprendre pour les agriculteurs qui ont bâti pendant des années des relations avec les marchés internationaux. Ils ne peuvent plus exporter leurs produits ni disposer d’une fiabilité de services ».

Renforcer les pouvoirs de la FMC

Dans ce contexte, l’administration de Joe Biden a prévu de renforcer le pouvoir de la FMC et du département d’État de la justice. Ces deux administrations vont renforcer leur coopération. Le ministère de la justice va nommer des juges spécialistes des questions concurrentielles pour apporter une aide à la FMC. Pour sa part, la FMC apportera une aide technique sur ces dossiers.

Donner plus d’outils à l’administration

De plus, l’audit entrepris depuis le mois de juillet sur les surcharges par la FMC sera renforcé. L’objectif est d’analyser l’établissement et la justification de ces pratiques dès lors qu’une plainte a été déposée. Enfin, le président va demander au Sénat d’entreprendre une réforme législative pour permettre aux administrations de disposer de plus d’outils. Le but final de ces modifications est de faire tomber les exemptions aux règles de concurrence dont bénéficient les armements.

Ne pas diaboliser les armateurs

Sitôt publié, le World Shipping Council (WSC), regroupant les armements, s’est inquiété de ces mesures. Le lobby américain des armateurs considère que ces attaques sont des erreurs de jugement. « Il est malheureux que le président diabolise les armateurs », indique le WSC dans un communiqué. Ils rejettent l’argument selon lequel l’industrie maritime est « concentrée et non compétitive ». Pour les représentants du WSC, les compagnies maritimes sont en concurrence les unes par rapport aux autres.

Plus de navires pour une demande plus importante

Et pour aller plus loin, les armateurs rappellent qu’en 2021, la concurrence s’est accrue, et pour répondre à la demande, « avec plus de navires opérés par les pools d’armateurs notamment sur le Transpacifique ». Et, face à l’argument de l’administration selon lequel les compagnies ont vu leurs bénéfices augmenter de façon importante en 2021, les armateurs répondent que « cela reflète la compétitivité du secteur. Les autorités européennes et américaines ont répété et récemment confirmé que cela est le cas ».

Une réforme profondément imparfaite

Le World Shipping Council souligne que la réforme de l’Ocean Shipping Act, “profondément imparfait”, ne devrait pas résoudre les perturbations logistiques à terre. « En fait, continue le communiqué du WSC, le projet de réforme va aggraver la congestion portuaire et terrestre et étouffer l’innovation ». Il appelle le gouvernement à chercher les causes réelles du problème en renforçant l’intermodalité qui a permis « d’assurer les approvisionnements pendant la pandémie ».