Corridors et logistique

Céréales : les corridors logistiques portuaires depuis l’Ukraine ont traité plus de 700 000 t

L’accord signé le 22 juillet entre l’Ukraine et la Russie sous l’égide de la Turquie et de l’ONU ouvre des corridors pour l’exportation de céréales. Au total, 721 449 t de céréales ont quitté les ports ukrainiens. L’avenir de ces corridors dépend aussi de l’état des infrastructures terrestres pour les pré acheminements portuaires ainsi que des conditions d’assurance.

Le conflit entre la Russie et l’Ukraine a fait craindre une crise alimentaire mondiale. Dans un rapport du 28 juin de la Cnuced, il est rappelé que l’Ukraine et la Russie interviennent à hauteur de 27% du commerce mondial de blé et de 53% pour celui de l’huile de tournesol. Le conflit entre les deux pays, qui touche notamment les installations portuaires d’Odessa, de Mykolaev et de Chornomorsk, a ralenti les exportations de produits agroalimentaires depuis la région.

Un accord signé le 22 juillet

Pour éviter cette crise alimentaire, une Task Force menée par la secrétaire générale de la Cnuced, Rebeca Grynspan, a abouti à la signature d’un accord entre la Russie et l’Ukraine pour ouvrir des corridors logistiques depuis les ports ukrainiens de mer Noire. Signé par les deux belligérants, la Turquie, la Cnuced et l’ONU, cet accord prévoit que des céréales pourront être exportés depuis l’Ukraine après avoir été inspecté dans les ports turcs.

L’aventure du Razoni s’est achevée à Tartous

Le premier navire à avoir quitté un port ukrainien a été le Razoni qui a chargé 26 527 t de maïs dans le port d’Odessa le 1er août. Le navire devait rejoindre le port de Tripoli au Liban après avoir fait l’objet d’inspection dans un port turc, comme le prévoit l’accord. Le navire ne rejoindra pas sa destination prévue. Il a finalement accosté au port de Tartous, en Syrie, le 15 août, après avoir « disparu des radars » pendant trois jours.

Encore 18 navires à charger

Cette odyssée du premier navire n’a pas écorné l’accord signé le 22 juillet. Depuis le 1er août, 719 549 t de céréales sont sorties des silos ukrainiens, selon une dépêche de Reuters du 23 août. Un chiffre que le centre de coordination turc estime pour sa part à 721 449 t. Et selon le ministère ukrainien de l’agriculture 18 autres navires sont en attente de chargement.

5,8 Mt expédiées avant le conflit

À ces chiffres doivent s’ajouter les exportations réalisées depuis les ports des pays voisins comme la Roumanie et la Bulgarie. Les produits agricoles ukrainiens sont acheminés vers ces pays par voie ferroviaire. Des données qu’il reste encore difficile à estimer précisément. Enfin, de juillet 2021, début de la campagne, à février 2022, l’Ukraine a exporté 5,8 Mt de céréales. Un début de campagne tonitruant puisque selon UkrAgroConsult, ce chiffre est en hausse de 37% comparativement à la campagne précédente.

Une baisse des prix des céréales au départ de l’Ukraine

L’ouverture des corridors logistiques depuis les ports ukrainiens a eu pour effet de baisser le prix des céréales. Selon UkrAgroConsult, la tonne de blé, chargement en septembre, se négocie aux environs de 355$. Au départ des ports russes, le prix est estimé à 370$/t. La différence entre les deux tient principalement à l’assurance que les exportations russes se réaliseront face à des incertitudes depuis les ports ukrainiens, indique le consultant ukrainien.

Les autres « casse-têtes » logistiques

En effet, l’ouverture de ces corridors ne doit pas occulter d’autres « casse-têtes » logistiques à venir. Les exportations actuelles concernent des blés qui sont déjà dans les silos portuaires. Avec la nouvelle récolte, le maintien de ces corridors depuis les ports ukrainiens devra prendre en compte la logistique terrestre. Les bombardements russes visant des gares ferroviaires et des infrastructures pourraient compliquer les pré acheminements portuaires.

Des conditions d’assurances dédiées à ces corridors

De plus, si le chargement peut s’opérer, les armateurs peuvent redouter un revirement de position en mer Noire de la part de la Russie. Les assurances corps et facultés vont alors jouer un rôle essentiel dans le maintien de ces corridors. Le courtier en assurance Marsh et les Lloyd’s of London ont créé des conditions d’assurances spécifiques pour ces exportations de céréales ukrainiennes. Elles garantissent à hauteur de 50 M$ les exportations réalisées par les corridors initiés par l’accord.

Des primes allant jusqu’à 5% de la valeur assurée du navire

« Les assurances facultés et risques de guerre vont jouer un rôle essentiel pour les exportations de céréales depuis les ports ukrainiens de mer Noire », a indiqué David Roe, directeur des assurances facultés de Marsh au Royaume-Uni, à l’agence de presse Reuters. Cependant, les primes d’assurance ont connu une inflation importante depuis le début de la guerre pour les trafics avec la mer Noire. Elles sont aujourd’hui d’environ 5% de la valeur assurée du navire contre 0,025% avant le conflit. Un taux qui peut rebuter des opérateurs à envoyer des navires dans la région, voire, faire augmenter le prix des céréales de la région.