Prospectives

Conteneurs : 2023, de l’implosion des alliances à la guerre

Dans son traditionnel document de début d’année, Upply analyse les différents scénarios possibles pour 2023. Pour Jérôme de Ricqlès, expert maritime chez Upply, cette année sera celle de la transformation.

Parallèlement aux cérémonies de vœux, il est un document qui fait autorité pour tous les professionnels de la conteneurisation : les scénarios possibles pour l’année par l’expert maritime de Upply, Jérôme de Ricqlès. Cette année ne coupe pas à la règle. Avant de détailler les scénarios envisagés, Jérôme de Ricqlès averti que le transport maritime conteneurisé « entre dans une nouvelle phase », indique le document de Upply.

Le coup de frein à la mondialisation

Il explique que s’il est encore prématuré de parler de « démondialisation », il faut se résigner à admettre que « la mondialisation connaît aujourd’hui un sérieux coup de frein ». Sur les prochains mois, les compagnies maritimes devront faire preuve d’adaptabilité pour coller aux variations de marché tout en restant rentable. Un défi quotidien que les armements vont devoir relever après avoir investi une grande partie de leurs bénéfices dans des activités connexes en privilégiant l’intégration verticale.

Repenser, restructurer et réduire

Dans son analyse, Jérôme de Ricqlès perçoit les mois à venir sous le symbole des 3R : repenser, à savoir s’adapter aux nouveaux dogmes du trafic conteneurisé. Le deuxième R est pour restructurer. Des restructurations qui vont peser sur la masse salariale. « Il est fort probable que des objectifs de 10% de réduction des coûts salariaux dans les grands groupes soient à l’ordre du jour pour 2023 », prévient l’expert maritime. Le troisième R tient pour réduire. Une réduction qui va concerner principalement la vitesse des navires pour la baisse des émissions mais aussi celle de la consommation de carburant.

L’implosion des Alliances

Dans ce contexte, le premier scénario expliqué par l’expert maritime prévoit l’implosion des alliances maritimes. Cette fin, précise Jérôme de Ricqlès, serait liée à la volonté des membres plus qu’à des obligations règlementaires. La première à imploser pourrait être l’alliance 2M, entre Mærsk et MSC. Plusieurs éléments seront à observer avec l’attitude de Vincent Clerc à la tête de Mærsk et la décision de MSC de vouloir revenir à sa stratégie d’antan de faire cavalier seul. Quant à Ocean Alliance, qui regroupe armateurs européens et chinois, elle pourrait faire les frais des tensions politiques et diplomatiques entre les deux ensembles. Enfin, The Alliance pourrait se consolider autour d’Evergreen si le groupe CMA CGM en sort.

Pas d’amélioration des services

Ce scénario aurait pour les donneurs d’ordre des conséquences importantes. Pour les chargeurs directs (BCO), ces implosions permettraient de disposer de plus de concurrents mais, « l’implosion ne serait pas forcément synonyme d’une amélioration des services », précise Jérôme de Ricqlès. Quant aux commissionnaires, ils pourraient savourer une revanche après la période de diktat des armateurs.

La discipline des armateurs

Le deuxième scénario serait plus consensuel. Il prévoit une discipline des armateurs. Un scénario que l’expert maritime imagine le plus probable. Les Alliances devront accepter de se défaire des capacités au premier semestre avant de revenir à l’offensive sur la seconde partie de l’année « en tablant sur un besoin de reconstitution rapide des stocks en Occident. La logique sous-jacente consiste à limiter la casse sur les corridors Est-Ouest en évitant au maximum de voir les taux de fret descendre sous les seuils de rentabilité, tout en conservant un marché transatlantique en pleine forme le plus longtemps possible. »

Et si un conflit survenait

Le dernier scénario imagine une guerre. Ainsi, dans « cette hypothèse sans doute peu probable mais malheureusement pas irréaliste » ne doit pas être exclue. Dans ce contexte le commerce maritime s’en trouverait bouleversé avec un quasi-arrêt du commerce maritime international. Toutes les questions sur l’utilisation des navires pendant le conflit ou leur mise à l’ancre se posent. Et pour conclure, Jérôme de Ricqlès souligne que « je ne m’étendrai volontairement pas sur ce scénario qui nous éloigne de nos préoccupations d’économie des transports, mais il était de mon devoir de l’évoquer avec un souhait profond de me tromper ».