Juridique et social

Chambre arbitrale maritime de Paris : deux sentences sur le retard et le tirant d’eau

Nous reprenons ci-dessous deux sentences de la Chambre arbitrale maritime de Paris. La première concerne le retard d’un navire. La seconde intervient sur le tirant d’eau d’un port.

Les deux sentences que nous avons choisi de publier, avec la Chambre arbitrale maritime de Paris, sont issues de contrats d’affrètement réalisés sous la charte Partie Synacomex. La première sentence (Sentence n°1252 de la CAMP) concerne un transport de blé depuis la Russie pour la Guinée. Le chargement se déroule sans encombre. Le retard est lié à la délivrance des certificats phytosanitaires. Le navire devra attendre six jours pour disposer des documents.

La responsabilité de l’immobilisation

« La responsabilité de l’immobilisation consécutive du navire est imputée à l’affréteur, en charge de tous les documents relatifs à la marchandise, et l’immobilisation est indemnisée sur la base d’un montant équivalent aux surestaries », indique la Gazette de la CAMP. Les choses se compliquent à l’arrivée en Guinée. Le navire est immobilisé. Une société tierce « se prétendant créancière de l’affréteur demande au tribunal local la saisie du navire. Contre toute attente, la saisie est autorisée et le navire immobilisé pendant près de 16 jours », continue la sentence de la Chambre arbitrale.

Une nécessaire collaboration entre les parties

Dans leur décision, les arbitres ont été confrontés à une situation inédite. Le tribunal arbitral a décidé que la saisie « irrégulière » n’est pas une source de responsabilité pour l’une ou l’autre des parties. « Les arbitres ont alors considéré que la situation très particulière et inédite, à leur connaissance, imposait une nécessaire collaboration entre les parties qui, par leur qualité de professionnels des opérations maritimes, connaissaient le coût d’immobilisation d’un navire et se devaient de contribuer à les réduire. D’un côté, l’armateur, ne pouvait renvoyer la responsabilité de la saisie à l’affréteur ni attendre, comme il l’a fait, pour demander la mainlevée de la saisie. Quant à l’affréteur, en refusant d’accorder une contre garantie, il ne facilitait pas la résolution du conflit. D’où une responsabilité partagée des parties. »

Le tirant d’eau du port de déchargement

La seconde sentence de la Chambre arbitrale maritime de Paris (sentence n°1253) a été contracté sous une charte partie Synacomex pour un affrètement au voyage. Les chartes parties Synacomex prévoient dans leurs clauses de déterminer le tirant d’eau du port de déchargement. Or, en l’espèce, après le chargement, le capitaine du navire adresse à l’affréteur sa prévision de tirant d’eau (9,75m) à l’arrivée présentant une marge de sécurité de près d’un pied par rapport à la limite garantie par l’affréteur. Cependant, le même jour, l’affréteur annonce son intention de désigner un port où le tirant d’eau limite admissible n’est que de 9,30 m. L’affréteur demande à l’armateur si le capitaine peut ajuster en conséquence le tirant d’eau du navire à l’arrivée, soit 0,45 m en dessous de la limite prescrite dans la charte-partie. L’armateur répond qu’il ne pourra descendre en dessous de 9,48 m de tirant d’eau.

Le refus d’entrer dans le port

L’affréteur désigne le port de déchargement comme le seul. Alors, quand le navire se présente en rade du port, l’armateur refuse d’entrer. Affréteur et armateur entrent dans une phase d’échanges. Le premier fait observer que le navire peut entrer, « sur la foi des informations nautiques officielles », précise la CAMP. Une position que l’armateur semble ne pas prendre en compte. « Les autorités portuaires finissent par révéler qu’une marge de sécurité de 0,30 m sur les tirants d’eau officiels permet l’entrée du navire, alors même que le nouveau tirant d’eau réel admissible est inférieur de 5 cm à celui garanti par l’affréteur. » Le capitaine envoie sa notice of readiness, le navire accoste et la cargaison est livrée sans aucun dommage.

Application des taux de surestaries

Face à la demande d’indemnisation pour les jours d’attente de l’armateur, les arbitres de la Chambre arbitrale maritime de Paris (CAMP) accordent cette demande. Le tribunal arbitral accorde cette indemnisation, après avoir relevé la violation par l’affréteur des engagements pris dans la charte. Il décide d’appliquer au retard du navire, ainsi qu’au combustible consommé par le navire, le taux des surestaries prévu dans la charte-partie », concluent les arbitres.