Corridors et logistique

Céréales : la logistique et le conflit ukrainien au centre des préoccupations

Les prévisions de FranceAgriMer pour la fin de la campagne varient peu depuis le mois dernier. Les attentes de l’ouverture d’un corridor céréalier pour l’Ukraine pourraient dénouer la crise alimentaire.

Les prévisions à fin mai de FranceAgriMer tablent sur un volume d’échange de blé tendre de 187,4 Mt dans le monde. Un chiffre en baisse de 2,9% par rapport aux chiffres diffusés au mois de mai. La baisse de superficie en blé aux États-Unis et les conditions de sécheresse dans l’est de l’Amérique du Sud, notamment Brésil et Argentine, ont créé une tension sur les marchés mondiaux. L’espoir d’une ouverture de corridors céréaliers a eu pour effet de faire baisser les contrats à terme.

Des prévisions meilleures pour le blé dur

Sur le blé dur, les volumes d’échanges mondiaux sont revus à la hausse en raison de la production revenue « à la normale » au Canada. L’épisode de chaleur extrême de l’an passé avait fait chuter la production. Les prévisions pour cette année sont meilleures. Quant aux orges, les perspectives restent identiques d’un mois sur l’autre avec un volume de 11,5 Mt pour l’Union européenne.

Un niveau de prix compétitif pour le blé français

Le marché français reste actif sur cette fin de campagne. Avec un prévisionnel exporté de 17,2 Mt pour cette campagne, soit une hausse de 26% par rapport à la campagne précédente, les flux de blé tendre restent en progression. « Le prix du blé français reste à un niveau compétitif », indiquent les responsables de FranceAgriMer. Des exportations qui se répartissent à 52% vers les pays tiers et à 48% vers le marché européen.

Une hausse des exportations de maïs

Du côté des orges, les derniers chiffres font état d’une légère baisse d’un mois à l’autre à 6,08 Mt exportées dont 3,3 Mt vers les pays tiers et 2,7 Mt en direction des pays de l’UE. Enfin, le maïs devrait voir ses exportations croître de 25% d’une campagne à l’autre, notamment grâce à l’augmentation de 25% des trafics destinés à l’UE qui sont estimés à 5 Mt. Sur les pays tiers, les flux devraient s’établir à 600 000 t.

Les négociations pour les corridors céréaliers toujours en cours

Ces capacités d’exportation depuis le marché français n’atténuent pas les craintes sur le marché mondial. L’annonce d’ouverture de négociation en Turquie de corridors céréaliers a permis de détendre quelque peu les prix sur les marchés internationaux. Menées sous l’égide de l’ONU entre l’Ukraine et la Russie, ces négociations sont destinées à ouvrir des corridors sûrs pour exporter les volumes de céréales dans les silos portuaires ukrainiens.

L’arme alimentaire de Vladimir Poutine

Un espoir que les responsables de FranceAgriMer relativisent. Ces négociations n’ont toujours pas abouti. « Vladimir Poutine utilise l’arme alimentaire dans ce conflit. L’explosion de silos dans le port de Mykolaev a montré la pression que Moscou peut exercer », continuent les responsables de FranceAgriMer.

Les ports toujours minés

De plus, les ports céréaliers de mer Noire restent toujours difficiles d’accès en raison des mines posées par l’Ukraine et par la Russie. « Déminer les ports et réactiver les infrastructures portuaires ne se fera pas du jour au lendemain. Même si les négociations devaient aboutir, il faudra attendre plusieurs semaines avant de pouvoir exporter les premières tonnes de céréales », souligne Marc Zribi, responsable de l’unité grains et sucre de FranceAgriMer.

Le terrestre ne compense pas le maritime

L’utilisation de corridors terrestres ne permet pas d’évacuer un volume suffisant. En effet, le conflit restreint la capacité routière d’exportation en raison du manque de chauffeurs disponibles. De plus, selon les chiffres publiés récemment par le ministère de l’agriculture ukrainien, le fret depuis l’Ukraine vers Constanta, port le plus proche signifie une hausse de 30€/t. Vers le port de Hambourg, destination la plus éloignée, le surcoût est estimé à 55€/t. Dans un marché déjà tendu, ces surcoûts sont importants.

Des prévisions de récolte en retrait en Ukraine

Et les prévisions de récolte en 2022 de l’Ukraine demeurent en retrait de 36,4% en 2022, par rapport à la campagne précédente à 47,4 Mt. Du côté de la Russie, les prévisions de récolte sont en nette progression pour le blé de 9,7% à 83,5 Mt. Les exportations de blé russe pourraient passer de 32 Mt sur la campagne actuelle à 39 Mt pour la prochaine campagne. Des chiffres qui doivent malgré tout être nuancé en fonction des capacités logistiques de la Russie à pouvoir utiliser ses ports, franchir le Bosphore et toujours disposer de marchés malgré les sanctions.