Les ports européens demeurent sous le contrôle d’autorités publiques
L’Espo a publié une étude sur l’évolution de la gouvernance des ports en Europe. Elle montre le poids important des opérateurs publics dans la gestion portuaire. Des changements se réalisent peu à peu vers un nouveau rôle dédié aux ports européens.
L’étude de l’Espo sur la gouvernance des ports en Europe a été réalisée auprès de 72 ports de 20 pays de l’UE et de Norvège. Elle résume les grandes tendances actuelles dans les évolutions de la gouvernance.
Le rôle prépondérant du public
Le premier élément nouveau de cette enquête montre une progression de la part d’autorités publiques dans la gestion des ports. Les ports sont gérés à hauteur de 93% par des entités publiques contre 87% lors de la précédente enquête de 2016. Une différence qui s’explique notamment par le départ des ports britanniques du scope de cette enquête. En Grande-Bretagne, les ports sont principalement sous le contrôle de sociétés privées. Ces autorités sont sous le contrôle de l’État dans 50% des cas et sous celle d’une municipalité dans 25%. Les 25% des cas restants sont attribuées à des autorités publiques différentes.
Entre société privée et objectifs publics
La majorité des autorités portuaires sont établies sous une forme hybride. Elles doivent respecter les conditions commerciales des sociétés privées comme la transparence financière et son imposition tout en étant assujetties aux aléas des changements d’administration. « Le degré d’interférence du secteur public dans la gestion portuaire varie beaucoup d’un port à l’autre », indique l’enquête de l’Espo.
La privatisation en grèce
Les évolutions des ports du Pirée en Grèce et de celui de Klaïpeda montrent ces tendances. En effet, depuis 2016 Cosco dispose de 61% des parts du port du Pirée. Une participation que le groupe chinois a portée à 67% en 2021. Dans le même ordre d’idée, le gouvernement grec a cédé 67% des parts de la société en charge de la gestion du port de Thessalonique. Dans le même temps, en Lituanie, l’autorité portuaire de Klaïpeda sera transformée au 1er janvier 2023 en une société contrôlée par l’État à 100% cotée en bourse. Une nouvelle structure qui est destinée à éviter à l’autorité portuaire d’être dépendante des changements politiques.
Combiner gestion financière et intérêt général
L’étude l’Espo de 2022 montre aussi le caractère hybride des autorités portuaires dans le marché actuel. En premier lieu, les ports se reconnaissent une mission d’intérêt général qui est plus importante en 2022 qu’elle ne l’était en 2016. En second lieu, les autorités portuaires doivent avoir une gestion financière indépendante et durable avec l’objectif d’apporter de la valeur ajoutée pour toute leur communauté, même au-delà de leur circonscription. Et l’Espo de citer le cas du port de Rotterdam qui se conforme aux principes financiers applicables aux sociétés privées tout en se focalisant sur l’impact social et économique du port.
Le rôle stratégique des ports
Dans ce contexte de port au service de la communauté, le rôle stratégique du port est devenu essentiel pour les autorités portuaires. Ces fonctions stratégiques intègrent les opérations liées à la supply chain mais aussi le stockage de produits alimentaires, le transport de personnes, ou encore les activités liées à l’énergie. L’enquête montre que la pandémie a surtout révélé l’importance stratégique des ports plutôt que de changer leur rôle. En outre, les ports doivent être des acteurs de la transition écologique.
L’environnement est devenu essentiel
Dans cette étude, le rôle des ports tend à se diversifier. Dans l’enquête menée en 2022, il ressort que les ports jouent d’abord un rôle dans la sécurité et la sûreté. L’environnement est aussi entré dans le scope d’activité des ports. Pour 52% des autorités portuaires qui ont répondu au questionnaire, elles jouent un rôle dans la mise en place des règlements nationaux à leur espace. De plus, la majorité des autorités portuaires reconnaissent aller au-delà des règlementations nationales dans l’application des textes.
Projet stratégique : un exercice de consultation générale
Parmi le rôle de ces autorités portuaires, la réalisation d’un projet stratégique est devenue un élément essentiel. En 2016, 64% des autorités portuaires déclaraient réaliser un projet stratégique. Elles sont 85% dans l’enquête menée en 2022. « Pour les autorités portuaires, il est devenu impossible de réaliser un projet stratégique sans consulter les principaux acteurs portuaires. Les développements de ces acteurs doivent être pris en compte », indique l’enquête de 2022. Alors, pour la bonne marche de ce processus, l’Espo indique l’implication de tous les niveaux administratifs mais aussi, les citoyens, les organisations non gouvernementales, les représentants de la communauté portuaire et les employés des ports.
Développement de la coopération portuaire
L’étude aborde d’autres sujets à l’image de la coopération entre les ports. Il ressort des résultats que plus de la moitié des autorités portuaires gèrent plus d’un port, comme cela peut être le cas pour Haropa, l’autorité portuaire de Valence, Anvers et Zeebrugge ou encore les ports Ligurie (Gênes, Savone et Vado Ligure). Cette étude démontre aussi du poids des acteurs privés dans les services portuaires comme la manutention ou encore les opérations de transport. Le pilotage et le lamanage demeurent, pour leur part, en majorité entre les mains des autorités publiques.
L’énergie de la transformation
Enfin, l’étude de l’Espo pointe du doigt le rôle de l’énergie dans les ports. D’une part, les trafics d’énergie fossile comme le pétrole ou le GNL sont en baisse. Si ces volumes restent encore importants, pour 39% des ports, les trafics liés à l’énergie représentent entre 10% et 30% du volume global. Le nombre de ports dont le volume des produits énergétiques représentent plus de 30% est en baisse. Dans le même temps, les ports restent des lieux de production d’énergie. Si les raffineries demeurent les enceintes portuaires, les autorités portuaires sont devenues des lieux de production d’énergie solaire, éolienne et de biomasse.