Les effets de la présidence de Donald Trump sur les flux agricoles
Une étude de Farm Europe détaille les conséquences de taxes que Donald Trump pourrait imposer à son arrivée à la Maison blanche.
Le candidat Donald Trump a répété à l’envi pendant la campagne électorale qu’il demanderait l’application de taxes sur de nombreux produits à l’importation, notamment ceux originaires de Chine. S’il vise principalement l’automobile, l’acier ou l’habillement, les produits agricoles ne sont pas exclus.
Des risques de friction commerciale
Pour Farm Europe, « la deuxième présidence Trump qui s’annonce peut avoir des conséquences dramatiques sur l’agriculture de l’UE, tant sur le plan commercial que sur le plan politique. » L’auteur, Joao Pacheco, explique que l’arrivée de Donald Trump générera des risques de « frictions commerciales ». Ils se portent tant au niveau économique que politique.
Deux scénarios envisagés
Ainsi, selon Farm Europe, plusieurs scénarios sont à envisager. Le premier serait de voir une hausse générale des droits de douane à 10%. Une mesure qui vise tous les pays. Une hypothèse peu probable selon l’auteur. En effet, si les États-Unis protègeraient leur économie, des rétorsions par les pays concernés. De plus, les exportations américaines subiraient de plein fouet les conséquences de ces mesures. « L’UE riposterait très certainement en augmentant les droits de douane et en réduisant ainsi les importations américaines », souligne Joao Pacheco. Or, cette solution serait malgré tout préjudiciable pour les pays de l’UE. La balance commerciale avec les États-Unis est actuellement excédentaire. En perdant des marchés, l’UE verrait sa balance commerciale fondre.
Des mesures qui visent les produits agricoles
Un autre scénario imagine une hausse des droits de douane visant principalement la Chine et certains pays et produits. L’objectif vise à relocaliser une partie de l’industrie sur son territoire et donc « protéger des secteurs sensibles ». Une hypothèse qui viserait, en Europe, l’automobile, l’acier et certains produits agricoles. Et l’auteur rappelle que « Trump s’est montré virulent à l’égard de l’UE pour avoir restreint les exportations de produits alimentaires américains. »
Trois solutions face à ce scénario
L’application de ce scénario impliquerait trois solutions. En premier lieu, les deux parties refusent de bouger et les droits de douane élevés demeurent. En deuxième lieu, par mesure de représailles, l’UE et les États-Unis alimentent une guerre commerciale avec des mesures de rétorsion. Chaque rétorsion amènerait une mesure plus forte par la partie adverse. La troisième voie serait de voir un règlement négocié. « Ce scénario pourrait être plus attrayant pour la nouvelle administration. Il lui permettrait d’exercer des pressions et de se contenter d’un accord mieux négocié », souligne l’auteur.
L’UE entre la Chine et les États-Unis
Cependant, peu importe le scénario, une chose est certaine : la future administration américaine appliquera des hausses sur certains produits à l’entrée, notamment depuis la Chine. Dans ce contexte, l’Empire du milieu devra recentrer ses exportations vers d’autres marchés. « L’UE se sentirait probablement obligée de se protéger, et pourrait même le faire dans le cadre d’un accord avec les États-Unis. La Chine, quant à elle, ne resterait pas les bras croisés pendant que ses exportations sont prises pour cible. Ainsi, les exportations agricoles de l’UE pourraient facilement figurer sur la liste des mesures de rétorsion de la Chine. »
L’impact sur le Green Deal
Outre l’impact sur les flux céréaliers, des mesures douanières imposées par l’administration américaine peuvent avoir des effets sur la politique environnementale de l’UE. Pour mémoire, dans le cadre du Green Deal, l’UE a mis en place deux systèmes : le SCEQE (système d’échange de quotas d’émission) et le MACF (mécanisme d’ajustement carbone aux frontières). Le premier est un mécanisme qui limite et fixe le prix des émissions de carbone au sein de l’UE. Ainsi, il créé un marché pour les quotas d’émission. Le second permet d’égaliser les coûts du carbone pour les produits importés, en appliquant une taxe différentielle à la frontière. Des systèmes qui auront un impact, à partir de 2026, sur les importations d’engrais. « La nouvelle administration américaine prendra très probablement des mesures de rétorsion. Certains républicains sont prêts à imposer des taxes carbone sur les importations, ce qui concernerait surtout la Chine. Cependant, ils n’accepteront jamais que les exportations américaines soient taxées pour cette raison. »
Conserver les objectifs du Green Deal ?
Il paraît peu probable que les États-Unis, voire la Chine et l’Inde laissent l’UE agir unilatéralement sans mesures de rétorsion. Alors, l’Europe se retrouve face à un dilemme, continue Joao Pacheco : « soit l’UE va de l’avant avec le Green Deal et accepte qu’une grande partie de ses industries soit mise dans une situation difficile en raison de coûts plus élevés de production et d’exportations plus faibles. (…) Soit l’UE suspend l’application des éléments essentiels du Green Deal, à commencer par le système d’échange de quotas d’émission et le mécanisme de garantie des crédits carbone. »
Réoutiller la stratégie environnementale
Ces mécanismes ne concernent pas uniquement l’industrie, l’agriculture sera également sur la sellette. Les engrais seront visés par les systèmes européens. Ainsi, la future administration américaine peut engendrer des conflits commerciaux, notamment sur les produits agricoles. D’un autre côté, cette situation « ouvre la possibilité de réoutiller le Green Deal pour lutter contre le changement climatique sans réduire notre bien-être, en passant à une approche technologique et incitative. »