Social : une loi britannique sur le dumping social insuffisante
Le 24 mars, le Seafarers’ Wages Act est entré dans le corpus juridique britannique. Il donne des outils pour lutter contre le dumping social, notamment pour les navires opérant en Transmanche. Pour le syndicat Nautilus International, ces mesures ne vont pas assez loin. En France, l’Assemblée nationale discute le 27 mars, un texte de loi sur le sujet.
Un an après le licenciement de 800 marins de P&O Ferries, le dumping social revient en force. De chaque côté de la Manche, les législateurs ont pris le sujet à bras le corps. Dans un premier temps, ce sont les Britanniques qui ont dégainé en premier en adoptant, le 24 mars, un texte sur le sujet : le Seafarers’ Wages Act. Ce texte prévoit une protection contre les abus d’emploi dans les navires britanniques. Ce texte se veut une réponse « au licenciement de 800 marins sans préavis », indique le législateur.
Le Seafarers’ Wages Act en neuf points
Cette protection se dresse au travers de neuf points :
- Les navires qui utilisent régulièrement les ports britanniques doivent payer les marins au salaire minimum national ;
- Les ports anglais pourront suspendre l’accès aux opérateurs de ferries qui ne payent pas les marins au salaire minimum ;
- Le gouvernement s’engage à travailler avec ses partenaires internationaux pour prévoir une protection et un salaire minimum pour les marins non britanniques ;
- Il est prévu que des ressources soient prévues pour que les salaires minima soient appliqués ;
- Les garde-côtes continueront leur politique pour appliquer les textes ;
- Il est prévu de créer un texte pour les pratiques de « licenciement et de réembauche » et les manquements à l’obligation de consulter les travailleurs ;
- Prendre des mesures contre les dirigeants qui contreviennent à la loi;
- Améliorer les conditions de travail des marins ;
- Encourager l’enregistrement sous pavillon britannique des navires.
Aller encore plus loin
Pour le syndicat britannique de marins, Nautilus International, ce premier train de mesure permet de garantir aux marins travaillant sur des navires opérant dans les ports britanniques un salaire minimum. Toutefois, continue le syndicat, il estime que le gouvernement doit prendre d’autres mesures pour remédier à la situation. Pour cela, il milite en faveur « d’une charte obligatoire des marins, soutenue par des accords bilatéraux avec les pays voisins, qui garantisse des salaires et des schémas de rotation sûrs reflétant les normes locales, et non les minima internationaux », indique le responsable du syndicat Martyn Gray.
En France, un texte devant l’Assemblée nationale
Dans un second temps, en France, le 27 mars, l’Assemblée nationale examinera un texte visant à lutter contre le dumping social sur le Transmanche. Cette proposition de loi vient en réaction à deux phénomènes : l’entrée sur le marché d’Irish Ferries en 2021 avec un navire battant pavillon chypriote sans marins européens, d’une part. Et, d’autre part, le licenciement de 786 marins de P&O Ferries le 17 mars 2022 remplacés par des marins extracommunautaires.
Un écart de 60% avec le pavillon français
En effet, selon le rapport de la proposition de loi de Didier Le Gac, l’emploi de marins non communautaires implique « un écart de 60 % de masse salariale entre un navire exploité sous pavillon français au premier registre et un navire exploité sous pavillon chypriote aux conditions offertes par Irish Ferries ou P&O Ferries. Cet avantage comparatif permet de réduire les tarifs de ces opérateurs d’environ 35 % tout en conservant une marge identique. »
Salaire minimum et conditions de travail équivalentes
Ainsi, le texte présenté à l’Assemblée nationale prévoit notamment la garantie d’un salaire minimum et de conditions de travail équivalentes entre les deux pays riverains de la Manche. Il est prévu, aussi, des sanctions contre les employeurs qui contreviendront au texte. Parmi les amendements adoptés en commission, le texte intègre « une contrainte pour les navires entrant dans le champ de la loi de police à respecter une organisation du travail des marins fondée sur une parité entre un temps d’embarquement et un temps de repos à terre équivalents. Un décret en Conseil d’État déterminera, en outre, la durée maximale d’embarquement en prenant en compte les caractéristiques des liaisons maritimes concernées. »