Le Havre et Marseille : après les grèves, le soutien aux opérateurs
Les deux Grands ports maritimes du Havre et de Marseille ont présenté des mesures pour compenser les pertes des opérateurs liées aux grèves. Des facilités financières qui sont destinées à inciter les chargeurs à utiliser les ports pour leur chaîne logistique.
En janvier, le gouvernement a pris un premier train de mesures pour aider les entreprises logistiques à se maintenir à flot après les mouvements sociaux de décembre 2019 et janvier 2020. Pour les commissionnaires et tous les acteurs de la chaîne logistique, un plan national de relance de la compétitivité portuaire devait rapidement suivre la fin de ces grèves pour relancer l’activité. La réponse gouvernementale s’est plutôt contentée de renvoyer la balle dans chaque place portuaire.
Les deux principaux ports conteneurisés français, Le Havre et Marseille, ont alors présenté des mesures. En Normandie, dès le 5 février, Haropa – Le Havre a présenté un premier train de mesures pour faciliter le retour des opérateurs logistiques, armements, logisticiens et transporteurs terrestres, vers ses quais. Le port a proposé une remise commerciale exceptionnelle sur les droits de port pour les porte-conteneurs sur les mois de janvier et de février 2020. Ensuite, une remise tarifaire de deux ans est proposée aux armements pendant les deux premières années pour toute ligne nouvelle qui viendrait escaler au Havre.
Marseille: des avoirs sur les frais de stationnement des conteneurs
Ces premières mesures devaient en appeler d’autres. Pour répondre à la volonté du gouvernement d’organiser port par port la relance, les deux places portuaires ont réuni l’ensemble des acteurs de leur place pour signer un pacte d’engagement. À Marseille, ce pacte a été signé dès le 20 février. Au Havre, l’accord a été signé le 2 mars. Les deux documents prévoient en premier lieu des mesures de soutien pour les conteneurs qui ont été bloqués sur les terminaux pendant les jours de grève. Le Grand port maritime de Marseille-Fos accorde, pendant les 13 jours de grève entre le 5 décembre et le 25 janvier, une remise commerciale sous forme d’avoirs accordés par les manutentionnaires aux armateurs et aux transitaires. Au Havre, les 14 jours sans activités entre le 5 décembre et le 31 janvier correspondent à 100 000 conteneurs par jour. Les frais de stationnement de ces conteneurs sont pris en charge par partie par le GPM, à hauteur de 18€/conteneur/jour, et de 12€/conteneur/jour, soit 30€/conteneur/jour au total. Avec les 3 M€ prévus dans le premier train de mesures et les 18€/conteneur pour les 100 000 conteneurs concernés, le GPM allonge sa note à 4,8 M€. Du côté des manutentionnaires havrais, la facture s’élèvera à 1,2 M€. « Ces frais de stationnement ne seront pas facturés aux opérateurs mais resteront à la charge des manutentionnaires », nous a assuré un manutentionnaire havrais. Pour Christian de Tinguy, président des manutentionnaires havrais, la prise en charge de ces frais de stationnement devrait permettre de retrouver la confiance perdue dans la place havraise. « En tant que manutentionnaire, nous sommes aussi victimes de ces mouvements. Nous avons été pris en otage et nous avons enregistré des baisses importantes de volume. », a indiqué le responsable de Terminaux de Normandie. Un chiffre que le président du directoire du GPM Le Havre estime à environ 30% de trafic perdu sur le seul mois de janvier. « Ces mesures sont destinées à inciter les marchandises à revenir vers la place havraise », a expliqué Baptiste Maurand, président du directoire du GPM du Havre, lors de la présentation de ce plan le 2 mars. Et pour le président du STH, Syndicat des transitaires du Havre, Jean-Louis Le Yondre, ces mesures sont « une concrétisation de ce que nous avons subi pendant les mouvements sociaux ».
Pilotage, remorquage et lamanage s’associent en proposant des ristournes
La question se pose, sur la place havraise du financement de ces sommes, 4,8 M€, par le GPM. « Cela n’affectera en rien les investissements prévus par le GPM », a insisté Baptiste Maurand. Les 610 M€ d’investissements seront réalisés. Du côté des manutentionnaires, si certains assurent, à l’image de la GPM, que les investissements en cours n’en seront pas affectés, comme les travaux sur les postes 11 et 12 de Port 2000, d’autres indiquent devoir retarder des projets pour financer ces sommes.
Dans les deux places portuaires françaises, les services aux navires se sont aussi engagés aux côtés des autres opérateurs pour relancer l’activité. Les services de pilotage, remorquage et lamanage du GPM de Marseille-Fos accordent une remise de 30% pendant trois mois pour les lignes internationales aux armements qui confirmeront leur confiance dans le port. Au Havre, la station de pilotage, le lamanage et Boluda, société de remorquage portuaire, ont signé le pacte d’engagement. Les trois opérateurs de service aux navires accordent, à compter du 1er avril, une remise de 10% jusqu’à la fin de l’année, à toute nouvelle ligne maritime internationale qui choisirait Le Havre. Une mesure qui concerne les nouvelles lignes mais aussi celles qui reviendraient au Havre après avoir quitté les quais normands.
Roulier: des réflexions en cours
Pour les deux principaux ports français, l’engagement en faveur de la filière conteneur n’est que le début. Dans le sud, le GPM de Marseille-Fos a engagé un travail de réflexion avec l’ensemble des acteurs des autres filières afin d’apporter des réponses adaptées au contexte économique de ces secteurs économiques. En Normandie, Haropa a entrepris de travailler avec la filière des rouliers. Baptiste Maurand constate que de nombreuses escales ont été annulées. L’impact de ces mouvements sociaux est estimé à environ 20% de trafic. « Les contrats vont se négocier prochainement avec les logisticiens et les chargeurs. Nous devons être prêts pour offrir les meilleures conditions au retour de ces trafics. » Des mesures qui viendront compléter celles sur l’extension su terminal roulier du Havre qui a souffert de sa saturation en 2019. Pour les autres filières des quais de l’axe Seine, et notamment au GPM de Rouen, des mesures sont actuellement en cours de réflexion. « La situation est différente à Rouen. Le port se présente sous la forme d’un patchwork de filières et la réponse à ces mouvements de grève doit se faire différemment qu’au Havre », nous a indiqué Christian Boulocher, président de l’Union portuaire rouennaise.