Le canal d’Istanbul: un outil à vocation logistique pour la Turquie
Le projet de construire un nouveau canal reliant la mer Méditerranée à la mer Noire devrait propulser la filière logistique de la Turquie, selon le gouvernement.
Le 26 juin, en présence du président de la Turquie, Recep Tayyip Erdoğan, le premier pas du futur canal de Turquie a été posé. Les fondations du pont entre les deux rives de ce canal ont démarré le 26 juin.
Un canal à l’ouest de la ville

Le projet du canal d’Istanbul, développé par l’actuel président turc, prévoit la mise en eau d’une nouvelle voie maritime à l’ouest de la ville. Situé à l’ouest de la ville, ce canal vise à désengorger l’actuel Bosphore. Les autorités turques estiment que le trafic du Bosphore présente un risque pour la ville d’Istanbul. Avec 42 000 navires par an qui traversent le détroit du Bosphore, dont une partie transportant des produits dangereux, le risque d’un accident grave dans cette voie maritime s’intensifie.
Raviver le secteur de la construction
Pour les opposants à ce canal, au premier chef desquels le professeur Haluk Gerçek, l’intérêt de ce canal est avant tout économique. « La raison d’être du projet Canal Istanbul n’est pas, comme il est annoncé, l’amélioration de la circulation ou d’empêcher les accidents, mais bien de raviver le secteur de la construction, et d’ouvrir les espaces naturels restants de la ville à la construction, ce qui est alors un projet immobilier catastrophique ».
Le trafic doublera dans le Bosphore dans les 20 ans
Dans leurs argumentaires, les membres du gouvernement turc expliquent que le trafic par le détroit du Bosphore va doubler dans les deux ou trois prochaines décennies. Une analyse que les opposant réfutent. De 2006 à 2018, le trafic aurait baissé de 27,3% en nombre de navires. Pour les détracteurs du projet, il s’agit, pour le président de la république turque de réaliser « son rêve fou ».
Une manne financière
Cette nouvelle voie maritime serait plus une nouvelle manne financière pour le pays. Le coût de la construction de ce canal varie au gré des déclarations du gouvernement d’Ankara. Il serait estimé entre 75Md$ et 120 Md$, selon les différentes sources. Ce canal serait réalisé dans le cadre d’un partenariat public-privé. Il rapporterait à l’État plusieurs millions de $ par an, sans que le chiffre ne soit aujourd’hui établi.
Une puissance logistique mondiale
Bien plus, la construction de ce canal va permettre à la Turquie de devenir une puissance mondiale de la logistique, selon le gouvernement. « Notre projet de canal d’Istanbul, qui améliorera la place de la Turquie dans les échanges internationaux et permettra au pays d’être au carrefour des principaux corridors, laissera une marque dans l’histoire du pays pour devenir une garantie de l’indépendance nationale », a déclaré le ministre turc en charge des transports, Adil Karaismailoğl.
Le Plan stratégique logistique du gouvernement
Le projet de canal d’Istanbul s’intègre dans le plan stratégique logistique du gouvernement. « Avec ce canal, la Truquie deviendra le premier centre logistique du monde », affirme le ministre turc en charge des Transports. L’objectif est de faire de la mer Noire « un grand lac pour les échanges de la Turquie ». Aujourd’hui, la mer Noire reste une des principales zones d’exportation de céréales dans le monde depuis les ports ukrainiens et russes. Comment ces deux pays vont réagir à la mise en eau de ce canal s’il devient payant ? Les ambassadeurs russes et ukrainiens souhaitent avant tout que le libre passage des navires soit assuré par le Bosphore et le futur canal.
Convention de Montreux et nouveau canal
La construction de ce canal pose aussi des questions juridiques. Actuellement, la traversée du Bosphore est réglée par la convention de Montreux. Elle prévoit le libre transit des navires entre la mer Marmara et la mer Noire. Cette convention prévoit un libre passage. Or, le nouveau canal pourrait ne pas être intégré à cette convention en ce sens que son champ d’application est défini dans le texte. Ainsi, le canal d’Istanbul pourrait devenir payant quand le passage apr le Bosphore est gratuit, sauf pour les frais de pilotage ou de services.
Impact environnemental: non mais oui
Quant à l’impact environnemental du canal, les études menées auraient fait ressortir de nombreuses anomalies de ce canal. Selon les opposants au canal, les signataires du rapport sur les impacts environnementaux auraient subi des pressions politiques pour finalement revenir sur leurs premières estimations. Avec la cérémonie du 26 juin, il paraît clair, pour le gouvernement d’Ankara que ce canal se fera avec ou sans l’assentiment de la population locale.