Corridors et logistique

Ever Given : l’Égypte réclame une garantie de 900M$

Après le sinistre de l’Ever Given, l’autorité du canal de Suez demande à l’armateur une garantie de 900 M$ pour laisser le navire continuer sa route.

Lors d’une déclaration à la télévision égyptienne, le directeur de l’autorité du canal de Suez aurait demandé à l’armateur de l’Ever Given, Shoei Kisen Kaisha Ltd, filiale du chantier japonais Imabari, de déposer une garantie de 900M$. Elle vient en préjudice du manque à gagner en raison du blocage de la voie maritime pendant plusieurs jours.

Les aberrations de la conteneurisation

Depuis le déblocage de la situation, l’Ever Given est à l’ancre dans le lac Amer. Il doit encore faire l’objet d’inspections par la société de classification et les différents experts dépêchés par les parties intéressées à ce sinistre. Au-delà de la bataille juridique, les analystes tentent de mettre en lumière les aberrations du monde de la conteneurisation.

Un navire adapté au nouveau canal de Suez

Olaf Merk, de l’International Transport Forum de l’OCDE, donne son opinion sur les conséquences de ce sinistre. En premier lieu, commence le responsable de l’ITF, l’Ever Given, avec ses 400 m de long pour 60 m de large représente le type de navire pour lequel le canal de Suez a été agrandi en 2016.

Entre 6Md$ et 10 Md$ par semaine

Il reprend les estimations des conséquences financières du blocage du canal de Suez qui s’élèveraient entre 6 Mrd$ et 10Md $ par semaine. « Souvenez-vous : la réalité des schedules des lignes maritimes est en chute libre depuis juin 2020. Deux porte-conteneurs sur trois sont en retard, et au début de 2021, le retard était en moyenne de cinq jours. Alors, si quelques jours de blocage du canal de Suez entraînent des coûts économiques de plusieurs milliards de $, imaginez le coût des pertes en raison des retards des navires avant l’incident », indique Olaf Merk.

La congestion portuaire est dûe aux ports

Et le responsable de l’ITF pose la question plus générale de ces navires : « Les perturbations des chaînes logistiques pour les prochaines semaines sont la quintessence des méga-navires. Améliorons les économies d’échelle des navires, laissons aux ports le soin de se débrouiller avec le désordre qui s’en suivra », ironise le responsable de l’ITF. L’afflux soudain de nombreux navires et de boîtes dans les ports va obliger les opérateurs de terminaux à devoir mettre en attente certains navires « et se voir reprocher une congestion portuaire qui n’est pas de leur faute ». Une situation qui ne date pas d’aujourd’hui puisque cette congestion est latente depuis mai 2020.

La cause: un manque de politique de concurrence européenne

Olaf Merk prend le parti de mettre « les pieds dans le plat » une bonne fois pour toute. Les perturbations des chaînes logistiques ne doivent pas s’arrêter au blocage d’un navire dans le canal de Suez, ni à un manque d’infrastructure dans les ports, « il s’agit avant tout d’un manque d’une politique de concurrence réelle dans le monde de la conteneurisation. En Europe, le pouvoir politique demande aux ports de faire de la place pour répondre aux effets du blocage du canal de Suez. Il n’a pas été fait mention d’une demande des régulateurs de remettre de la capacité sur les lignes Europe-Asie quand les échanges ont enregistré de fortes hausses au deuxième et troisième trimestre de l’année passée. Au cours de cette période, les armateurs ont réduit leur capacité de 4% par rapport à 2019. »

La vulnérabilité est liée à l’intégration verticale

Olaf Merk estime que dans un avenir proche, le premier effet du blocage du canal de Suez sera de mettre en place de nouvelles capacités portuaires, d’agrandir encore le canal ou de développer la route arctique. « Ils seront dans l’erreur. La principale vulnérabilité est à mettre au passif des méga-navires et du monde intégré que ces opérateurs ont créés ».