Corridors et logistique

La Réunion : la Région s’interroge sur la création d’une compagnie maritime

La réunion du Conseil régional de La Réunion le 27 août s’est penchée sur les conséquences de la crise de la conteneurisation. Parmi les solutions proposées, des prêts, un fonds de sauvegarde et la création d’une compagnie maritime régionale.

Cette réunion du Conseil régional du 27 août a marqué un tournant dans la gestion des approvisionnements et de la logistique à La Réunion. Face à la hausse des coûts de transport, l’île souhaite pallier les surcoûts en aidant les importateurs.

La fin du « quoi qu’il en coûte »

L’annonce par le ministre de l’économie, Bruno Lemaire, du contexte du « quoi qu’il en coûte » va peser lourdement pour les habitants de l’île du sud-ouest de l’océan Indien. « Depuis la crise sanitaire de 2020, le trafic maritime mondial connaît des perturbations majeures avec des conséquences importantes sur la souveraineté alimentaire, la sécurité des approvisionnements stratégiques et le pouvoir d’achat », a indiqué le Conseil régional.

Des taux de fret multipliés par 2,5

La hausse des prix s’est ressentie sur les prix des matières premières. Certains produits, comme les métaux ferreux, ont vu leur prix augmenter de 91% d’avril 2020 à avril 2021, souligne le Conseil régional. Et à cette hausse est venue s’ajouter celle de la hausse des taux de fret. Pour les élus régionaux de l’île Bourbon, les taux de fret ont augmenté de 30% pour les marchandises en provenance d’Europe. Celles arrivant d’Asie ont été multipliées par 2,5. Et le maritime n’est pas seul à avoir augmenté. L’aérien a vu ses taux multipliés par deux. De par son insularité, La Réunion subi ces hausses de plein fouet.

Fin des escales de Mærsk et CMA CGM

À cette inflation des prix et des taux de fret, les armateurs ont fait un choix. Des trois principaux armateurs escalant dans le port de l’île, Mærsk et CMA CGM ont annoncé fin juillet la fin des escales au GPM de La Réunion pour la ligne entre l’Afrique du Sud et le Moyen-Orient. Cette annonce est motivée par un besoin d’adapter les rotations sur des marchés plus « porteurs ». Pour le Conseil régional, « les « petits » volumes et donc chiffres d’affaires de fret maritime des îles du sud-ouest de l’océan Indien sont sacrifiés au profit des grands marchés. »

Le surcoût du stockage

À cette crise, vient s’ajouter le surcoût du stockage sur l’île. Les retards à l’import et à l’export entraînent l’obligation de surstocker pour éviter les ruptures d’approvisionnement. Cela peut provoquer des coûts logistiques supplémentaires et soulever des problématiques de capacité de stockage sur le territoire. Ces coûts logistiques prennent une nouvelle dimension dès lors qu’il s’agit des produits alimentaires. Les dates limite de consommation des produits périssables se raccourcissent. Chaque année, l’île importe 40 000 EVP de produits alimentaires périssables. Les nouvelles conditions logistiques posent des interrogations sur la sécurité alimentaire de l’île.

Répercussion des prix au consommateur

Alors, le Conseil régional tire la conclusion : « Ne pouvant seules supporter ces hausses de coûts de rendement sans mettre en péril leur équilibre financier déjà fortement fragilisé par la crise Covid, les entreprises ne pourront que répercuter sur les prix à la consommation et donc le pouvoir d’achat des réunionnais. »

Prêts et fonds de sauvegarde à court terme

Dans son analyse sur les mesures à mettre en place, la Région propose des pistes à moyen et court terme. Elle prévoit d’accorder des prêts ou encore de mettre en place un plan de sauvegarde pour aider les PME et TPE. Le Conseil régional prévoit de compenser les surcoûts liés au fret. Cette compensation s’adressera à toutes entreprises ayant une activité de production à La Réunion. Il s’agira des entreprises commerciales si elles réalisent la totalité de leur chiffre d’affaires à l’extérieur sur des produits finis, fabriqués, conditionnés ou montés à La Réunion par une autre société du groupe auquel elles appartiennent. Le montant est prévu à 100%.

Système de coûts simplifiés

L’assiette de la compensation des coûts du fret des intrants productifs et des extrants concerne les dépenses réalisées en 2021 et 2022, sur la base de commandes et d’expéditions réalisées à compter du 1er juillet 2020. De plus, il est prévu de simplifier par un système de coûts simplifiés dénommé BSCU (barème standard de coût unitaire) pour les acheminements par transport maritime à compter de 2021

Élargir aux produits alimentaires

Pour le prochain Programme Opérationnel Feder 2021-2027, il s’agira de pouvoir redéfinir l’intervention de la collectivité régionale dans le financement des surcoûts du transport, notamment sur la possibilité de rendre éligible des matières premières pour lesquelles l’élargissement de l’approvisionnement via les pays tiers est posé, notamment s’agissant des produits de première nécessité comme la farine, le riz, l’huile, l’alimentation animale et le lait en poudre.

Une compagnie maritime régionale

Enfin, parmi les pistes de travail sur le moyen terme, une réflexion sera menée autour de la mise en place d’une compagnie maritime régionale qui va donner lieu à des échanges dans les prochains mois entre les partenaires privés et publics. L’objectif est de palier aux carences de l’initiative privée et des grandes compagnies maritimes. Il s’agira d’offrir un outil de transport adapté aux besoins des entreprises locales et régionales en dessinant les contours d’un modèle économique rentable.