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Port du centre-Cherchell : les premiers terminaux seront opérationnels en 2025

Après une décennie d’études, le gouvernement algérien a donné un nouveau coup d’accélérateur au projet du Port du centre-Cherchell. Les travaux vont démarrer en 2021. La première phase sera livrée en 2025.

Le projet du Port du centre-Cherchell en Algérie a parfois été considéré comme un serpent de mer. « Il va devenir une réalité dans les prochaines années », nous a confié Amar Grine, directeur général de l’Agence nationale de réalisation du port du centre Cherchell (ANRPCC). Le projet de ce port trouve son origine dans le schéma national d’aménagement du territoire en 2010. Ce document, explique le directeur général, prévoit les différentes stratégies sectorielles. Il y est indiqué qu’un port à dimension internationale doit voir le jour en Algérie.

Les ports algériens datent de l’ère coloniale

Amar Grine, directeur général de l’Agence de réalisation du port du centre Cherchell.

La construction de ce port se justifie par le paysage actuel du monde portuaire algérien. S’il a le mérite d’être diversifié et bien réparti sur toute la côte méditerranéenne, le paysage portuaire national soufre de son âge. « Notre système portuaire actuel date de l’ère coloniale, à l’exception du port de Djen Djen qui a été achevé en 1992. Les ports actuels n’ont pas la capacité de recevoir les porte-conteneurs de dernière génération. De ce fait, les marchandises que reçoit l’Algérie sont transbordées dans des ports internationaux et réacheminés vers les différents ports nationaux. Alors, nous payons le prix de ce handicap avec des taux de fret plus élevés », continue Amar Grine.

Un port cité entre Alger et Ténés

Dès la publication du Schéma national d’aménagement du territoire, il a fallu réaliser plusieurs études dont celle sur la localisation de ce futur port. Il a été décidé que ce port sera construit dans la région de Tipaza, à l’ouest d’Alger et l’est de Ténés, dans le lieu-dit d’El Hamdania. De plus, en créant le port proche de la capitale, il permet de réfléchir au futur du port d’Alger.

En effet, le port d’Alger est à la limite de la saturation. « Les possibilités d’extension de ce port nous sont apparues comme pratiquement nulles, continue Amar Grine. Sa position en cœur de ville génère des désagréments pour la population. »

De nombreuses études sur le projet

Ainsi, depuis 2011, date du lancement de la première étude à ce jour, de nombreuses analyses ont été menées. Elles ont concerné les impacts sur l’environnement, la faisabilité technique et économique, le financement ainsi que la réalisation d’un avant-projet détaillé. « L’APD, l’avant-projet détaillé, a été achevée en 2017. Il a ensuite été approuvé et finalisé en 2018. Il prévoit de confier la réalisation de l’infrastructure à un groupement d’entreprise. »

Un projet évalué à 4,5Md$

La partie financement de ce projet est bouclé depuis plusieurs années. Le montant du projet est évalué entre 4,5 et 4,8Md$. Il prévoit un prêt chinois de l’Exim Bank en faveur de l’Algérie. Un accord a été signé entre les deux gouvernements d’Alger et de Pékin. En 2019, la situation politique en Algérie a suspendu le projet. « Le coup d’accélérateur de ce projet a été donné lors du conseil des ministres du 28 février quand le président de la République a instruit le ministère en charge du projet, celui des travaux publics et des transports, de prendre toutes les dispositions pour que le projet soit lancé le plus tôt possible. »

Un groupement entre sociétés chinoises et algériennes

Depuis le conseil des ministres du 28 février, plusieurs étapes ont été franchies. D’une part, l’agence de réalisation de ce port a été créée sous la forme d’un Epic. Le groupement pour les travaux de construction a été choisi. « Le financement étant réalisé par une convention entre l’Algérie et la Chine, ce dernier a exigé qu’une partie des travaux soit réalisée par ses entreprises nationales. La société chinoise, la China State Engineering Construction, réalisera 65% du volume des travaux. Trois entreprises nationales algériennes publiques seront en charge des 35% restants », continue Amar Grine.

Premier coup de pioche à l’automne

Aujourd’hui, des procédures sont engagées par le ministère des finances d’Alger avec le gouvernement de Pékin pour mettre en place la convention de crédit. Les plannings mis en place, le premier coup de pioche est prévu pour le mois de septembre de cette année.

Trois terminaux à conteneurs

Le projet portuaire comprend trois terminaux à conteneurs, un terminal à marchandises générales et un quai pour les activités de services portuaires. Le terminal à marchandises s’étendra sur 107 hectares avec 10 postes à quai répartis sur 2880 m linéaires. Les trois terminaux à conteneurs seront répartis sur une surface globale de 129 hectares. Ils offriront 10 postes sur un linéaire de quai de 3 000 m.

Deux options pour l’exploitation

Les conditions de gestion et d’exploitation des terminaux à conteneurs ne sont pas encore définies. « Nous avons deux options pour l’exploitation de ces terminaux. Soit, nous optons pour une exploitation mixte dans le cadre d’une co-entreprise entre une société algérienne et un opérateur étranger. Soit, nous décidons de passer par une mise en concession de ces terminaux. »

Des discussions avec les opérateurs

À l’heure actuelle, aucune option n’a été arrêtée. Les rumeurs sur l’entrée dans ces terminaux de Shanghai International Port Group ne sont pas confirmées. « Nous avons eu des discussions avec des opérateurs dont SIPG (Shanghai International Port Group) ou encore Cosco. Les opérateurs veulent être rassurés. Ils attendent de voir le démarrage des travaux ». L’appel d’offres pour l’exploitation des terminaux n’a pas été lancé.

Deux phases sur une période de sept ans

Les travaux du port se feront en deux phases sur 7 ans. La première phase se déroulera sur quatre ans. Elle prévoit la construction de la digue nord, les infrastructures terrestres, la livraison du terminal à marchandises générales et le terminal à conteneurs 1. La deuxième phase prévoit de réaliser les deux autres terminaux à conteneurs sur trois ans. « Après les quatre premières années de travaux, nous pourrons exploiter le terminal à marchandises et le premier terminal à conteneurs. »

Une zone logistique et trois zones industrielles

Outre les terminaux, le projet du port de Cherchell accueillera une zone logistique de 255 hectares attenante au port. Par ailleurs, le port sera relié à trois zones industrielles qui totalisent ensemble 2000 hectares. Elles se situent à des distances variant de 10 à 30 km du port. Ces zones offrent l’avantage d’être reliées au réseau autoroutier et ferroviaire national.

Connexion routière et ferroviaire

Ce port sera connecté à l’autoroute est-ouest d’Algérie, de 2×3 voies entre la frontière avec le Maroc et celle avec la Tunisie. Ce cordon routier s’étend sur 1260 km. Le 24 mai Autoroute d’Algérie a décidé de confier la construction du barreau de liaison entre le port de Cherchell et cette autoroute, soit 37 km à une société nationale. De plus, le port sera relié au ferroviaire par une voie électrifiée depuis le port à la liaison au réseau ferré national dans la ville d’Al Afroun.

Porte d’entrée de la Transsaharienne

Outre sa fonction de hub international, le port du Centre-Cherchell sera un point d’entrée sur la transsaharienne. Cette autoroute qui reliera Alger à Lagos, au Nigéria, sur 2400 km est en voie d’achèvement. Sur la partie algérienne, à savoir environ 850 km, une grande partie, 507 km, a été réalisée. Un tronçon de 71 km est en cours de travaux et les 260 km restants sont à l’étude. Aujourd’hui, la transsaharienne a pour point d’entrée le port de Djen Djen. Demain, le port de Cherchell offrira une nouvelle alternative logistique.

Un port pour le soutage au GNL

La position de ce port à quelques miles nautiques de la route maritime reliant l’Asie, la Méditerranée et l’Europe du Nord présente un avantage pour venir concurrencer les autres hubs méditerranéens. « Nous voulons faire de ce port une véritable plate-forme logistique internationale. En outre, nous présentons aussi l’avantage de pouvoir proposer aux porte-conteneurs de dernière génération fonctionnant au GNL de réaliser leur soutage dans ce port. L’Algérie fait partie des premiers producteurs de gaz dans le monde. »

Maintenir l’activité des autres ports

La question se pose dès aujourd’hui de penser à l’avenir des autres ports algériens. « Au fur et à mesure des années, chaque port algérien s’est spécialisé dans des types de trafics. L’entrée en service du port de Cherchell ne va pas bouleverser l’ordre établit. Chaque port continuera son activité. Celui de Cherchell sera avant tout dédié aux navires les plus importants », explique Amar Grine. Quant au port d’Alger, il sera amené à se spécialiser sur la plaisance et l’accueil des passagers. L’activité conteneurs d’Alger sera transférée pour sa part sur le port de Cherchell.