Ferroviaire : les volumes entre la Chine et l’Europe se restructurent
Les volumes de fret ferroviaire entre la Chine et l’Europe enregistrent depuis le début de l’année un déclin quand, ceux destinés à la Russie augmentent. Des trafics qui se modifient aussi sur la nature des flux qui empruntent désormais le train.
Le marché du fret ferroviaire entre la Chine et l’Europe vit un bouleversement. Dans un article publié le 29 septembre, Ganyi Zhang, experte chez Upply, examine l’évolution de ce marché sur les sept premiers mois de l’année.
Un trafic de 869 000 EVP
Le réseau ferré chinois, China Railway Express annonce avoir réalisé un trafic de 869 000 EVP au cours des sept premiers mois de l’année. Un trafic en progression de 4%. Une hausse du trafic que l’experte de Upply attribue à la croissance des volumes entre la Chine et la Russie. Le commerce entre les deux nations du bloc eurasien a progressé de 30%, selon Ganyi Zhang. Une croissance qui tient aussi au fait que les services des principaux transporteurs maritimes russes ont été arrêtés.
Baisse de 24% de Chine vers l’Europe
Effet de vase communicant, la progression des flux ferroviaires entre la Chine et la Russie impliquent une baisse des expéditions entre la Chine et l’Union européenne. « Les expéditions entre la Chine et l’UE via la route transsibérienne ont logiquement diminué, de 24% dans le sens est-ouest et de 35% dans le sens ouest-est », indique l’experte chinoise de Upply. Les flux avec l’Allemagne, qui représentaient 45% des volumes en 2021, ont chuté de 21% dans le sens est-ouest et de 38% dans le sens ouest-est.
Légère reprise, notamment sur la Pologne
Est-ce pour autant que cette alternative ferroviaire aux liaisons entre la Chine et l’Europe va disparaître ? La réponse n’est pas nécessairement négative. En effet, « malgré la baisse générale, on constate depuis le mois de mai une reprise des expéditions vers la Pologne dans le sens est-ouest », souligne Ganyi Zhang. Les volumes avec la Pologne ont augmenté de 6,6% en juillet, soit le premier mois de hausse, quand ceux vers l’Allemagne affichent un retrait de 66%. L’explication tient, selon l’experte de Upply au fait que la Pologne sert de plate-forme de transbordement vers les autres destinations européennes plutôt que de destination finale.
Une progression des flux de poudre de lait
Cette reprise des volumes s’explique, d’un côté, par le redressement de la demande dans les principaux produits acheminés par voie ferroviaire. D’un autre côté, de nouveaux flux émergent. Il s’agit du noir de carbone, des produits de cuir pour les trafics westbound. En sens inverse, la poudre de lait voit sa part de marché passer de 2% en 2021 à 5% en 2022. « L’une des hypothèses est que les expéditeurs ont cherché à éviter des ruptures de chaînes logistiques lors du confinement de la région de Shanghai. En effet, nous observons que la poussée du fret ferroviaire correspond à cette période. »
Perturbations des chaînes logistiques maritimes et aériennes
Le regain de vigueur de la route ferroviaire transsibérienne peut tenir à plusieurs phénomènes. En premier lieu, les améliorations apportées sur le réseau peuvent participer à cette progression. Ensuite, les perturbations des chaînes logistiques maritimes ont incité les opérateurs à assurer leur approvisionnement en utilisant le fret ferroviaire. Encore, continue Ganyi Zhang, la sous-capacité offerte par les compagnies aériennes a reporté les volumes sur le ferroviaire. Enfin, face aux sanctions, les européens tentent de se prémunir contre des imprévus en se constituant des stocks.
Le ralentissement économique aura un impact
Dans ce contexte, l’alternative ferroviaire par la route transsibérienne pourrait s’attendre à un avenir radieux. Or, Ganyi Zhang n’est pas aussi optimiste. Elle considère que plusieurs facteurs pourraient avoir un impact important sur ces volumes. D’abord, les perspectives économiques mondiales ne laissent pas entrevoir une croissance forte pour les prochains mois. Pour contrecarrer cet élément négatif, la publication par le gouvernement de Pékin de soutenir la production de véhicules électriques et les exportations notamment vers l’Europe pourrait favoriser le transport ferroviaire. Les congestions de certains terminaux rouliers en Europe de l’Ouest démontrent de la croissance de ces flux.
Le corridor central, l’alternative à l’alternative ferroviaire
Enfin, la route transsibérienne demeure la plus efficace. « Certes, le corridor central ou “Middle Corridor” (route transcaspienne) a jusqu’à présent connu une croissance substantielle cette année, en raison des perturbations engendrées par la guerre en Ukraine. Toutefois, la capacité limitée laisse penser que ce corridor médian fonctionnera plus probablement comme un service complémentaire », souligne Ganyi Zhang. Cette route qui contourne la Russie par le Kirghistan et l’Ouzbékistan devra d’abord régler les questions politiques avant de devenir une alternative à l’alternative sibérienne.