Politique

Unim : la gouvernance des ports demeure un dossier prioritaire

L’assemblée générale de l’Unim s’est déroulée à Saint Malo le 3 juin. L’intervention de Pierre Karleskind, député européen, a permis de faire le point sur l’aspect européen de la profession avant d’aborder les questions nationales. Une réunion qui a porté Louis Jonquière à la présidence de l’organisation patronale.

L’assemblée générale de l’Unim s’est tenue le 3 juin à Saint Malo. Une réunion qui a permis de faire le point sur les principaux dossiers économiques et sociaux des ports en France. Une assemblée qui a démarré avec une présentation par Pierre Karleskind, député européen membre du groupe Renew Europe.

Le poids de la stratégie Fit for 55

L’activité politique européenne s’annonce importante dans les prochains mois. Le député est venu expliquer les différents projets actuellement à l’étude au Parlement dans le cadre de la stratégie européenne Fit for 55, qui prévoit une réduction de l’empreinte carbone de 55% à 2030. « 2030 c’est dans huit ans, autant dire demain », a souligné le député.

Fixer des objectifs

Le député est venu rassurer les manutentionnaires sur les ambitions de l’Europe. « Nous n’avons pas la prétention à imposer un nouveau monde mais plutôt à fixer des objectifs ». Et ces ambitions se déclinent au travers de différents règlements en cours de procédure. Il s’agit de la directive sur les énergies renouvelables, le système d’échanges des quotas carbone (ETS, European trading system), le texte sur les infrastructures de fuel alternatif et celui sur le fuel maritime et Hambourg, il est difficile de savoir la part réalisée dans les eaux européennes. La proposition de la Commission est de comptabiliser 50% du voyage. Le risque serait de voir les opérateurs éviter les ports européens et préférer ceux du Royaume-Uni pour éviter d’entrer dans ce système. Ainsi, le choix de considérer l’entièreté du voyage résout cette question.

Éviter la stratégie d’évitement

Pour assurer que les ports britanniques ne viendront pas troubler le jeu de la concurrence, Pierre Karleskind a indiqué que Londres avait demandé à entrer dans le système des échanges de quotas. Quant aux ports méditerranéens, si un armement décide de réaliser une escale sur la rive sud de la Méditerranée, il perdrait les économies réalisées par le coût de cette escale, a assuré le député européen.

Outre-mer : sorti de l’ETS

L’autre sujet de ce texte concerne les ports d’outre-mer. En intégrant les ports des régions européennes périphériques, c’est tout un pan de la stratégie de ces ports pour devenir des hubs qui pourrait s’effondrer. Pour éviter cela, la Commission européenne a décidé d’exclure les voyages entre l’Europe et ses régions périphériques de ce texte.

Distinguer les investissements publics et privés

Et pour compléter le tableau européen, Lamia Kerkoudj-Belkaid, déléguée générale de la Feport, a abondé en rappelant les négociations que l’organisation des manutentionnaires au niveau européen mène. Elle a rappelé les discussions que l’organisation européenne entreprend dans le cadre de la directive sur les infrastructures pour les fuels alternatifs (Afir). La Feport refuse que les opérateurs de terminaux portuaires endossent seuls le coût des investissements pour ces infrastructures. « Il faut une distinction claire entre la partie des investissements qui relève du secteur public et celle qui revient au privé », a soutenu la déléguée générale.

La gouvernance des ports autonomes convenait

L’assemblée générale du 3 juin a été l’occasion pour l’Unim de faire le point sur les dossiers nationaux. Le point prioritaire reste la gouvernance des ports. « Les conseils d’administration tels que les connaissait les Ports autonomes avant la réforme de 2008 convenaient. Nous avions une gouvernance partagée. Les nouvelles instances ont exclu les représentants du secteur privé.

Intégrer un représentant des unions maritimes

Pour remédier à cela, l’Unim demande qu’un représentant des unions maritimes entrent dans chaque Grand port maritime. Certes, depuis la loi de 2008, le gouvernement a mis en place un conseil des investisseurs. « Nous constatons qu’il a atteint ses limites », a continué Louis Jonquière, président de l’Unim. Et, le paroxysme de ce dossier est intervenu avec la création d’Haropa. « Même la chambre de commerce du Havre a été sortie des instances de décision. Une première depuis de nombreuses décennies».

La bonne gestion des ports régionaux

À l’inverse, les ports régionalisés ont conservé un système de décision partagé entre l’autorité et le secteur privé. « Nous constatons que dans ces ports, il existe une gestion commune entre tous les intervenants », a continué Christian de Tinguy.

Le pouvoir de l’Agence des participations de l’État

Cette gouvernance des ports est aussi devenue un sujet de discussion du point de vue du gouvernement. L’absence d’un ministère des transports montre, selon les responsables de l’Unim, le transfert du pouvoir vers Bercy. « Le pouvoir sur les ports par le gouvernement est passé du ministère vers l’Agence de participation de l’État, sous la tutelle de Bercy. Il faut remédier à la situation en créant une direction des ports qui soit rattachée à un ministère technique. Cela permettra aux directeurs des ports de savoir de qui ils dépendent », indiquent les responsables de l’Unim.

Domanialité : un guide à publier

Autre sujet récurrent dans le monde de la manutention, la domanialité. Après la décision du conseil d’État en 2017 qui a requalifié une convention de terminal en concession de terminal, la profession s’est inquiété des conséquences. Dans le cadre du vote de la LOM, Elizabeth Borne, alors ministre des Transports, a demandé que soit rédigé un guide pour définir clairement les conventions de terminal. Le guide sera diffusé pendant l’été, a assuré Ronan Sevette, délégué général de l’Unim.

Social : un accord homme/femme sans grande ambition

Enfin, les dirigeants de l’Unim ont abordé les questions sociales du secteur. Parmi les points, l’Unim a rappelé l’accord d’attractivité signé avec la FNPD-CGT, les négociations annuelles obligatoires qui se sont achevées avec une hausse de 0,9% de hausse de la grille et la signature d’un accord sur l’égalité homme/femme. « Un accord minimaliste qui manque d’ambition, à l’exception de la Guadeloupe », a souligné Magali Bonnecarrere.

Pénibilité : sauvée par l’amiante

Dans le bilan social, le dossier de l’amiante et de la pénibilité a refait surface. Le régime actuel de la pénibilité est issu de la réforme de 2008. « Le régime qui existe est très coûteux, a expliqué Magali Bonnecarrere. Il représente 9,3% de la masse salariale des entreprises. » Dans ce contexte, la trajectoire de ce système est difficilement viable. Ce dossier a été « sauvé » par celui de l’amiante. En décembre, le gouvernement publie un décret avec la liste des ports dans lesquels le dispositif prévu pour un départ anticipé en raison de l’exposition à l’amiante. Un arrêté pris quelques jours plus tard déterminera la période jusqu’en 2004.

Un appel d’air qui ne range pas le dossier

Alors, les personnels concernés peuvent bénéficier de l’Acaata (Allocations de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante) pour un départ en retraite anticipée. Ce dispositif règlementaire vient donner un peu d’air au régime de la pénibilité. Cet appel d’air n’a pas clos le dossier de la pénibilité qui restera dans le haut de la pile des sujets à traiter en fin d’année et en 2023.

Louis Jonquière prend la présidence

L’assemblée générale de l’Unim a aussi été l’occasion d’un passage de témoin. Christian de Tinguy a quitté ses fonctions de président de l’organisation patronale. Après neuf ans passés à la tête de l’organisation, il passe le flambeau à Louis Jonquière. Après avoir été diplômé de l’École supérieure des transports, Louis Jonquière a démarré sa carrière auprès de compagnies maritimes comme la NCHP, puis Delmas avant de rejoindre le groupe CMA CGM lors de l’acquisition de l’armement du groupe Bolloré. Il sera nommé à la direction de la GMP au Havre et de Eurofos à Marseille, qu’il a lâché depuis la consolidation de la participation de DP World dans le terminal marseillais.