Bilan 2021 : l’année du retour en grâce
Avec la fin de l’année, les premiers bilans commencent à tomber. Pour les observateurs, l’année écoulée aura été celle du surréel. Les scénarios attendus ne se sont pas toujours réalisés.
Les rideaux commencent à se tirer sur cette année qui a été un peu folle. Elle a commencé avec la confirmation de la reprise économique en Chine puis en Europe et aux États-Unis dès le dernier trimestre 2020. Les taux de fret dans le monde de la conteneurisation et du vrac sec ont commencé à grimper pour atteindre des niveaux jamais connus. À quelques jours de la Saint Sylvestre, les observateurs commencent à tirer des bilans de cette année.
Gérer l’atterrissage
Pour l’expert maritime de Upply, Jérôme de Ricqlès, « l’année 2021 restera celle de tous les excès dans le transport maritime de conteneurs. Les compagnies vont maintenant devoir gérer l’atterrissage, qui s’annonce plus ou moins souple. » Et ces excès sont nombreux pour l’observateur de Upply. Ils se sont déclinés dans la consommation dans l’hémisphère occidental, dans les taux de fret pratiqués par les compagnies maritimes, dans la balance commerciale de l’Union européenne et aussi, voire pour certains, surtout, dans la dégradation des services des compagnies maritimes.
Des résultats records pour les armateurs
Pour l’expert de Upply, des trois scénarios prévus en janvier, le deuxième s’est réalisé. Il prévoyait que les compagnies maritimes garderaient la main sur le marché. « Il s’est largement vérifié sur toute l’année », indique Jérôme de Ricqlès. Les principaux acteurs ont enregistré des résultats records avec, en corollaire, des investissements et un désendettement. « Les États sont ravis de la performance de leurs champions respectifs, les torses sont bombés et les poches sont pleines », continue l’expert de Upply.
Tassement des taux de fret
À côté de ces résultats mirobolants, le quatrième trimestre a vu un tassement des taux de fret sur les principales lignes est-ouest. « Les négociations de fin d’année pour les contrats longs sont d’ailleurs moins faciles que prévues pour les compagnies maritimes. Les chargeurs, qui commencent à reprendre leurs esprits après le coup de massue de 2021, sentent que le vent tourne un peu plus en leur faveur, surtout s’ils parviennent à conclure les négociations d’appel d’offres après le nouvel an Chinois. »
Hausse des exportations chinoises et brésiliennes
L’analyse est à peu près équivalente pour IHS Markit. Le consultant américain constate une progression des échanges internationaux dès la fin de l’année 2020. Des augmentations de taux qui se sont manifestées sur les deux premiers trimestres de l’année pour se tasser sur la seconde partie. Le tassement reste relatif. Les économies chinoises et brésiliennes ont publié leurs premiers chiffres sur octobre, indique IHS Markit. Les exportations ont progressé de 27,6%. En Chine, cette augmentation atteint 26,6% et 21% en Corée du Sud. Au Japon, les choses ont été plus faibles avec une hausse de 1,6% des exportations en octobre. Il faut se tourner vers le Royaume-Uni pour voir des baisses des exportations. Le lien avec le Brexit est avéré pour bon nombre d’analystes.
L’effet Omicron
Quant à 2022, les choses paraissent bien établies. En premier lieu, l’arrivée du variant Omicron devrait encore perturber les chaînes logistiques. Déjà, dans le port chinois de Ningbo-Zhoushan, les premiers cas décelés pourraient entraîner des fermetures de terminaux. « Néanmoins, le développement de ce variant et son impact sur l’économie ne seront connus qu’au premier trimestre 2022 », indique le rapport de IHS Markit.
L’exemption pour les consortia sur la table
Pour Upply, l’année 2022 a commencé avec les négociations des contrats annuels. Après une année 2021 chaotique, « les chargeurs reprennent leurs esprits », indique Jérôme de Ricqlès. L’autre sujet qui interviendra au premier semestre sera le renouvellement des exemptions accordées aux consortia des lignes maritimes par l’Union européenne. « C’est peut-être de là que viendra un possible changement de paradigme », continue l’expert de Upply. Il estime que la désorganisation des services maritimes est telle que les lignes pourraient rencontrer des difficultés à reprendre l’argument essentiel auprès de la Commission pour obtenir cette dérogation.
Des hausses des PIB en 2022 et 2023
Pour sa part, le consultant américain IHS Markit estime que la situation actuelle va perdurer encore de nombreux mois. Dans ses perspectives pour 2022, le consultant estime que les pays développés pourraient enregistrer une progression de 3,8% de leur PIB en 2022. « Les politiques fiscales et monétaires soutiennent toujours la consommation. Les perturbations des chaînes logistiques pourraient continuer ». Et IHS Markit table sur une croissance continue jusqu’en 2026, année au cours de laquelle le taux de croissance devrait être encore de 3%. Pour rappel, en 2020, les échanges ont accusé une baisse de 3,4%.
Des perspectives à imaginer
Il est encore difficile de prévoir les différents scénarios susceptibles d’intervenir en 2022. Le seul point sur lequel les analystes se rejoignent est que la situation actuelle durera sur le premier trimestre 2022, voire au moins jusqu’à l’été. Ensuite, selon les effets de la vague actuelle de la Covid, de la relocalisation des industries pour réduire la dépendance à la Chine, du lieu de cette réindustrialisation et des mesures que l’Union européenne et les différents pays prendront, la résolution des perturbations logistiques peuvent se résoudre plus ou moins rapidement.
Réforme du Shipping Act
Déjà, aux États-Unis, la Chambre des représentants a adopté une première réforme de son Shipping Act. Même si pour les armateurs, l’effet sera minime sur la situation portuaire nationale, certains goulets d’étranglement pourraient se défaire. Et enfin, un point d’interrogation demeure sur les relations entre l’UE et le Royaume-Uni, avec les nouvelles mesures à entrer en vigueur en janvier. En 2021, les flux ont enregistré des baisses qui pourraient s’accentuer en 2022 si les autorités britanniques compliquent les formalités douanières.