Corridors et logistique

Conteneurs : les armateurs au mieux de leur forme financière au troisième trimestre

La publication des résultats du troisième trimestre confirme la bonne santé financière des armateurs opérant dans le conteneur. Les perturbations des chaînes logistiques et la congestion portuaire ont impacté les chiffres du troisième trimestre.

Après Mærsk, ZIM et Hapag Lloyd, c’est au tour du groupe CMA CGM de publier ses résultats financiers. Si le troisième trimestre a connu une croissance légèrement moindre que les autres trimestres, les chiffres des principaux armements conteneurisés restent sur une tendance de hausse.

Des résultats en hausse

Globalement, sur les trois premiers trimestres, les armements conteneurisés que sont CMA CGM, Mærsk, Cosco, Hapag Lloyd et ZIM ont enregistré une croissance. Les résultats financiers de ces armateurs demeurent bien au-dessus de ce qu’ils ont pu connaître en 2020. Pour les observateurs, « cette amélioration des résultats financiers des armateurs fait suite à plusieurs années de pertes. Ils ne font que reconstituer leurs finances pour l’avenir ».

(en M$ et 1000 EVP) CA % Ebitda % Volume %
Mærsk 33 643 60,8% 14 095 225,0% 19 652 6,4%
Cosco 31 761 125,7% NC NC 14 710 7,4%
CMA CGM 31 070 83,4% 14 093 328,0% 16 600 8,5%
Hapag Lloyd 16 869 50,2% 7 673 275,2% 10 100 3,3%
OOCL 10 800 114,4% NC NC 5 737 9,6%
ZIM 7 262 176,0% 4 236 740,5% 2 623 28,5%
Source: Communiqués des résultats des armateurs. Les résultats de OOCL et Cosco sont présentés séparément. © Ports et Corridors.

Progression du chiffre d’affaires de 60% à 176%

Cette embellie financière se traduit dans les chiffres d’affaires. Pour tous les armements, à fin septembre, ces données sont en forte progression. Elles évoluent entre 60% et 176%. La plus faible progression est à inscrire pour Hapag Lloyd et Mærsk. La plus forte hausse revient à ZIM. Ces chiffres sont à relativiser. En effet, si ZIM affiche la meilleure progression, l’armement israélien reste, parmi les armateurs analysés, celui avec le plus faible chiffre d’affaires sur cette période.

L’écart avec Mærsk se réduit

Le tassement de la croissance de Mærsk, sur les activités du transport maritime, rapproche le groupe danois de ses concurrents français, allemand et chinois. Avec 33,6 Md$ sur les trois premiers trimestres, Mærsk réduit son écart de volume d’affaires face à CMA CGM et Cosco. Il conserve plusieurs longueurs d’avance avec Hapag Lloyd, OOCL et ZIM.

Tassement sur les routes est-ouest

Ce léger revers dans les résultats de Mærsk s’explique, selon l’analyse menée par les dirigeants du groupe, par une baisse du volume traité au cours du troisième trimestre. « Sur le troisième trimestre, indique le rapport trimestriel de l’armement danois, les volumes chargés ont enregistré une baisse de 0,6% à 6526 EVP notamment en raison d’une diminution sur les liaisons maritimes est-ouest, partiellement compensés par une hausse des trafics sur les flux intra régionaux. La baisse des volumes est liée aux exportations d’Asie en raison du manque d’équipements et de congestions. Dans le même temps, l’augmentation des flux régionaux ont été dopés en Europe et en Amérique. » Et pour aller plus loin, Mærsk estime que les volumes sur le troisième trimestre affichent une baisse de 4% par rapport au troisième trimestre de 2019.

Allongement des temps à quai

Une analyse que partage le groupe chinois Cosco. Dans son rapport trimestriel, la baisse des volumes affichée au troisième trimestre est liée aux perturbations des chaînes logistiques. « Les temps à quai allongés et la difficulté pour trouver des équipements ont réduit le nombre de voyages réalisés ». Néanmoins, au cours de ce troisième trimestre, Cosco annonce un taux élevé d’utilisation de la capacité mise en place.

Hausse des volumes

Si les chaînes logistiques sont sous pression en ce moment, les volumes des armements continuent leur progression. Tous les armateurs affichent une croissance des conteneurs chargés. Elle va de 3% pour Cosco à 28% pour ZIM. Encore une fois, l’armement israélien part d’une base plus faible. Cette hausse reste en nombre, comparable à ce que les autres armements ont pu gagner sur les neuf premiers mois de l’année.

Tassement au troisième trimestre

Ces progressions s’inscrivent dans la tendance générale du monde de la conteneurisation. Selon les derniers chiffres de Container Trade Statistics, de janvier à octobre 2021, le volume transporté de conteneurs a progressé de 10,8%. Cette progression tend néanmoins à s’atténuer sur les derniers mois. En effet, dans son rapport trimestriel, Hapag Lloyd explique que cette augmentation a été de 23% sur la période de janvier à août. La fin de l’été et le début de l’automne souffrent de la hausse du prix de l’énergie.

Augmentation de 125% des taux de fret

Cette progression des volumes et le taux d’utilisation des capacités ont amené une hausse importante des taux de fret. ZIM estime que sur les neuf premiers mois de l’année, les taux de fret ont progressé de 125% à 2510$/EVP. Une hausse que l’armement a remarqué notamment sur le troisième trimestre avec une augmentation de 174% à 3226$/EVP. Pour sa part, Hapag Lloyd estime que la hausse des taux de fret atteint 65% sur les neuf premiers mois de l’année.

Coûts de l’énergie et de la manutention

En demeurant à des niveaux élevés, les taux de fret évitent aux armateurs de voir leurs résultats opérationnels chuter trop fortement. En effet, tous les armements constatent que le coût important de l’énergie a impacté leur Ebitda. De plus, ils ont subi une augmentation des coûts de manutention dans les ports qui s’estiment, en moyenne, aux environs de 12%. Au final, les Ebitda des compagnies maritimes affichent des taux de progression à trois chiffres, même si la situation tend à se normaliser sur les dernières semaines.

Stratégie vers l’intégrateur

Dans ce contexte financier favorable, les armateurs ont entamé un mercato de rachat. Hapag Lloyd a finalisé, pendant l’été, la reprise de Nile Dutch, opérateur spécialisé sur l’Afrique de l’Ouest. De leur côté, Mærsk et le groupe CMA CGM se sont tournés vers des acquisitions dans la commission de transport. La stratégie du premier armement de devenir un véritable intégrateur regroupant le transport maritime, la manutention et la commission de transport se confirme par la reprise de Senator International, commissionnaire aérien. Pour sa part, le groupe CMA CGM a commandé de nouveaux Airbus Cargo pour développer sa structure de transporteur aérien.

Acquisition dans les terminaux portuaires

Pour continuer dans cette même veine, les armateurs ont aussi porté leur intérêt pour les terminaux. Cosco a pris une participation dans le terminal portuaire allemand de Trellerort de HHLA, afin de consolider sa position sur le marché allemand. Du côté du groupe CMA CGM, a acquis 90% d’un terminal à Los Angeles (Fenix Marine Service), qu’il avait cédé quatre ans auparavant pour une somme quatre fois inférieure. Il est entré dans le port de Khalifat à Abu Dhabi, dans le terminal conteneurs du port d’Alexandrie, à Tripoli au Liban et dans le terminal TTI d’Algésiras. Pour sa part, Mærsk a posé un pied en Adriatique en prenant la concession du port de Rijeka.

Des hausses jusqu’en 2022

L’euphorie de la conteneurisation devrait durer au moins jusqu’à la fin de l’année. Pour l’armement marseillais, « la tension sur les capacités effectives de transport maritime pour les biens de consommation observée depuis l’été 2020 devrait se poursuivre au moins jusqu’au premier semestre 2022 », indique un texte de la direction. Un optimisme qu’Hapag Lloyd nuance sur la fin de l’année. Si la demande devait se maintenir dans les prochains mois, les évolutions des coûts des soutes pourraient bien peser en partie sur les résultats opérationnels. Mærsk estime que la croissance des volumes, estimée entre 7 et 9% en 2021, est dépendante de certaines incertitudes en raison de la congestion dans les ports. « Néanmoins, le marché va rester sur cette tendance sur le premier trimestre de 2022 », indique le rapport trimestriel de Mærsk. Enfin, Cosco reste optimiste pour 2022. L’armateur chinois se dit confiante dans l’avenir. « Le réseau maritime de Cosco couvre tout le globe avec une position de leader en Asie du sud-est. Nous pouvons ajuster nos services selon les évolutions des flux maritimes. »